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L'Entretien au XVIIe siècle

L'Entretien au XVIIe siècle

Publié le par Marc Escola (Source : Agnès Cousson)

 L’Entretien au XVIIe siècle 

Journée d’études organisée par Agnès Cousson, 19 et 20 mars 2015, Université de Bretagne Occidentale, Centre d’Études des Correspondances et des Journaux Intimes de Brest

 

           Issu de la tradition des dialogues antiques, l’Entretien, profane ou spirituel, oral ou épistolaire, connaît un vif succès dans la seconde moitié du XVIIe siècle. L’Entretien de Pascal avec M. de Sacy, consigné par Nicolas Fontaine (Mémoires), est l’exemple le plus célèbre. Les Entretiens de  Voiture et de Costar, édités récemment, de Guez de Balzac, de Mme de Longueville et du confesseur Antoine Singlin, de la mère Angélique Arnauld et de son neveu, le Solitaire et écrivain Antoine Le Maistre, au monastère de Port-Royal, sont d’autres exemples d’un genre en plein expansion.   

La journée d’études des 19 et 20 mars 2015, se propose d’analyser le genre de l’Entretien, selon une approche générique, thématique, esthétique, littéraire et anthropologique. Dans un siècle qui privilégie l’action et l’homme public, marqué par la morale augustinienne sévère à l’encontre du moi, suspect de vanité, comment expliquer l’enjouement du public mondain pour un genre qui rapporte des pensées et des sentiments, le for privé, sur un ton plus ou moins grave selon la nature de l’échange et les sujets abordés, souvent en lien avec l’actualité du moment ? La spécificité et les potentialités du genre, ses destinataires, l’influence du sujet sur la forme, les relations des personnages en présence seront examinés. Pourquoi « s’entretenir » plutôt qu’écrire ses Mémoires, rapporter un entretien plutôt que rédiger une biographie ? Qu’apporte l’Entretien à la direction de conscience et à l’examen de soi inhérent à la confession ? En quoi se distingue-t-il de la lettre et du dialogue, dont il se nourrit et dont il adopte la forme ? Y a-t-il une poétique de l’Entretien ?

La finalité de l’Entretien, son rôle, dans le cas des Entretiens savants, dans la diffusion de la culture et de la littérature dans les salons, hostiles à la science des doctes, et les questions soulevées par le genre nourriront la réflexion. Échange oral ou épistolaire, consigné et ordonné par un tiers, l’Entretien s’inscrit dans une situation d’énonciation précise, placée sous le signe du dialogisme. Il suppose une sélection des propos et une mise en forme de ceux-ci. Il pose la question de la sincérité et de la fiabilité du discours personnel. L’Entretien est-il un art de la conversation particulier, dans un siècle dominé par le bel esprit et par l’idéal de l’honnête homme ? Le statut du personnage entretenu, parfois soumis à un devoir moral d’édification, la volonté du sujet scripteur de laisser de l’autre une image dorée pour la postérité, un accord tacite entre les deux interlocuteurs, la position d’autorité éventuelle de l’un sur l’autre, le défaut de mémoire, des raisons politiques ou religieuses apparaissent comme autant d’entraves potentielles à la libre expression de soi. Inversement, la connivence affective ou intellectuelle entre les deux personnages qui s’entretiennent, la familiarité des liens, la souplesse de la forme et la spontanéité de l’échange, dans le cas de l’Entretien oral surtout, favorisent la perte de maîtrise de soi et invitent à l’épanchement. La finalité de l’Entretien, morale, philosophique, spirituelle, est un autre facteur qui influe sur les choix discursifs et narratifs opérés par les deux interlocuteurs ou correspondants.

L’Entretien comme voie d’expression du moi sera une ligne directrice majeure de la journée d’études, dans le dessein de cerner les spécificités d’un genre dans la connaissance du sujet intime, ses possibilités et ses limites en matière d’expression de soi. Les comparaisons, quand elles sont possibles, entre les Entretiens et les autres écrits personnels d’un même auteur, Mémoires, lettres, confession, relation autobiographique seront encouragées à cette fin, de même que la confrontation de l’Entretien avec les genres portant sur la personne, la biographie, le portrait, l’anecdote, en vogue au XVIIe siècle. Cette approche thématique comparative, d’autant plus pertinente que les textes personnels font intervenir ces différents genres, permettra d’analyser la répartition des informations et leur hiérarchisation. Le cas des Entretiens oraux transcris sera particulièrement intéressant pour comprendre les fonctions respectives de l’oral et de l’écrit, et le rôle de la bienséance dans l’expression personnelle. Que révèle et que tait l’Entretien du sujet entretenu, mais également de son interlocuteur-scripteur ?

Une étude sémantico-syntaxique, centrée sur les occurrences du terme et sur ses différentes acceptions, pourra être envisagée. Qu’est-ce que « Parler par manière d’entretien », expression récurrente dans les correspondances du temps ?

Entretiens d’hommes politiques et de célébrités, de personnalités étrangères qui maîtrisent mal la langue française, le genre connaît un nouveau regain aujourd’hui. Aussi cette première journée d’études de deux jours, centrée sur le XVIIe siècle, sera-t-elle suivie, l’année suivante, d’une seconde, voire d’une troisième journée, qui envisagera l’évolution du genre au fil des siècles, marquée par une affirmation de sa vocation autobiographique. Ce sera l’occasion de réfléchir à la définition actuelle du terme, dans la littérature française et étrangère.

Les propositions de communication sont à envoyer pour le 15 septembre 2014 aux adresses suivantes :

agnes.cousson@laposte.net

centre.correspondances@univ-brest.fr