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Grotesque et spatialité au théâtre

Grotesque et spatialité au théâtre

Publié le par Alexandre Gefen (Source : Florent Gabaude)

Appel à communication :

Colloque « Grotesque et spatialité au théâtre »
Faculté des Lettres et Sciences humaines de l'Université de Limoges, du 1er au 3 février 2007

Le grotesque est une catégorie spatiale qui, transférée dans le champ littéraire, conserve l'iconicité de ses origines. Quant au théâtre, « peinture vivante » et « art de l'espace », c'est un lieu d'expression privilégié de ce mode de figuration et d'écriture. La parenté du grotesque et du théâtre est déjà manifeste lorsque les imagiers du premier XVIIe siècle croquent dans des « caprices » les personnages-types de la commedia dell'arte.
L'objet du colloque sera d'appréhender les manifestations du grotesque dans la production théâtrale s'étendant de la première modernité au postmodernisme, à la fois topologiquement, en termes de relations spatiales entre centre et périphérie, et typologiquement, dans la compénétration entre arts du visuel et de l'écrit.
Du point de vue topologique, le grotesque peut se définir comme l'art de la bordure ou de la marge (cf. E. Rosen), celle de l'estampe ou du livre, du spectacle, de la cité ou encore du territoire, voire de la nature : il s'épanouit en arabesques autour des motifs représentés ou du corps du texte, dans les intermèdes baroques, sur les tréteaux des faubourgs où il jouit d'un « droit d'exterritorialité » (M. Bakhtine) ou aux marches de l'espace danubien-habsbourgeois avec ses « littératures mineures ». Métaphoriquement, il peuple les marginalia des grands auteurs et figure l'excentricité et le monstrueux au-delà des bornes du représentable.
Pour autant, le grotesque ne laisse pas de faire retour au centre qu'il éclaire comme contrepoint repoussant, facétieux ou dénonciateur, voire comme contre-culture affichée. La spatialité du phénomène peut ainsi être envisagée dans son dynamisme, à l'aide de métaphores comme l'oscillation, la déterritorialisation (de la scène, des genres théâtraux), le débordement (débordements corporels ou scéniques, ruptures d'illusion). On pourra s'interroger sur les avatars historiques de la décarnavalisation du grotesque théâtral, de sa marginalisation et de son bannissement à sa réhabilitation et à son recentrage jusqu'à son omniprésence contemporaine. Du point de vue synchronique de la réception, le grotesque se caractérise par le décentrement scopique, l'oscillation du regard entre le centre ou la globalité de l'oeuvre et les marges foisonnantes ou le détail dissonant qui focalisent l'attention. Le grotesque peut être reflet d'un sentiment de l'absurde, d'une angoisse existentielle et déboucher sur une critique de l'ordre établi. Il sert de masque. C'est un moyen détourné, utilisé par le fou du roi pour exprimer une autre vérité.
Au reste, la mobilité n'est-elle pas consubstantielle à la notion même de grotesque, comme en témoignent ses théorisations successives depuis la fin du XVIIIe siècle qui vont des considérations esthétiques fondées sur la relation du grotesque à la mimesis (le grotesque est-il un art réaliste, un art de la combinatoire ou le produit de l'imaginaire de l'artiste comme idea ou sogni dei pittori ?) aux approches ontologiques d'un grotesque envers de Dieu et de l'idéal ou analogon de la réalité ? Faut-il voir dans le grotesque un travelling concept regroupant des phénomènes dont le tertium comparationis semble être l'indétermination principielle : indétermination ou suspension délibérée du sens, indécidabilité de l'effet produit, indiscernabilité générique ? On pourra notamment s'interroger sur les questions de la généricité (le grotesque est-il un genre, un style, une structure esthétique, …?) et de la « comicité » (G. Genette) du grotesque – comme comique bas, comique monstrueux, « comique de l'ombre » ou « comique absolu », voire comme échappant au comique (W. Kayser, D. Iehl). Genre hybride et protéiforme à la lisière entre le rire et l'épouvante, entre le réalisme et le fantastique, il utilise tout une palette de procédés, tels l'inadéquation, le décalage, la trivialisation, l'exagération ou la simplification. Pourrait-on abstraire les principes structurels d'une « rhétorique du grotesque » qui permette de décrire les phénomènes allant du mundus inversus au « monde aliéné » cher à Wolfgang Kayser – une rhétorique empruntée aussi bien à la conception tératologique classique de l'écart qu'à la vision photographique moderne des textes et dans les textes (cf. R. Barthes) ?
Car les origines picturales ambivalentes du grotesque placent le rapport texte/image nécessairement au centre de toute réflexion conceptuelle comme de toute analyse par l'exemple. Et l'interférence des genres participe du « brouillage » qui caractérise cette notion. Aussi les contributions porteront-elles sur des corpora dramaturgiques mais également sur la contiguïté intermédiale en croisant les textes et l'iconographie (feuilles volantes, frontispices et gravures de théâtre, illustrations et photographies d'auteur) ou encore la scénographie et le film.

Aline Le Berre, E.A. 1087 « Espaces Humains et Interactions Culturelles », Université de Limoges, Université de Limoges
Florent Gabaude, E.A. 1087 « Espaces Humains et Interactions Culturelles », Université de Limoges
Philippe Wellnitz, E.A. 1971 « Etudes germaniques et centre-européennes », Université de Montpellier

Les propositions de communication (titre, résumé d'une page maximum, bibliographie indicative, bio-bibliographie) doivent parvenir pour le 1er septembre 2006 au plus tard par courrier électronique à l'une des adresses suivantes :
aline.leberre@wanadoo.fr ; florent.gabaude@wanadoo.fr ; wellnitz@libertysurf.fr.
Le pré-programme sera communiqué aux intervenants courant septembre. Un droit d'inscription forfaitaire de 20 euros sera demandé à l'inscription définitive. Hébergement des participants pris en charge et remboursement des frais de déplacement sur la base du billet SNCF 2ème classe.