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H. Morgan, Dictionnaire esthétique et thématique de la bande dessinée :

H. Morgan, Dictionnaire esthétique et thématique de la bande dessinée : "fantasy"

Publié le par Nicolas Geneix

Harry Morgan, Dictionnaire esthétique et thématique de la bande dessinée : "fantasy"

Article paru sur le site "neuvième art 2.0", mai 2016.

"’ambiguïté, pour ne pas dire le caractère précaire, de la catégorie littéraire de la fantasy est bien manifestée dans le fait qu’on ait conservé pour la désigner un terme anglais, qui présente, de surcroît, toutes les apparences d’un faux ami. Sa traduction littérale, fantaisie, a, en français, des connotations de légèreté et de caprice qui sont aux antipodes d’un genre qui donne au contraire la prééminence à la convention assumée et à la cohérence de l’univers fictionnel. Quant au néologisme de fantasie, recommandé par l’Académie et adopté par la commission générale de terminologie et de néologie (JO du 23 décembre 2007), il ne s’est jamais imposé. Par comparaison, les catégories limitrophes – merveilleux, fantastique – ont, elles, des désignations françaises traditionnelles, tandis que l’expression anglophone de science fiction a été francisée par le simple expédient d’un tiret (science-fiction).
Si on la réduit à son noyau thématique, la présence d’un ou plusieurs éléments relevant de mondes imaginaires, on pourrait dire que la fantasy est consubstantielle à la bande dessinée, quand bien même ces éléments trouvent leur source, le cas échéant, dans les littératures écrites. On pense à des personnages longtemps considérés, au moins en France, comme emblématiques de la bande dessinée, comme Tarzan, à des genres comme celui des séries à animaux anthropomorphes (funny animals) ou celui des super-héros, à des procédés habituels dans les récits dessinés (le monde fictionnel fait de bric et de broc et aux lois invraisemblables, l’invention fabuleuse comme ressort narratif), voire à des conventions romanesques, présentes dans des séries qui ne se posent cependant pas comme dérogeant aux lois du monde ordinaire (par exemple le fait que, dans l’univers fictionnel, personne, en réalité, ne travaille). Si l’on annexe au domaine toute série incluant, à l’intérieur du monde naturel, quelque élément relevant du merveilleux, tel que super-pouvoir ou faculté prodigieuse, ou encore animal doué de raison, on englobera de facto une grande partie des littératures dessinées. Astérix, Tintin ou Lucky Luke relèvent alors de la fantasy. Le risque d’une telle approche est évidemment de diluer la notion même de fantasy jusqu’à sa disparition. On constate ainsi que la recherche à partir du mot clé fantasy sur des catalogues en ligne de manga renvoie à une grande partie de la production, car des éléments tels que les pouvoirs magiques, les êtres fabuleux, le recours à l’allégorie, font partie des invariants de cette littérature. (...)

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