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Francofonia, n° 67, 2014 :

Francofonia, n° 67, 2014 : "Poésie et institutions au XIXe siècle"

Publié le par Cécilia Galindo (Source : Rivista Francofonia)

Référence bibliographique : Francofonia, Casa Editrice Leo S. Olschki, 2015.

 

Francofonia, n° 67, 2014 : "Poésie et institutions au XIXe siècle"

 

sous la direction d'André Guyaux et Romain Jalabert

ISSN 1121-953X

Prix 40EUR

 

Sommaire

 

Romain Jalabert, Introduction

Jean-Baptiste Amadieu, Verlaine et Rimbaud examinés par le Saint-Office 

Jugées par Rome dangereuses pour l’esprit et le cœur, les œuvres de Verlaine et de Rimbaud n’ont pourtant pas été condamnées. En 1917, le Saint-Office engage en effet une procédure relative aux écrivains du « Renouveau catholique », mais aussi à leurs modèles. Les éloges prodigués par Bloy et Claudel aux deux poètes risquent de les recommander auprès des fidèles. Ils sont donc examinés à ce titre : l’œuvre de Rimbaud, dont la Congrégation relève les blasphèmes et les obscénités, ne justifie pas les interprétations spirituelles prêtées aux passages obscurs. Quant à Verlaine, l’érotisme de compositions postérieures à Sagesse laisse perplexe sur sa conversion. Les consulteurs se divisent cependant sur une éventuelle mise à l’Index ; l’idée d’un texte doctrinal à portée générale, finalement retenue, aboutit à l’instruction de mai 1927 sur la littérature « mystico-sensuelle », mais sans indice clair permettant d’identifier un mouvement ou des auteurs.

 

Olivier Bivort, Verlaine à l’académie française

En dépit des apparences, Verlaine se présente officiellement à l’Académie française en 1893. Si les raisons de sa candidature sont multiples – Verlaine n’est pas insensible aux honneurs –, il semble que ce soit la presse, et notamment une enquête lancée par Le Journal, en octobre 1892, qui l’ait poussé à se présenter. Son initiative suscite de nombreuses réactions dans les journaux. Verlaine lui-même, dans ses interviews et par ses propres articles, contribue pendant près de deux ans à retenir l’attention des médias. Le dossier de presse de sa candidature, réuni ici pour la première fois, en illustre les tenants et aboutissants.

 

Anne-Emmanuelle Demartini, Les plaidoiries en vers au XIXe siècle

Au XIXe siècle, il est arrivé que des justiciables, au tribunal, se défendent devant les magistrats en prononçant un discours en vers. Ces défenses en vers, rares mais attestées, n’ont encore jamais été étudiées. Cet article propose quelques éléments d’analyse, susceptibles d’éclairer les rapports, au demeurant méconnus, entre la poésie et l’institution judiciaire au XIXe siècle. Il expose les incidents d’audience que ces curieuses défenses ont occasionnés et ainsi que la réaction des magistrats, significative de la représentation qu’ils se font à la fois de la poésie et de la justice. Tantôt ils autorisent le discours en vers, tantôt ils l’interdisent. A-t-on le droit de plaider en vers dans un tribunal ? Le débat auquel donne lieu les défenses rimées pose la question des espaces de l’usage du vers et mettent en jeu une conception de la langue judiciaire.

 

Corinne Legoy, Poésie et fêtes de souveraineté sous la Restauration : une fille de l'État monarchique ?

Explorer les liens entre la poésie d’éloge et les institutions qui orchestrent les fêtes de souveraineté sous la Restauration, tel est le propos de cet article. Il montre l’insertion de la poésie et de la chanson dans les cérémonies du pouvoir et corrélativement la persistance d’une pratique ancienne liée aux institutions d’État et à l’institution académique. Le desserrement du contrôle de l’État sur l’imprimé, l’absence de commande explicite et la réactivité singulière de l’éloge à la temporalité rituelle de la monarchie mettent en question cette lecture classique. Les institutions qui la suscitent excèdent largement les rouages de l’État et les cercles académiques, contribuant, en ce premier XIXe siècle, à écrire une nouvelle page de l’histoire de l’éloge royal.

 

Muriel Louâpre, Les lauréats académiques : de l’émulation à la « bête à concours »

Au XIXe siècle, le concours a envahi l’espace public, s’imposant comme mode de recrutement démocratique et moyen de gouvernement par les honneurs. Or les concours académiques au XIXe siècle contrastent avec ceux du XVIIIe siècle où ils avaient constitué une pièce maîtresse du projet intellectuel des Lumières, par la transformation de l’émulation dans un sens de plus en plus normatif. Cette normativité croissante, lisible dans les copies de candidats au prix de poésie de l’Académie française, lettres d’envoi, rapports de jury, est un phénomène dont la portée dépasse la sphère littéraire, de sorte que s’opère une convergence de la critique des concours dans divers domaines d’activité - les lettres, l’enseignement et l’agriculture, convergence qui sous-tend la scène des comices chez Flaubert, et se publicise avec des métaphores à succès comme celle de « bête à concours ».

 

Hugues Marchal, ”Les sciences peuvent avoir quelques obligations à la poésie” : Delille et l’institution savante

La poésie scientifique qui connut une vive vogue de la fin des Lumières au Premier Empire peut être définie comme une tentative de fusion entre lettres et sciences. Mais Les Trois Règnes de la nature de Jacques Delille (1808) ont aussi impliqué directement des savants comme Cuvier, qui ont participé à la genèse et à l’annotation des vers. Comment interpréter cette collaboration, au regard des stratégies de distinction de sociétés savantes telles que le Collège de France et l’Institut, où Delille et Cuvier se côtoyaient ? On tente ici d’apporter des éléments de réponse, en prenant pour point de mire les fonctions dévolues aux lectures orales de Delille lors des séances publiques de ces institutions.

 

Jean-Yves Mollier,  La poésie sous surveillance au XIXe siècle

Genre noble par excellence, qui contribue grandement au sacre de l’écrivain et à l’avènement d’un pouvoir spirituel laïque au XIXe siècle, la poésie est aussi le domaine d’investissement des classes populaires, qui voient dans la chanson le vecteur idéal de leurs revendications ou de leurs états d’âme. Surveillée, traquée par la police qui craint son pouvoir subversif, de Béranger à Jean-Baptiste Clément et à Montehus, la chanson en vers a fait l’objet d’une censure impitoyable de 1810 à 1905, ce qui ne l’a pas empêché de croître et de pénétrer dans tous les foyers. Alors même qu’elle perd la place privilégiée qu’elle occupait dans les catalogues d’éditeurs après 1848, elle continue son expansion grâce au compte d’auteur et touche aussi bien les élites parisiennes ou provinciales que la population la moins éduquée. Omniprésente à l’école, chantée sur les voies publiques ou dans les cafés, les cabarets et les music-halls, elle constitue un gigantesque océan de textes qu’il conviendrait d’étudier à l’abri de tout préjugé esthétique.

 

Luciano Pellegrini, Mystère et magistère. Victor Hugo académicien

L’élection de Victor Hugo à l’Académie française est le résultat d’une longue campagne qui a exposé le poète à plusieurs échecs. Son obstination témoigne de l’importance que l’auteur de la Préface de Cromwell attribuait à la consécration académique. Les rapports de Hugo avec l’Académie permettent de comprendre comment s’articulent poésie et pouvoir dans son œuvre. Les ambitions académiques du poète se traduisent, dans ses recueils, par l’apparition de la thématique d’un passé classique, antique ou tourné vers le XVIIe siècle.

 

Lise Sabourin, Poètes et poésie à l’Académie française au XIXe siècle (1803-1914)

Au fil des régimes du XIXe siècle, les élections et les activités de poètes à l’Académie française manifestent encore leur influence, mais les attentes formelles classiques dont réussissent à triompher les romantiques provoquent quelque méfiance envers la génération des Parnassiens, tardivement entrés. Abandonnant ses coutumes de salon lettré avide de lectures poétiques, l’institution, plus professorale, s’adonne surtout à la défense de la langue française, à l’étude des langues régionales, à la traduction et à l’analyse des poésies antiques ou étrangères, à la célébration des grands noms de l’histoire littéraire. Elle se soucie pourtant de couronner des recueils poétiques, mais le concours de poésie hérité des siècles monarchiques passe progressivement de mode, tantôt usé par la prégnance du pouvoir, tantôt dévalué par des lauréats récurrents. Les plus talentueux deviennent académiciens, les autres sont perçus comme instruments d’une politique d’alternance, voulue éclectique, mais peu cohérente, entre sujets d’actualité, thèmes classiques, découvertes scientifiques.  

 

Andrea Schellino, Baudelaire et l’« utopie » académique 

Le présent article étudie les étapes de la candidature de Baudelaire à l’Académie française entre décembre 1861 et février 1862. Après avoir abordé les raisons de la démarche du poète, il met en lumière l’enjeu politique des élections à travers l’analyse de l’article de Sainte-Beuve « Des prochaines élections de l’Académie », publié le 20 janvier 1862 dans Le Constitutionnel. L’auteur, présentant la note de désistement de Baudelaire parue dans Le Siècle le lundi 17 février 1862, propose aussi une datation plus précise de la lettre du poète à Taxile Delord.

 

Recensioni/Comptes-rendus

D. Bengsch, C. Ruhe (dir.), Une femme puissante. L’œuvre de Marie NDiaye (M. Bokobza Kahan)

D. Buschinger, Tristan allemand (G. Brunetti)

Pubblicazioni ricevute e schede

(La revue Francofonia est disponible sur la plateforme JStor : http://www.jstor.org/action/showPublication?journalCode=francofonia)