Imaginaires de la table : récits, nourriture etmigration
12 mai 2011
Dans le cadre du 79e congrès de l'Acfas
Université de Sherbrooke, Université Bishop's – 9au 13 mai 2011
Conférenciers invités
Mélanie Boucher, Université du Québec àMontréal
Tess Do, The University of Melbourne (à confirmer)
Patrice Loubier, Université du Québec àMontréal
Le colloque Imaginairesde la table, consacré à l'étude des relations entre littérature, art,nourriture et migration, privilégiera à la fois le travail conceptuel et l'analysede corpus. Les propositions de communication devront être envoyées par courrielaux organisateurs (imaginairesdelatable@gmail.com)avant le 24 janvier 2011. Nous demandons aux participants de bien vouloirfournir les informations suivantes :1) le titre de la conférence, 2) unrésumé d'environ 300 mots et 3) une brève notice bio-bibliographique. Lesprésentations retenues par le comité scientifique devront se dérouler enfrançais et ne pas dépasser 20 minutes. Une sélection des conférences serapubliée sous la forme d'un dossier à l'automne 2011 dans la revue électronique Zizanie.
Problématique
À l'époque contemporaine, lesflux migratoires s'intensifient et les problématiques de cohabitationinterculturelle se posent avec acuité dans les métropoles. Au coeur des arts defaire du quotidien et de la culture matérielle, la nourriture constitue pourtout un chacun un objet polysémique qui devient tantôt le support de repèresidentificatoires, tantôt le vecteur d'un séduisant exotisme, tantôt l'incarnationd'une altérité menaçante. En contexte de migration, les pratiques alimentairestémoignent de la reconfiguration des appartenances du sujet mobile et de laperméabilité des frontières entre le soi et l'autre. Si l'incorporation de laculture du pays d'accueil passe souvent par la dimension réconfortante de lacuisine, l'accueil de l'autre en soi peut être difficile et générer unmécanisme de défense et d'incorporation, de même que des manifestationssomatiques. L'absorption de nourriture, nous dit Claude Fischler (Manger magique, 1994), fait jouer desprocessus primitifs où l'incorporation d'un objet implique, sur le planpsychique, de se laisser contaminer par lui. Les opérations mentales à l'oeuvredans l'acceptation ou dans le refus de la nourriture du pays d'accueil sont parconséquent éclairantes quant au processus d'acculturation vécu par le migrant.
De l'exposition itinérante Gold Mountain Restaurant (2006-2008) deKaren Tam au roman Le Mangeur (2006)de Ying Chen, plusieurs créateurs interrogent à l'heure actuelle les liensentre le quotidien, l'identité, la nourriture et les déplacementsgéographiques. Le colloque Imaginaires dela table : récits, nourriture et migration s'intéresse précisément auxreprésentations de la nourriture et des pratiques alimentaires en contexte detraversée des cultures dans les productions littéraires et artistiques depuis1980. Nous estimons que les oeuvres contemporaines qui explorent les relationsentre nourriture et migration constituent un terrain privilégié pour étudierles phénomènes actuels de rencontre (ou de non-rencontre) et d'intériorisation(réussie ou entravée) de l'altérité.
À partir d'un cadre théorique empruntant à lasociologie, à la psychanalyse et aux études culturelles, nous porteronsattention à la mise en récit des pays natal et d'accueil, du corps et de sonintériorité, et examinerons la dynamique de l'incorporation-excorporationreprésentée dans les oeuvres. Les migrants « assimilent » de diversesmanières le monde dans lequel ils doivent s'intégrer. Nous nous intéresseronsau processus d'intériorisation des cultures par l'alimentation, qui devient unréseau de figures où l'aliment fait office de symbole psychique positif ounégatif, que le sujet tente d'assimiler, parfois avec triomphe (Abraham etTorok parlent ici d'introjection, 1978), parfois sans succès (lespsychanalystes qualifient ce phénomène d'incorporation), ce qui donne lieu àdivers troubles somatiques. Dans le corpus étudié, la nourriture pourra êtreenvisagée comme l'instrument d'une transmission (réussie ou entravée) de l'identitéfamiliale et collective entre les générations. On tentera en outre de chercherdes figures de l'exotisme culinaire à la suite de Faustine Régnier (2004). Lanourriture pourra par ailleurs être abordée dans ses aspects dysphorique etprivatif, notamment par l'étude des troubles alimentaires. L'utilisation de lalangue, qu'elle soit maternelle ou seconde, dans un texte questionnant l'oralitésur les plans alimentaire et langagier, pourra également être interrogée defaçon pertinente.
Le colloque Imaginaires de la table se veut un lieu unique de mise en commun d'expertisescomplémentaires pour des chercheurs issus de divers champs de savoir comme lalittérature, l'histoire de l'art, la psychanalyse et la sociologie, quipourront aborder les problématiques de cohabitation interculturelle par lebiais d'un objet chargé sémantiquement : la nourriture.