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Ironies balzaciennes

Ironies balzaciennes

Publié le par René Audet (Source : LITOR)

IRONIES BALZACIENNES

Journée d'Études organisée par le GIRB (Groupe International de Recherches Balzaciennes,
responsable : Nicole Mozet),
le samedi 8 juin 2002
Maison de Balzac
47 rue Raynouard, 75016 Paris

Le développement parallèle des études sur l'ironie et de la recherche en poétique
balzacienne, particulièrement sensible depuis une vingtaine d'années, a laissé penser que le
moment était venu de faire le point sur un sujet, maintes fois abordé, sans cesse rappelé,
jamais vraiment étudié : le traitement par Balzac de ce trait de style qu'est l'ironie - désignation
à nuancer, sans doute. La question n'est pas une évidence : y a-t-il à proprement parler ironie
chez Balzac ? Les distinctions génériques et esthétiques, ironie, satire, humour, délicates dans
tous les cas, relèvent sur ce corpus d'une quasi impossibilité.
Sans doute convient-il, pour aborder pleinement cette notion ambiguë de partir du moment
romantique de sa mobilisation massive dans les discours occidentaux (Schlegel). La
consécration d'une pause auctoriale du sujet, qui choisit, souvent, l'ironie pour se distinguer,
pour marquer le détachement, la distance, et éventuellement pour susciter le sourire critique,
est l'un des fondements de la pensée moderne de l'individu. Le trait de style dépasse alors sa
ponctualité anecdotique pour devenir le vecteur d'une morale, faite autant de refus que de
subversion retorse. La perspective diachronique, à privilégier, invite donc à penser l'ironie comme
la pragmatique particulière d'une socio-poétique historique, plutôt que comme une rhétorique
polyvalente aux codes étanches. Autrement dit, l'on prendra soin de replacer le discours critique
balzacien dans son contexte de production : pourquoi l'ironie à ce moment-là de l'histoire, de
l'histoire du roman ? devenir de l'ironie, règles et modèles de l'ironiste, etc.
Sans pour autant négliger les objets du discours ironique (femmes, provinciaux, mondains,
sexualité, argent, etc.), l'on essaiera de privilégier l'étude approfondie des mises en formes des
énoncés ironiques dans leur prise en charge par des énonciations ironistes : travail sur les
signaux, les déclencheurs d'ironie, ironie et humour, positionnement du sujet critique, dispositif
scénographique, rôle particulier des clichés et stéréotypes, ironie argumentative, etc. Dans tous
les cas, et pour dépasser la simplification d'une ironie univoquement antiphrastique, l'on se
souviendra que l'étude des phénomènes ironiques en régime littéraire ne relève pas tant " d'une
poétique des effets d'oppositions (contraires et contradictoires entre sens implicites et sens
explicites) que d'une poétique des effets de positions de certaines instances textuelles (Hamon,
1996, pp. 124-125).
Dans les travaux proposés, l'on tentera, si possible, d'éviter les études monographiques
(du type : " l'ironie dans Illusions perdues "), tout comme l'on essaiera de ne pas aller traquer
l'ironie dans les exemples les plus attendus (La Vieille Fille, bien sûr). On se souviendra que
chez Balzac, l'ironie fonctionne aussi bien au niveau micro-structural (l'ironie comme trope sur
un énoncé, en particulier l'énoncé métaphorique) qu'au niveau archi-textuel (la lettre-réponse de
Natalie de Manerville dans Le Lys dans la vallée, et son effet " ironie " dans un roman qui réfute,
à première vue, toute possibilité ironique). On fera la part des écritures parodiques plus ou
moins ambiguës (exemple évident, le titre Histoire de la grandeur et de la décadence de César
Birotteau, marchand parfumeur [...], etc. ; exemple moins simple, le titre Splendeurs et misères
des courtisanes). Et l'on prendra soin de mesurer aussi la valeur stylistique de cette écriture
dans la poétique du récit réaliste. En somme, il s'agira de mesurer les usages variés par Balzac
(d'où le pluriel de notre titre) de pratiques énonciatives qui sont autant de modes de
représentation.



Indications bibliographiques :

. Vladimir JANKÉLÉVITCH : L'Ironie ou la bonne conscience, Paris, PUF, 1950.
. Wayne C. BOOTH : A Rhetoric of Irony, Chicago-Londres, University of Chicago Press, 1974.
. René BOURGEOIS : L'Ironie romantique, Grenoble, PUG, 1974.
. Catherine KERBRAT-ORECCHIONI : " Problèmes de l'ironie ", in L'Ironie, Lyon, PUL, 1976.
. Poétique, n° 36 [L'Ironie], Paris, 1978.
. Philippe LACOUE-LABARTHE & Jean-Luc NANCY, L'Absolu littéraire. Théorie de la littérature
du romantisme allemand, Paris, Seuil, 1978.
. Catherine KERBRAT-ORECCHIONI : " L'ironie comme trope ", Poétique, n° 41, 1980.
. Maurice MÉNARD : Balzac et le comique dans La Comédie humaine, Paris, PUF, 1983.
. Linda HUTCHEON : Irony's Edge : The Theory and Politics of Irony, Londres-New York,
Routledge, 1994.
. Philippe HAMON : L'Ironie littéraire. Essai sur les formes de l'écriture oblique, Paris, Hachette,
1996.
. Pierre SCHONTJES : " Le point sur l'ironie ", in Alcanter de BRAHM : L'Ostensoir des ironies,
La Rochelle, Rumeur des Âges, 1996.
. Ruth AMOSSY & Anne HERSCHBERG PIERROT : Stéréotypes et clichés. Langue, discours,
société, Paris, Nathan, 1997.
. Éric BORDAS : Balzac, discours et détours. Pour une stylistique de l'énonciation romanesque,
Toulouse, PUM, 1997 (" Ironie humoresque ou écriture satirique ? ", pp. 183-193).
. Anne-Marie PAILLET-GUTH : Ironie et paradoxe. Le discours amoureux romanesque, Paris,
Champion, 1998.
. Sophie DUVAL & Marc MARTINEZ : La Satire, Paris, Armand-Colin, 2000.
. Christèle COULEAU : " L'ironie, principe de réversibilité du récit ", La Licorne, n° 56 [Envers
balzaciens], Poitiers, 2001.
. Pierre SCH?NTJES : Poétique de l'ironie, Paris, Seuil, 2001.

Contact : Éric BORDAS (Université Paris 3)
99, rue Mouffetard - F. 75005 Paris
01.45.35.76.64 - 06.84.37.75.55
erbordas@club-internet.fr


Matinée (10 h.-12 h. 30) : Présidence Roland CHOLLET

. Éric BORDAS (Paris 3) : " Ironies balzaciennes " [présentation de la Journée].

. Marie de GANDT (Paris 8) : " L'ironie romantique (1830) " [exposé général, théorique &
historique].

. Pierre SCHONTJES (Gand) : " Éthique & ironie ".
. Philippe HAMON (Paris 3) : " Autour, à partir & à propos de La Vieille Fille ".


Après-midi (14 h. 30 - 18 h.) : Présidence Stéphane VACHON

. Ruth AMOSSY (Tel-Aviv) : " Fonctions argumentatives de l'ironie balzacienne ".
. Anne-Marie PAILLET-GUTH (Paris 12) : " L'évaluation ironique ".

. Jacques DÜRRENMATT (Paris 7) : " Suspensions ironiques ".
. Gilles BONNET (Tarbes) : " Économie romanesque du ridicule : le cycle de Vautrin ".