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Appels à contributions
Fictions d'histoire littéraire

Fictions d'histoire littéraire

Publié le par Vincent Debaene (Source : Jean-Louis Jeannelle)

Journées d'étude dans le cadre de l'ACI « L'histoire littéraire des écrivains » (sous la direction d'Antoine Compagnon)

 

1-2 février 2007

 

organisées par Jean-Louis Jeannelle, Université Paris IV-Sorbonne

 

Par « fictions d'histoire littéraire », nous désignerons tout récit fictionnel bref, offrant une représentation spéculative de l'histoire littéraire, à la manière de certaines nouvelles de Borges (« Pierre Ménard, auteur du Quichotte » en serait le prototype) ou plus directement encore du Voyage d'hiver, où Georges Perec raconte l'histoire d'un jeune chercheur en littérature, Vincent Degraël, découvrant par hasard un texte truffé de citations extraites de la plupart des grandes oeuvres de la fin du xixe siècle et s'apercevant, au cours de sa lecture, que ce volume d'un certain Hugo Vernier a, en réalité, été publié en 1864… Découverte qui bouleverse les repères historiques les mieux établis et à laquelle Vincent Degraël consacre alors le reste de son existence, s'évertuant à reconstituer l'histoire de ce texte dont il a toutefois lu, un soir d'août 1939, l'unique exemplaire disponible, détruit par malheur durant la guerre.

Il s'agira d'explorer la logique qui gouverne ces petits textes, considérés à la fois comme autant d'unités autonomes et réinscrits dans un contexte historique et intellectuel plus large, notamment afin d'examiner les rapports qu'ils entretiennent avec l'histoire littéraire savante telle qu'elle s'écrit à leur époque. La fiction apparaîtra ainsi comme un détour offrant certaines ressources propres à compenser l'absence de rigueur historique ou méthodologique à laquelle sont d'ordinaire astreints les spécialistes de la littérature.

Les textes qui seront présentés au cours de cette journée d'études ne sont, bien entendu, pas les seules formes de mise en fiction de l'histoire littéraire : les tableaux imaginaires de la vie littéraire (comme Les Illusions perdues de Balzac) et les romans à clefs (Les Faux-Monnayeurs de Gide ou Les Mandarins de Beauvoir, auxquels Les Samouraïs de Julia Kristeva doivent tant), présentent un intérêt plus évident pour les spécialistes de tel ou tel courant littéraire. Ces derniers y puisent des informations que de simples spéculations comme celles qui nous intéressent ici n'offrent pas à première lecture. Reste que ces dernières fournissent, qu'il s'agisse du Voyage d'hiver de Perec comme de « La quête d'Averroès » de Borges, des Fruits d'or de Nathalie Sarraute ou de L'Oeuvre posthume de Thomas Pilaster d'Éric Chevillard, de fabuleux exemples d'une histoire littéraire contre-factuelle mettant en question les fondements les plus solides de ce discours savant et destinée moins à reconstituer une période de la vie des lettres qu'à contester les présupposés épistémologiques de la synthèse qu'on en fait traditionnellement.

 

Ces récits spéculatifs mettent en évidence ce que les habituelles histoires de la littérature ont d'artificiel, puisqu'ils font éclater les différentes composantes que celles-ci prétendent unifier en une seule et même unité narrative : événements historiques, pratiques socioculturelles, biographies d'auteurs, lectures plus ou moins poussées d'oeuvres singulières. Dans ces fictions d'histoire littéraire, les impasses de toute reconstitution historique savante semblent mises au jour, versées au compte de l'imaginaire moins par simple plaisir ludique qu'afin d'exposer une autre manière de raconter l'histoire littéraire.

 

On pourra élargir l'enquête aux littératures étrangères (comme The Invention of Love de Tom Stoppard) et remonter aux origines de ces fictions d'histoire littéraire, en commençant par la Nouvelle Allégorique (1658) de Furetière, La Bataille entre les livres anciens et modernes de Swift (1697) ou le Dialogue des morts de Fénelon (1712), mais en pensant aussi, par exemple, aux chapitres de Bouvard et Pécuchet consacrés à la littérature.

 

 

 

Les propositions de contribution (autour de 3000 signes, espaces compris) sont à envoyer à Jean-Louis Jeannelle par email (jljeannelle@wanadoo.fr) ou par courrier (Jean-Louis Jeannelle, 79 rue Saint-Denis, 75001 Paris) avant le 30 juin 2006.