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L'histoire des arts à l'école : vers un nouvel humanisme ?

L'histoire des arts à l'école : vers un nouvel humanisme ?

Publié le par Marielle Macé (Source : Paris I, INHA, EPHE)

 

Vendredi 18 décembre // 15h-18h salle Vasari, INHA


L'histoire des arts à l'école : vers un nouvel humanisme ?


Marc FUMAROLI

professeur honoraire au Collège de France


Etienne Jollet

professeur à l'Université de Paris X

Eric Dumaître

professeur de philosophie

Anne Ruelland

architecte, directrice des Publics à la Cité de l'architecture et du patrimoine


L'introduction récente d'un enseignement obligatoire d'histoire des arts à l'école représente une innovation dont les conséquences peuvent être importantes. Cette réforme semble confirmer la tendance qui, depuis quelques années, caractérise la révision des programmes scolaires. Après avoir longtemps souscrit aux théories sociologiques qui, au nom de l'égalité des chances, favorisaient l'acquisition des compétences au détriment des contenus, le système éducatif s'attache désormais à corriger les dérives d'un certain formalisme et à privilégier la dimension culturelle et esthétique du savoir sur les oeuvres. Une telle évolution fait nécessairement écho aux bouleversements qui affectent la place du savoir et de la culture dans notre société. L'hégémonie de l'image sur l'écrit, l'omniprésence et la marchandisation de la culture, l'évanouissement progressif de la frontière entre « culture cultivée » et divertissement, ont contraint l'école à assumer un rôle nouveau. En même temps que la transmission des connaissances, il lui faut désormais convaincre de la supériorité du savoir sur l'ignorance.

Dans ce contexte, quel peut être le rôle de la légitimation d'un savoir théorique et historique sur l'art ? Comment le nouvel enseignement d'histoire des arts peut-il contribuer à l'entreprise de relégitimation de l'école elle-même ? La pluridisciplinarité propre à l'histoire des arts peut-elle favoriser l'émergence d'une unité qui fait défaut entre les disciplines scolaires ? De même, la connaissance artistique peut-elle aider à donner sens au travail de l'élève en réconciliant à ses yeux ce qui relève du « sensé » et du « sensible » ? Et, en définitive, peut-elle ménager les conditions propices à cet otium désignant, pour Marc Fumaroli, l'expérience du « recul et du repos » si précieuse pour la construction du goût ?



Thèmes des interventions

Marc Fumaroli

Comment dresser la généalogie de l'otium des Anciens et déterminer le rôle qu'il pourrait jouer aujourd'hui dans la formation du goût et de l'esprit ? Et, à cette lumière, quelle devrait être la place de l'art dans l'éducation ? Quelle complémentarité devrait-on bâtir entre la politique culturelle et la politique éducative pour répondre à l'ambition humaniste contenue dans la réforme créant un enseignement obligatoire d'histoire des arts ? Telles sont les pistes qu'empruntera Marc Fumaroli pour répondre à la question qui donne son titre au séminaire.


Etienne Jollet

Professeur d'histoire de l'art, vice-président de l'APAHAU (Association des professeurs d'archéologie et d'histoire des l'art des universités), et ancien enseignant dans le secondaire, Etienne Jollet apportera à notre problématique un éclairage très concret. Il fera notamment apparaître la façon dont l'histoire des arts peut s'insérer matériellement dans le système éducatif actuel et réaliser toutes ses potentialités. Comment doit-elle se rapprocher et se distinguer de la discipline universitaire (quelles doivent être les orientations d'une didactique adaptée au monde scolaire) ? comment doit-elle s'articuler avec l'enseignement en arts plastiques ? En particulier, comment peut-elle être le siège privilégié d'une réconciliation de ce qui relève du « sensé » et du « sensible », de l'éveil de la créativité, et de l'acquisition de connaissances artistiques fondant le goût et le sens critique ?


Eric Dumaître

Enseignant en philosophie dans une classe préparatoire et sociologue, il démontre dans son livre Les Raisons d'un engouement : le structuralisme littéraire et la crise de la culture scolaire, comment l'enseignement des Lettres, siège traditionnel des humanités, a été le terrain d'un offensive anti-humaniste, laquelle s'est soldée par un certain triomphe de la forme sur les contenus : à l'effort de culture de soi par la littérature s'est substituée une entreprise de connaissance objective, à visée technicienne, des « structures littéraires ». Or, les Lettres sont aujourd'hui le champ privilégié d'une redéfinition de ce que devrait être une culture générale. Cette situation soulève la question du sens et des fins de la culture, tout en imposant un défi : comment dépasser les abstractions et les lieux communs « humanistes » traditionnels, lesquels n'ont d'autre effet que d'alimenter la controverse ? Ce débat en cours dans les Lettres peut ainsi se révéler très éclairant pour la problématique relative à l'histoire des arts.


Anne Ruelland

La Cité de l'architecture et du patrimoine est l'héritière d'une institution muséale, le Musée des Monuments français, dont la mission était d'abord pédagogique. Elle poursuit cette voie en oeuvrant comme l'un des acteurs centraux de l'éducation à l'architecture et au patrimoine, en liaison avec l'Education nationale. Le témoignage d'Anne Ruelland, en charge des publics, permettra d'aborder une dimension très concrète de l'introduction de l'histoire des arts à l'école, et de la collaboration particulière des établissements culturels dans le succès de cette réforme. En particulier, elle évoquera la manière dont s'accomplit la sensibilisation des jeunes à l'importance de l'architecture et du patrimoine comme élément déterminant de leur cadre de vie. Nous pourrons ainsi apprécier comment aujourd'hui, l'acquisition des repères culturels passent par le sensible et combien les lieux culturels peuvent faire le lien entre l'émotion et l'apprentissage des repères.