Édition
Nouvelle parution
G. Orwell, Œuvres (Biblioth. de la Pléiade)

G. Orwell, Œuvres (Biblioth. de la Pléiade)

Publié le par Université de Lausanne

GEORGE ORWELL

Œuvres

Trad. de l'anglais par Véronique Béghain, Marc Chénetier, Philippe Jaworski et Patrice Repusseau.

Édition de Philippe Jaworski avec la collaboration de Véronique Béghain, Marc Chénetier et Patrice Repusseau

Collection Bibliothèque de la Pléiade (n° 651), Gallimard

Parution : 08-10-2020

1664 p. — ISBN : 9782072748271

CE VOLUME CONTIENT:

Dans la dèche à Paris et à Londres - En Birmanie - Wigan Pier au bout du chemin - Hommage à la Catalogne - La ferme des animaux - Mil neuf cent quatre-vingt-quatre - Croquis et essais (1931-1948).

 

Ils ne sont pas légion, les écrivains auteurs d’un livre devenu plus célèbre qu’eux, si célèbre, à vrai dire, qu’il rayonne bien au-delà du cercle de ses lecteurs et touche des personnes qui, sans jamais l’avoir ouvert, en connaissent la trame et en utilisent les mots-clefs. De ce club fermé d’écrivains George Orwell est, aux côtés de Swift (qu’il a lu de près), un membre éminent. Le regard porté sur son œuvre en a été profondément modifié. Ses deux derniers romans, La Ferme des animaux et plus encore Mil neuf cent quatre-vingt-quatre, ont en quelque sorte requalifié ses écrits antérieurs, hissant leur auteur au rang de classique anglais du XXe siècle, sans pour autant mettre fi n aux débats: l’éventail des jugements portés sur Orwell demeure grand ouvert, et il va du dédain à l’idolâtrie.

Sans tomber dans aucune de ces extrémités, il faut reconnaître la cohérence de l’œuvre, tout entière fondée sur une ambition : « faire de l’écriture politique un art véritable ». « Un homme à la colère généreuse », « une intelligence libre », « le genre que haïssent également toutes les orthodoxies malodorantes qui s’affrontent aujourd’hui pour la possession de nos âmes » : ces traits empruntés à son portrait de Dickens dessinent l’autoportrait d’Orwell. Dans ses articles, ses essais, ses récits-reportages, ses romans mêmes, celui-ci fait partager ses convictions et ses refus. Ses écrits se nourrissent de ses engagements personnels, de sa démission d’un poste de fonctionnaire de la Police impériale des Indes (En Birmanie), de son intérêt pour la condition des indigents des deux côtés de la Manche (Dans la dèche à Paris et à Londres) ou pour le sort des mineurs du Yorkshire (Wigan Pier au bout du chemin), de son séjour dans l’Espagne en guerre (Hommage à la Catalogne) et de sa guérilla incessante contre les mensonges et les crimes staliniens. Mais ce sont donc ses deux derniers romans qui ont fait sa gloire ; l’allégorie animalière et la dystopie déguisée en farce tragique forment une sorte de diptyque dont la cible est la barbarie du totalitarisme.

Il reste que Mil neuf cent quatre-vingt-quatre occupe une place à part parmi les dystopies, si tant est que le livre ait réellement à voir avec ce genre. C’est que la puissance des scènes et des images inventées par Orwell demeure sans égale, qu’il s’agisse de l’affiche géante du Grand Frère, de l’oeil toujours ouvert du télécran, des minutes de Haine, et surtout, et avant toute chose, de cette langue, le néoparle (newspeak), créée pour éradiquer les pensées « hérétiques », autant dire toute pensée. Elle est véritablement au cœur du roman, et au centre des enjeux de sa traduction française. Comme tous les textes inscrits au sommaire de ce volume, Mil neuf cent quatre-vingt-quatre est proposé ici dans une nouvelle version, fidèle au style à la fois vif et rugueux de son auteur. L’ensemble, tous genres confondus, se lit comme l’almanach d’un quart de siècle de bruit et de fureur rédigé par un écrivain qui a toujours considéré qu’il n’existe pas de réalité sans observateur.

Voir le livre sur le site de l'éditeur…

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On peut lire sur en-attendant-nadeau.fr un article sur cet ouvrage :

"Éric Blair, alias George Orwell", par Marc Porée (en ligne le 21 octobre 2020).

Un Orwell à hauteur d’homme, avec ses forces – son exigence de justice, son ardente obligation de solidarité avec les opprimés de tout poil – et ses faiblesses – virilisme, androcentrisme, homophobie. De quoi écorner, sans rien du monde la brouiller, l’image du « modelle commun et humain » (Montaigne), d’emblée convoquée par Philippe Jaworski, responsable d’une édition qui, elle aussi, est un modèle du genre. Cette très cohérente Pléiade fera date, à n’en pas douter, entre autres parce que, pour la toute première fois, le signifiant maître qu’est Big Brother est traduit : place, enfin, au « Grand Frère ».