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Appels à contributions
In extremis, une poétique de la modernité

In extremis, une poétique de la modernité

Publié le par Alexandre Gefen (Source : Jean-Pierre Texier)

REVUE "LA BIBLIOTHEK SAUVAGE"

ABREUVOIR ECLECTIQUE . POETIQUE . POLITIQUE

 

Appel à contribution au numéro 2 de la revue

 

IN EXTREMIS

Une poétique de la modernité

 

Le memorie nel petto raccendi,
Ci favella del tempo che fu!
Temistocle Solera.

 

« In extremis » disent ceux qui parlent d’un moment qui advient à la dernière limite, d’un acte réalisé de justesse, inscrit dans un laps de temps souvent court. In extremis, à la frontière de l’attendu et de l’inattendu, là où, précisément, la linéarité des enchaînements oscille, se désagrège, pivote dans un espace disruptif.

Chacun est libre d’associer à ce terme des situations vécues, la joie d’un but enfin atteint, le franchissement d'une étape cruciale, la révélation d'un instant de grâce, la chronique d'un rendez-vous manqué, le chagrin d’une perte subite, le désastre d'un deuil qu’on espérait voir reconduit de répit en répit.

In extremis, parce que cela sous-entend une lucidité première, une attention appuyée aux signes, une perception de ce qui est probable et de ce qui l’est moins.

In extremis nous plonge ainsi dans l’attente de ce qui est imminent, autrement dit fait de nous de « petits prophètes » sensibles à ce qui va s'écrire, là, dans la marge de la page présente, attentifs aux tours de force, aux coups de théâtre, sans pour autant s'abandonner au carcan d’un « au-delà » avec sa charge d'orthodoxie, de duperies et d’antagonismes.

Dès lors, in extremis est un remède pour échapper à l'emprise d'un destin placé sous la haute surveillance des Comités de Normalisation et des Instituts de Prévision. C'est, du coup, une machine à produire des divagations, des événements "contre-nature", des poches de résistance, des armées irrégulières, des factions désarmantes...

Infatigable défenseur de l'éluctable, des figures libres, du carnaval, de l'ironie du sort, souvent au centre du banal, du quotidien, in extremis rit poliment de nos préjugés, s'amuse de notre difficulté à prédire les turbulences climatiques ou boursières, évoque le rétif, le refuge, l'entredeux, mais aussi la fronde, l'avant garde, la marginalité, en somme un champ des possibles restitué, décalé, où la géométrie de l’esprit s’aventure dans l’oblique du re-temps-tissement.

Oui, de Bethlehem à Ground Zero, de la trêve au cessez-le-feu, nous pouvons affirmer qu'in extremis vaccine contre la fatalité, transforme les masques en visages, se glisse sans préméditation hors du passé, s'infiltre avec un même élan en deçà de l’avenir et nous escorte vers la couleur un peu funambule, un peu jazzy du futur antérieur.

Le philosophe peut faire d'in extremis un poste d'observation de tout premier ordre en restituant toute leur importance aux situations de clivage à travers lesquelles le monde fantasmé se régénère en un monde réel. L'artiste tirera profit à mettre en scène ce formidable regain de vie. L’anthropologue se verra confronté à une course contre la montre : référencer des savoirs (dialectes, langues, rituels…) lorsque les locuteurs vivants sont soumis à un régime d’anéantissement au rythme sidérant. Quant au sociologue, il observera la superposition avec le changement de cap de l'idéal. Ce qui caractérise notre époque, c'est la volonté d'"intriguer l'époque", de faire de la fragilité une place forte, de préférer les dérèglements aux règlements, les souples rhizomes aux racines vigoureuses. Nous avons appris à aimer l’aléa.

C’est du fait de cette « consistance politique », décisive à nos yeux, que nous avons fait de cette locution latine le thème directeur du numéro 2 de notre revue. Finalement, c'est l'impromptu tout entier que l'on souhaite célébrer ici.

 

Calendrier

Date limite de tranmission des propositions : 15 octobre 2014

Date limite de remise des contributions : 15 novembre 2014.

Date de publication : 31 décembre 2014.