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L’Écho du théâtre : dynamiques et construction de la mémoire phonique, XXe-XXIe siècles

L’Écho du théâtre : dynamiques et construction de la mémoire phonique, XXe-XXIe siècles

Publié le par Matthieu Vernet (Source : Marion Chénetier-Alev)

L’écho du théâtre : dynamiques et construction de la mémoire phonique, XXe-XXIe siècles

Colloque international organisé par Hélène Bouvier et Marion Chénetier-Alev

Jeudi 19 et vendredi 20 novembre 2015. ENS, 45 rue d’Ulm, 75005 Paris

 

ECHO [ANR-13-CULT-0004]

[ARIAS-THALIM (CNRS, ENS, Université Sorbonne Nouvelle-Paris 3) / LIMSI-CNRS / BNF, Université d’Amsterdam / CRIalt-Université de Montréal]

           

Appel à communication

Depuis la fin du XIXe siècle, le développement des technologies d’enregistrement, de production et de diffusion du son a contribué à l’élaboration d’une nouvelle mémoire phonique du théâtre, de la voix parlée aux mondes sonores captés par les microphones (bruitages, bruits et musiques). Les phonogrammes (cylindres, disques, bandes magnétiques), en particulier radiophoniques, ont constitué une masse sans précédent de documents : créations ou recréations dramatiques, captations de spectacle, entretiens avec les acteurs, qui ont éduqué l’oreille de l’auditeur à la diversité et à la nouveauté des sons. Dès le théâtrophone (1881), le public a pu faire l’expérience d’une écoute acousmatique des voix du théâtre. Le phonographe et la radio ont ensuite généralisé et fait évoluer cette écoute. Acteurs, metteurs en scène et directeurs de théâtre se sont ainsi très rapidement confrontés aux questions inédites posées par la diffusion audio, puis par la mise en onde de leurs productions.

Les nouvelles expériences phoniques, acoustiques et auditives ont profondément nourri le travail des artistes, et l’on assiste au XXe siècle à l’essor des réflexions et des créations autour de la matière sonore du théâtre : voix parlées, bien sûr, mais aussi musique, chansons, bruits de scène et de salle, sans oublier l’élément majeur qu’est le silence, décliné en d’infinies nuances. Les lieux de conservation (bibliothèques, musées) et de création (théâtres, compagnies) ont dès le début du XXe pris conscience de l’importance des traces sonores de la scène, et en ont entrepris l’archivage, participant activement à la mise en place d’un champ d’investigation inédit.

Inscrit dans le cadre du projet ANR ECHO [Écrire l’histoire de l’oral. « L’émergence d’une oralité et d’une auralité modernes. Mouvements du phonique dans l’image scénique (1950-2000)], ce colloque souhaite interroger les dynamiques et les processus à l’œuvre dans la constitution d’une mémoire phonique du théâtre. Quels sont les lieux où s’élabore cette mémoire ? Comment se fabrique-t-elle ? De quels supports dispose-t-on pour la capter, de la fin du XIXe siècle à aujourd’hui, et selon quels critères l’archive-t-on au fil du temps ? Comment s’articulent mémoire collective et mémoire individuelle ? Si l’on postule qu’il n’est guère d’examen possible de la mémoire sonore sans recourir à son expression verbale, écrite ou orale, comment passe-t-on de l’inscription d’une scène dans la mémoire à sa formulation, comment décrit-on un souvenir sonore ? Que nous apprend l’étude de cette mémoire sur les attentes, les représentations, la réception et l’évolution de la voix parlée et des autres sons au théâtre ? Comment les traces laissées et les signes observés d’une évolution de la diction, du rythme de l’élocution, des accents et des langues, de la place du verbe en scène, contribuent-ils à une vision renouvelée de la conception et de la pratique théâtrales ?

Ce projet de recherche fait également suite au programme « Le son du théâtre / Les technologies sonores et le théâtre », entrepris par l’équipe de recherche franco-québécoise ARIAS/CRI, dont les résultats ont donné lieu à plusieurs publications[1]. Il s’agit ici de poursuivre cette investigation sur le long terme qui se donne pour objectif de contribuer à une ré-écriture de l’histoire récente du théâtre occidental et, au-delà, à une redéfinition contemporaine de l’expression, de la mémoire et de l’écoute verbales, en maintenant notamment l’approche interdisciplinaire adoptée.

C’est dans toutes ses dimensions que le colloque souhaite aborder la question de la mémoire phonique (la voix/le son) du théâtre. On pourra donc envisager de traiter le sujet sous les angles suivants :

1.Institutionnalisation de la mémoire phonique

La constitution des archives sonores dans les lieux de création et de conservation : supports, modalités, accès, enjeux.

2.Fabrique de la mémoire phonique

Typologie des supports (diversité des phonogrammes : enregistrement acoustique, électrique, numérique), évolution des normes et conséquences sur la représentation des sons (qu’advient-il, par exemple, de la mémoire des sons lorsque certains supports sont délaissés au nom d’une « amélioration » acoustique ?).

3.Mémoire des spectateurs

Accès par les archives, les questionnaires ou les entretiens, la verbalisation écrite ou orale de la mémoire du spectateur ; les formes de la transmission de cette mémoire au-delà du témoignage direct (par exemple, les créations contemporaines qui font de la mémoire du spectateur l’objet même du spectacle).

4.Mémoire des acteurs

Histoire et techniques de la mémorisation du texte par l’acteur : sources, évolution, transmission.Question du « souffleur » : permanence et mutations.

5.Mémoire des lieux

Histoire acoustique des salles de théâtre. Reconstitution de la conception et de l’équipement, travail sur archives, usage du modèle numérique (« loupe » auditive dirigée vers le passé).

6.La radio : création et conservation de la mémoire sonore

La radio comme laboratoire de la fabrique et de l’imaginaire sonores pour le théâtre ; comme lieu de création et de conservation de la mémoire phonique théâtrale.

7.Approche cognitive de l’impression verbale, vocale et sonore dans la mémoire

Mémoire de la voix parlée et mémoire des sons non articulés. La voix parlée au sein des autres mémoires sensorielles. Empreinte et réactivation d’une expérience auditive.

 

Les propositions (1500 signes, espaces compris) comporteront un titre et un résumé ainsi que des mots-clés. Elles préciseront la (ou les) rubrique(s) choisie(s) et seront accompagnées d'une brève bio-bibliographie de l'auteur. Elles devront parvenir en format Word et PDF par courrier électronique à la fois à Hélène Bouvier (helenebouviersmith@gmail.com) et Marion Chénetier-Alev (marion.chenetier@gmail.com), pour le 1er  juin 2015. Réponse aux auteurs : août 2015.

 

Call for Papers

Since the end of the 19th century, the development of sound recording, production and broadcasting technologies has contributed to the creation of a new phonic memory of the theater, from the spoken word to the sonic worlds recorded by microphones (sound effects, noises and music). Phonograms (on cylinders, records, magnetic tape), and in particular those broadcast by radio, have built up an unprecedented mass of documents (dramatic creations or recreations, audio-recordings of theatrical shows, interviews with actors) that have trained the audience’s ears to the variety and novelty of sounds. Since the invention of the « Théâtrophone » (the theatre phone) in 1881, audiences have been able to experience an acousmatic listening of theatrical voices. The phonograph and the radio then became available, ensuring the diffusion of such a listening mode, and thus making for its evolution. Actors, stage directors and theater managers were thus rapidly confronted with the new questions raised by audio broadcasting, and later by the radio production of their creations.

These new sonic, acoustic, and auditory experiences have deeply fed the work of artists, and throughout the 20th century reflexions about and creations based on the sound material of the theatre have been on the rise: the spoken voice of course, but also music, song, stage and audience noises, as well as - an essential element - silence, playing out its endless modulations. All places of storage and creation, from the beginning of the 20th century, became aware of the importance of such sonic traces of the stage, and soon began to build an archive, thus taking an active part in the constitution of a new research field.

This colloquium takes place within the framework of the ANR ECHO project [Writing the history of orality. The rise of a modern orality and aurality. Phonic movements in stage imagery (1950-2000)]. Its aim is to question the dynamics and processes at work in the build-up of a phonic memory of the theatre. Where does such a memory build up ? How does it ? What have been the various devices available to capture it, from the end of the 19th century up to our times, and what the criteria used to constitute it as archive through time ? How do individual and collective memories link up?

If one postulates that sound memory can hardly be examined without dealing with its verbal expression, written or oral, how can the shift occur from the memorial inscription of a scene to its formulation, how does one describe a memory of sound ? What does the study of such a memory tell us of the expectations, representations, reception and evolution of the spoken voice and other sounds in theatre ? How do the traces and observable signs left by the evolution of diction, of the rhythms of delivery, accents and idioms, of the status of the spoken word on stage contribute to a renewed vision of theatrical conceptions and practices?

This research project is also a sequel to that dedicated to « Le son du théâtre / Sound technologies and the theatre » undertaken by the French-Québecois ARIAS/CRI research team, the results of which have given birth to several publications[2]. The project now consists in turning this endeavor into a long-term investigation contributing to a re-writing of the recent history of the theatre in the West and, beyond this, to a contemporary re-definition of verbal expression, memory and listening, along our customary interdisciplinary lines.

This colloquium aims at approaching the question of phonic memory (voice and sound) in its various dimensions. Proposals could therefore be considered under the following angles :

1.The institutionalization of phonic memory

The constitution of sound archives in centres of creation and storage : physical media, modalities, availability, what is at stake.

2.The build-up of phonic memory

Typology of recording equipment (diversity of recordings : acoustic, electric, digital), the evolution of norms and is consequences on the representation of sounds (what happens, for example, to the memory of sounds when new technologies replace former means in the name of acoustical « improvement » ?)

3.The memory of spectators

Archival access, questionnaires, interviews, written and oral verbalization of audience memory ; its forms of transmission beyond direct testimony (i.e. contemporary creations dealing directly with audience memory).

4.The memory of actors

History and techniques of textual memorization by the actor : sources, evolution, transmission. « Prompting » : permanence and mutations.

5.Place memories

Acoustical history of theatres. Reconstitution of their conception and equipment, work on archives, use of the digital model (auditory « magnifying glass »). 

6.Radio : creation and preservation of phonic memory

The radio as practical and imaginary sound laboratory for the theatre ; as a place of creation and preservation of theatrical phonic memory.

7.Cognitive approach of verbal, vocal and sound imprints on memory

Memory of the spoken voice and memory of inarticulate sounds. The spoken voice among other sensory memories. Imprint and reactivation of an auditory experience.

 

Proposals (1500 signs, and blanks) must have a title and include an abstract as well as a list of keywords. Indication of the rubric(s) chosen is required, as well as a short bio-bibliography of the proponent. They should be sent by e-mail in Word and PDF format to à Hélène Bouvier (helenebouviersmith@gmail.com) and Marion Chénetier-Alev (marion.chenetier@gmail.com), before June 1st 2015. Answers will be given by August 2015.

 

Contacts :  Organisateurs du colloque : Hélène BOUVIER et Marion CHÉNETIER-ALEV

Comité scientifique :

Anne-Françoise BENHAMOU, Études théâtrales, professeur, directrice du DHTA (Département d’histoire et théorie des arts), ENS, membre statutaire de THALIM, équipe ARIAS

Hélène BOUVIER, Ethnologie, chargée de recherche au CNRS, membre statutaire de THALIM, équipe ARIAS

Jeanne BOVET, Histoire et esthétique du théâtre, professeur, CRIalt (Centre de recherches intermédiales sur les arts, les lettres et les techniques) / Université de Montréal

Marion CHÉNETIER-ALEV, Études théâtrales, maître de conférences, Université François-Rabelais de Tours, chercheur associé à THALIM, équipe ARIAS

Daniel DESHAYS, Techniques et écritures du son, directeur du département Son (ENSATT, Lyon), chercheur associé à THALIM, équipe ARIAS

Sandrine DUBOUILH, Études théâtrales, professeur, Université Michel de Montaigne Bordeaux, chercheur associé à THALIM, équipe ARIAS

Joël HUTHWOHL, directeur du Département des arts du spectacle, BNF

Brian F. G. KATZ, Acoustique, chargé de recherche au CNRS, LIMSI-CNRS (Laboratoire d’informatique pour la mécanique et les sciences de l’ingénieur)

Jean-Marc LARRUE, Études théâtrales, professeur, CRIalt (Centre de recherches intermédiales sur les arts, les lettres et les techniques) / Université de Montréal

Marie-Madeleine MERVANT-ROUX, Études théâtrales, directeur de recherche au CNRS, directrice adjointe de THALIM, équipe ARIAS

Viktoria TKACZYK, Arts and New Media, assistant professor, Université d’Amsterdam ; Institut Max-Planck, Berlin, Dilthey Fellowship Research Group Leader.

 

 

[1] Cf. en particulier : « Le son du théâtre I. Le passé audible », Théâtre/Public n°197, 2010 ; « Le son du théâtre II. Dire l’acoustique », Théâtre/Public n°199, 2011 ; « Le son du théâtre III. Voix words words words », Théâtre/Public n°201, 2011. L’ouvrage Le Son du théâtre. Éléments d’une histoire acoustique et phonique (XIXe-XXIe siècles) est en préparation. Voir aussi Soundspaces. Espaces, expériences et politiques du sonore, PUR, 2014 ; Des paroles et des hommes et Les Archives de la parole, Revue de la Bibliothèque nationale de France, n° 47 et n° 48, 2014.

[2] See, in particular : « Le son du théâtre I. Le passé audible », Théâtre/Public n°197, 2010 ; « Le son du théâtre II. Dire l’acoustique », Théâtre/Public n°199, 2011 ; « Le son du théâtre III. Voix words words words », Théâtre/Public n°201, 2011. L’ouvrage Le Son du théâtre. Éléments d’une histoire acoustique et phonique (XIXe-XXIe siècles) est en préparation. Voir aussi Soundspaces. Espaces, expériences et politiques du sonore, PUR, 2014 ; Des paroles et des hommes et Les Archives de la parole, Revue de la Bibliothèque nationale de France, n° 47 et n° 48, 2014.