Essai
Nouvelle parution
G. Bataille, La Structure psychologique du fascisme

G. Bataille, La Structure psychologique du fascisme

Publié le par Arnauld Welfringer

Georges Bataille, La Structure psychologique du fascisme

Présentation par Michel Surya

Editions Lignes, 2009

64 pages

11 €

ISBN : 978-2-35526-034-6

Première publication séparée de l'article paru en 1933 dans La Critique sociale.Georges Bataille décrit le caractère inéluctable de la guerre à venir,en faisant usage de la sociologie durkheimienne (touchant au« sacré »), de la phénoménologie allemande et de la psychanalysefreudienne. Texte suivi d'une analyse de Michel Surya.

Intention généraleLes Éditions Lignes ont décidé de donner à lire séparément, sous formede livres constitués comme tels, avec introduction, appareil critiqueet commentaires, plusieurs grands et courts textes de Bataille  ; entreautres  : «  La structure psychologique du fascisme  », «  La Notion dedépense  », «  La conférence sur le péché  », etc. D'en faire de petitslivres à parts entières. Ce n'étaient pas des livres, en effet, etpourtant ils ont l'importance des plus importants des livres de GeorgesBataille. Ce n'étaient pas des livres, tout au plus des articles, queleur auteur lui-même n'a jamais repris dans aucun de ceux qu'ilconstituera plus tard  ; que les Oeuvres Complètes(12 volumes aux Éditions Gallimard) seules ont repris, après sa mort,lesquelles, il faut bien l'avouer, en réduisent considérablement laportée, quand elles ne l'étouffent pas  ; au moins  : où ne lesretrouvent pas nécessairement ceux qui auraient pourtant le plus grandbesoin de les lire (de là qu'ils soient souvent cités de seconde mainet que ce qu'ils ont d'essentiel échappe à ces citations désinvoltes).«  La structure psychologique du fascisme  » compte parmi ceux-là, auplus haut point

« La Structure psychologique du fascisme »L'époque, le contexte  : nous sommes début 1933  ; Boris Souvarine aréuni autour de lui les premiers des «  communistes oppositionnels  »(antistaliniens), auxquels se joignent des «  surréalistesdissidents  »  : ce sera la revue La Critique sociale, où paraît « Lastructure psychologique du fascisme » en 1933. Les analyses deSouvarine joueront un rôle considérable  : elles seront les premières àfaire la lumière sur le totalitarisme soviétique naissant  ; Bataille ysouscrit pleinement  ; mais il faut, aux uns et aux autres, faire lapart de l'analyse qui revient à l'autre totalitarisme, au totalitarismeconcurrent, le totalitarisme fasciste. Bataille n'est pas le seul à s'yemployer, mais il le fait d'une façon qui ne ressemble à aucune autre.Qui, non seulement inaugure la possibilité d'une théorisation qui feradate (il n'y a guère que Wilhem Reich à entreprendre la même chose aumême moment, mais sans que l'un ni l'autre n'en sache rien)  ; maisqui, en outre, demeure d'une vitalité et d'une validité exemplairesaujourd'hui.De cet article, un livre devait naître, auquel Bataille a beaucouptravaillé  ; son titre  : «  Le Fascisme en France  ». Des problèmespersonnels (une «  grave crise  », comme il le dit lui-même),s'ajoutant à l'accélération de l'histoire, ne permettront pas qu'il lemène à bien. De ce livre, qui eût sans doute aucun été essentiel, nerestent que cet article fondateur, qui l'est lui-même  ; et, d'unecertaine façon, si insolite que cela paraisse, ou peu courant (commentun «  roman  » pourrait-il résulter de plein droit d'un«  essai  »  ?), Le Bleu du ciel,achevé en 1935 (et publié en 1957 seulement), le roman des annéestrente où se lit le mieux ce qu'a dès lors la guerre d'inéluctable.

L'analyseEn quoi l'analyse de Bataille se distingue-t-elle  ? En ceciessentiellement, que Bataille use de tous les moyens disponibles pour«  penser  » (et non pas plaindre, reprocher, «  moraliser  ») lefascisme. Tous les moyens  : ceux de la sociologie durkheimienne(touchant au «  sacré  », que Bataille appelle pour sa partl'hétérogène)  ; ceux de la phénoménologie allemande  ; ceux de lapsychanalyse freudienne, enfin. C'est nouveau. Il ne faut pas moinsqu'eux, selon lui, pour comprendre et interpréter comment se forme unesuperstructure, qu'elle soit sociale, religieuse ou politique. Sonanalyse se distingue en cela déjà qu'elle pose qu'une superstructurepeut être de constitution psychologique (ce que le marxisme n'a pas suvoir). «  Lire  » le fascisme comme un phénomène politiquesupplémentaire, c'est ne pas voir de quoi il naît, de l'hétérogène(ainsi que Bataille l'appelle  ; en quelque sorte, le «  sacré  » ainsique Durkheim l'appelait) et de l'inconscient (au sens strictementfreudien)  ; et comment il s'alimente de cette provenance violente.Violence que le fascisme n'a plus, dès lors, qu'à concentrer au profitde sa toute-puissance fatidique.