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Figures du non-savoir dans la littérature française moderne

Figures du non-savoir dans la littérature française moderne

Publié le par Vincent Ferré (Source : Muriel Pic)


Colloque international

« Les figures du non-savoir
dans la littérature française moderne »

Université de Neuchâtel
4-6 juin 2009
Auditorium du Musée d'histoire naturelle

Comité d'organisation : Muriel Pic, Barbara Selmeci Castioni et Jean-Pierre van Elslande




Jeudi après-midi

13H30-13H40    Accueil du décanat

13H40-14H00    Introduction par MURIEL PIC et BARBARA SELMECI CASTIONI

14H00-14H40  Conférence inaugurale de JACQUES LE BRUN (EPHE)
« Le non-savoir de la négation »

DISCUSSION ET PAUSE

NON-SAVOIR ET IMAGES
Présidente de séance : Myriam Watthee-Delmotte
(Université de Louvain-la-Neuve / FNRS Belgique)

15H20-15H50    PIERRE-ANTOINE FABRE (EHESS)
« Que nous apprennent les gravures dans l'oeuvre de Louis Richeome ? »

DISCUSSION

16H00-16H30    NATHALIE VUILLEMIN (Université de Neuchâtel)
« Le ‘non-savoir' comme stratégie descriptive du récit de voyage chez les savants naturalistes de la fin du XVIIIe siècle »

16H30-17H00    CAROLINE ROSSET (Université de Neuchâtel)
« Chateaubriand voyageur : des images contre la science »

DISCUSSION FINALE

Jeudi soir

Conférence publique de GEORGES DIDI-HUBERMAN (EHESS)
« Guerre, expérience, non-savoir et image »
19H00 - Auditorium du Musée d'histoire naturelle


Vendredi matin

NON-SAVOIR ET INSTITUTIONS
Président de séance : Daniel Sangsue (Université de Neuchâtel)

9H00-9H30     FRANÇOIS FRICHE (Université de Neuchâtel)
« Représentations du savoir religieux dans l'Histoire comique de Francion (1623/1633) et le Gascon extravagant (1637) »    

9H30-10H00    JEAN-PIERRE VAN ELSLANDE (Université de Neuchâtel)
« Le non-savoir autorisé: la pédagogie renversante des contes en prose de Charles Perrault »
DISCUSSION ET PAUSE

10H40-11H10 FRANÇOIS TREMOLIERES (Université Paris-X)
« Ce que je crois »

11H10-11H40    MYRIAM WATTHEE-DELMOTTE (Université de Louvain-La-Neuve / FNRS Belgique)
« Henry Bauchau : en refus d'héritage, une poétique du non-savoir »

DISCUSSION FINALE

12H00-14H00 PAUSE DÉJEUNER

Vendredi après-midi :

NON-SAVOIR ET CONNAISSANCE
Président de séance : Yves Hersant (EHESS)

14H00-14H30    BARBARA SELMECI CASTIONI (FNS / Université de Neuchâtel)
« De la science des saints à l'humain savoir. Littérature et hagiographie au XVIIe siècle »

14H30- 15H00    VIRGINIE PASCHE (FNS / Université de Neuchâtel)
« Illettrés et sauvageons dans quelques contes et romans du XVIIIe siècle : des grains de sable dans la mécanique littéraire »

DISCUSSION ET PAUSE

15H40-16H10    LAURENCE DAHAN-GAÏDA (Université de Franche-Comté)
« Seuils critiques : M. Teste revisité par Botho Strauss »

16H10-16H40    CHRISTINE RAMAT (Figura)
« Le non-savoir dans le théâtre de Valère Novarina ou le gai savoir de rien »

DISCUSSION FINALE

Vendredi soir

VALERE NOVARINA, L'ENVERS DE L'ESPRIT
Lectures par Roséliane Goldstein et Valère Novarina
19H00 – Théâtre de la Maison du Concert
Samedi matin

NON-SAVOIR ET LANGAGE
Présidente de séance : Claire Jaquier (Université de Neuchâtel)

9H40-10H10     YVES HERSANT (EHESS)
« Deux regards enfantins. Georges Darien et Henry James »

DISCUSSION ET PAUSE

10H40-11H10    JEROME THELOT (Université Lyon-III)
« Poésie et savoir »

11H10-11H40    MURIEL PIC (Université de Neuchâtel)
« À l'épreuve du non-savoir : silence et émotion »

DISCUSSION FINALE

12H00-13H30 PAUSE DEJEUNER

Samedi après-midi

NON-SAVOIR ET EXPERIENCE
Président de séance : Jacques Le Brun (EPHE)

13H30-14H00    SOPHIE HOUDARD (Université Paris-III)
« Le savoir des fous : expérience et écriture du corps et de l'âme dans quelques collections médicales du XIXe siècle »

14H00-14H30    ANOUCK CAPE  (Université Paris-X)
« Quand le savoir des uns est l'ignorance des autres »

DISCUSSION ET PAUSE

15H10-15H40    ADRIEN PASCHOUD (FNS)
« Jean-Joseph Surin ou l'épreuve du dessaisissement de soi »

15H40-16H10    VALÉRIE MICHELET JACQUOD (FNS / Freie Universität, Berlin)
« D'‘Hadaly' à la ‘petite secousse': l'intuition faite femme dans quelques romans fin-de-siècle »
DISCUSSION FINALE

16H40-17H00    Conclusion par JEAN-PIERRE VAN ELSLANDE

Descriptif du projet

Le savoir du fou, de l'enfant, de l'idiot, du mystique, de la femme, du sauvage, du mendiant, du revenant, etc. est appréhendé comme « invisible », « interdit » ou « absolu » (Foucault). Situé aux marges de la société et au coeur de l'ignorance scientifique, il se fonde sur l'expérience d'un sujet et relève d'un mode de connaissance différent qui fait, notamment, la part belle au sensible. Indissociables de ce qu'elles nient, les figures du non-savoir traversent des récits littéraires, qui narrent leur accès à la visibilité. Autant de savoirs pluriels, dont les postures vis-à-vis du savoir dominant varient selon les époques. Traités comme des « fictions », voir même « refoulés » (De Certeau), ou loués pour leur vertu, ils reconfigurent, par leurs modes d'apparition et leur régime de survivance, l'espace de la connaissance.
    Comment l'expérience du non-savoir survit-elle dans des sociétés qui suspectent ses figures et les marginalisent ? De quelle manière la littérature participe-t-elle à la transmission de ce non-savoir ? Dans quelle mesure offre-t-elle aux figures du non-savoir un espace privilégié d'expression et de légitimité ?
    Réunissant des spécialistes de la littérature d'expression française du XVIe au XXIe siècle, ce colloque propose d'interroger et de définir la notion de non-savoir à travers les figures qui s'y rapportent et de mesurer pour chaque période donnée les singularités du rapport entre savoir et non-savoir, raison et expérience sensible. Il postule la littérature comme lieu privilégié de manifestation de ces figures qui, loin d'être enfermées dans une série de système binaire (raison versus folie, légitimité versus marginalité, etc.) ne cessent de multiplier les points de vue sur ce qu'est la connaissance et sur les tensions dont elle ressort. Si les figures en question ont déjà fait l'objet d'études spécifiques et de travaux monographiques, elles n'ont cependant jamais été envisagées sous l'angle du non-savoir. En proposant de les analyser dans le cadre de poétiques singulières et à des époques différentes, ce projet vise également à repenser le statut du littéraire dans le champ social et cognitif. L'approche ne vise donc pas à faire l'inventaire de ces figures, mais à dégager quatre grands axes qui permettraient de définir les modalités d'élaboration et les manifestations du non-savoir dans la littérature.


1)    Non-savoir et corps
Lieu par excellence d'une expérience qui échappe à la raison et à l'objectivité, le corps est le medium privilégié du non-savoir. Dans la littérature religieuse et médicale notamment, il s'offre comme l'espace de lisibilité d'une connaissance qui, entre excès et ascèse, se manifeste selon des modalités corporelles contraires : si au rire du fou répond le mutisme de l'idiot, à la crise d'hystérie répond l'évanouissement de l'extase.

2)    Non-savoir et langage
Tenancier du savoir, de son apprentissage et garant de sa transmission, le langage est premier dans l'éducation et les pratiques sociales : qui en est exclu ne peut prétendre avoir accès à la connaissance. Pourtant, comme le montre la fascination littéraire pour le mythe du bon sauvage ou le monde de l'enfance, celui qui ne possède pas l'usage du langage (infans), peut incarner une altérité détentrice d'un savoir séminal.

3)    Non-savoir et institutions
S'il est un ordre du savoir que régissent des institutions spécifiques (religieuse, médicale, scientifique, etc.), les figures du non-savoir en déterminent négativement les limites. Il fut une époque où il n'y avait pas de roi sans fou. Ces figures exhibent donc une césure entre la signification et la connaissance, donnent des indications pour se perdre et font entrer le désordre dans l'existence dont elles invitent à repenser les fondements. Inscrites dans la logique du principe de négation, elles deviennent des repères pour les institutions qui se construisent dans le geste même d'un refoulement constitutif de la norme.

4)    Non-savoir et image
« Bible des illettrés », béquille de l'analphabète, l'image entretient avec le savoir des rapports aussi conflictuels que féconds. Auprès des figures du non-savoir, l'image a pour rôle d'être un support privilégié de leur rapport au monde ainsi qu'un mode d'expression et de représentation de leur expérience. Par ailleurs l'image est, du simulacre au fantôme, du dessin à la métaphore, ce qui permet de dépasser les apparences et d'accéder à un au-delà du savoir. Depuis son non-savoir verbal, l'image détermine un nouveau mode de perception et d'apprentissage de la connaissance.


    La participation du non-savoir à la définition de la connaissance comme à son exercice sera donc ici interrogée depuis le littéraire, et dans une perspective interdisciplinaire. Si les figures du non-savoir ne cessent d'actualiser leur subjectivité dans une périlleuse ignorance d'elles-mêmes (comme l'écrit Bataille, le « non-savoir dénude »), elles permettent de mesurer le rôle de la littérature dans la transmission des savoirs et son envergure critique à l'endroit des systèmes cognitifs dominants. Les figures du non-savoir engagent alors à une réflexion sur le littéraire comme lieu d'une politique du sensible qui varie selon les époques.