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Journées d'étude "Microcosme et macrocosme, les avatars d'une idée"

Publié le par Alexandre Gefen (Source : Camille Tauveron)

Le principe selon lequel un réseau d'analogies occultes relierait le monde d'en bas avec le monde d'en haut constitue, selon l'historien A. Faivre, le premier élément fondamental de la pensée ésotérique occidentale. Selon les textes platoniciens, gnostiques et hermético-alexandrins, abondamment glosés au Moyen Âge par les Pères et les docteurs de l'Église, puis repris inlassablement à la Renaissance par les érudits hermétisants et par les kabbalistes chrétiens, l'homme et l'univers, microcosme et macrocosme, ne peuvent être lus ni compris qu'en regard, car ils se contiennent – et s'illustrent – mutuellement.

Dans l'histoire de l'ésotérisme occidental, on sait que cette idée n'est pas demeurée stérile. Pendant des siècles, elle a servi de modèle théorique sous-jacent aux pratiques de l'alchimie et de l'astrologie ainsi que, dans la culture juive, à celles de la kabbale. Après avoir joui d'un nouvel essor à la Renaissance, elle a ensuite inspiré la médecine holistique de Paracelse, la théosophie mystique de Böhme, les fresques visionnaires de l'au-delà de Swedenborg. Si, à partir de la fin du XVIIe siècle, les sciences de la Nature l'ont jugée non pertinente pour l'explication des phénomènes physiques, elle n'en était pas moins, désormais, profondément enracinée dans l'imaginaire philosophique, artistique et littéraire de l'Occident.

S'interroger, dans une perspective interdisciplinaire, sur la présence – ou sur la résurgence – de ce modèle de pensée au sein de différents domaines de la littérature et de la pensée occidentale depuis le Moyen Âge, cela revient, selon nous, à relever deux genres de défis. D'un côté, il s'agit de comprendre quelles sont les formes esthétiques et sémiotiques qu'a pu revêtir le principe d'analogie micro-macrocosmique, une fois qu'on l'a dégagé de son contexte naturel, de type spéculatif, pour l'appliquer à des contextes différents, littéraires, artistiques ou autres. La diversité virtuelle de ces formes tient, nous semble-t-il, à la nature même du principe en question, qui s'avère être d'une souplesse et d'une générativité remarquables.

À un deuxième niveau, l'étude de ce genre d'emprunts favorise le retour de la réflexion sur le modèle de pensée en question. D'où provient, en effet, l'idée de l'analogie micro-macrocosmique, pivot conceptuel autour duquel se sont organisés, au sein de notre culture, quelques millénaires de spéculations anthropologiques et cosmologiques, mais qui est répandue également dans les traditions religieuses d'Orient? Qu'est-ce qui l'a rendue aux yeux de l'homme occidental, des siècles durant, un instrument apte à penser le réel? Et enfin: à notre époque, l'époque du « désenchantement du monde », quelle est la fonction d'un modèle de pensée célébrant la cohésion ontologique de toutes choses, assurée par d'invisibles signatures, et réaffirmant, par là même, l'unité ultime de l'univers?

Nous suivrons l'évolution de ce motif au fil des siècles et au fil des textes au cours de deux journées d'étude qui se tiendront à l'ENS-Ulm les 12 et 13 décembre, en salle Dussane.

Programme

Vendredi 12 décembre

Matin :
9h45 Accueil des participants et présentation générale
10h15 Edit Anna Lukács (Freie Universität, Berlin) : « La sphère infinie comme lien entre le microcosme et le macrocosme dans la philosophie des mystiques rhénans »
11h Amandine Mussou (Paris IV) : « “Il est ‘petis mondez' nommés''. Microcosme et macrocosme dans Les Eschés amoureux et Le Livre des eschez amoureux moralisés d'Évrart de Conty »
11h45 Denis Hue (Université de Rennes) : « Homme microcosme et encyclopédie au Moyen Âge »
12h15-14h Pause

Après-midi :
14h Francesco Baroni (EPHE, Paris) : « Le coeur, soleil du corps. Marsile Ficin et la mystique du coeur dans les courants ésotériques de la Renaissance »
14h45 Sandrine Soltane-Castellana (Université de Tours) : « Le quatre mondes dans l'Heptaple de Jean Pic de la Mirandole »
15h30 Pause
15h45 Nicolas Crémona (Paris III - ENS) : « Microcosme et macrocosme chez Roger Caillois: retour sur une théorie de l'unité du monde »
16h30 Muriel Cunin (Université de Limoges) : « Corps humain, corps politique, corps poétique: The Purple Island or The Isle of Man de Phineas Fletcher (1633) »
17h15 Fin de la première journée

Samedi 13 décembre

Matin :
9h45 Accueil des participants

10h Mélanie Jecker (Paris IV) : « Macrocosme et microcosme : la mélancolie dans l'Espagne du Siècle d'Or »
10h45 Julia Christ (Paris IV - Université de Francfort) : « La monadologie de Leibniz: le début de la réflexion de l'univers dans l'individu »
11h30 Sandra Collet (Université de Marne-la-Vallée) : « La théorie de l'âme-harmonie comme fondement d'une psychologie musicale chez Balzac »
12h15-14h Pause

Après-midi:
14h15
Benjamin Barret (EPHE, Paris) : « La sphère cabalistique de Lazare Lenain (1793-1877), ou l'art de localiser les bons génies »
15h Jean-Michel Rietsch (Université de Haute-Alsace) : « Nicolas Bouvier (1929-1998), L'usage du (grand et du petit) monde: le corps est, pour le meilleur et pour le pire, l'image du monde »
15h45 Pause
16h Erika Martelli (Lahic - EHESS, CNRS) : « Le lien microcosme/macrocosme dans l'oeuvre de Michel Leiris »
16h45 Camille Tauveron (Université de Rennes) : « Réécriture du motif de l'homme microcosme dans la fantasy destinée à la jeunesse: l'exemple de P. Pullman »
17h30 Conclusion