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Faux et faussaires (14e Journée d’étude de la revue doctorale pluridisciplinaire Les Chantiers de la Création)

Faux et faussaires (14e Journée d’étude de la revue doctorale pluridisciplinaire Les Chantiers de la Création)

Appel à communication de la 14e Journée d’étude de la revue doctorale pluridisciplinaire

Les Chantiers de la Création

Faux et faussaires

Aix-Marseille Université (ED 354)

6 avril 2021

 

En vue de sa journée d’étude annuelle, la revue pluridisciplinaire en lettres, langues, arts et civilisations, Les Chantiers de la création, s’intéresse au thème « faux et faussaires ».

Pline l’Ancien, au livre XXXV de l’Histoire naturelle, rapporte une anecdote restée célèbre à propos de Zeuxis. Ce peintre grec ayant vécu au IVe siècle avant J.-C. est connu pour avoir peint une grappe de raisin avec une adresse telle que des oiseaux se seraient jetés sur le tableau pour la picorer. Cette fable présente l’œuvre d’art en trompe-œil et nous invite à réfléchir sur le rapport paradoxal entre la représentation artistique et la réalité. Zeuxis – et la figure de l’artiste qu’il incarne – est-il un faussaire ?

Qu’est-ce que le faux ? Du point de vue de la logique, l’évident rapport symétrique entre les notions de faux et de vrai permet de dire dans un premier temps que le faux est l’envers du vrai : est faux ce qui ne correspond pas à la vérité du monde. On parle ainsi de faux énoncés, de fausses théories, de fausses sciences, de fausses informations. Ces données sont considérées comme erronées, impropres, parce qu’elles ne correspondent pas à une logique cohérente du vivant, à la réalité tangible et observable. Toutefois, le faux est aussi présent dans le monde matériel : il existe des fausses monnaies, des faux tableaux, qui sont des objets bien réels, mais qui cherchent à feindre une réalité et une nature qu’ils trompent. Il en est ainsi de la fiction, par définition un monde qui est l’envers du réel, un “mentir-vrai” qui est peut-être l’usage du faux le plus répandu au monde.

Dans le domaine des arts plastiques, la question se pose de manière plurielle. En effet, l’art se nourrit du faux et entretient une liaison au long cours avec les faussaires. Ainsi, une copie ne devient officiellement “un faux” qu’à partir du moment où est attribuée la paternité de l’œuvre à un artiste qui n’est est pas l’auteur. Ces processus de fiction créent des objets véritables, des œuvres qui entretiennent un rapport parfois volontairement ambigu à la réalité. Ainsi, dans les domaines de la photographie comme de la vidéo, l’arrivée du numérique a bouleversé le paysage de la création visuelle où tout est dorénavant possible, notamment dans la transformation et la manipulation de l’image originelle.

Les falsifications traversent également l’histoire de toutes les disciplines : des fausses découvertes archéologiques, des fausses attributions (livres, objets artistiques, compositions musicales, etc.), des fausses œuvres créées pour tromper les contemporains et les générations futures.

La fausseté apparaît aussi comme un synonyme d’erreur, dans le cas de la fausse note en musique, qui dérange un sens de l’harmonie ; la fausseté du jeu de l’acteur, qui suppose la dérogation à une norme implicite qui régit la représentation ; ou bien la fausseté d’un vers, qui sont autant de phénomènes de dissonance et d’imperfections qu’il est difficile – mais pas impossible – de penser comme le fruit d’une intentionnalité.

Axes proposés

Les communications pourront questionner les points suivants (liste non exhaustive) :

-       Le faux comme concept. Qu’est-ce que le faux ? Comment le penser comme notion en soi et le différencier des autres notions adjacentes telles que le vrai ou le réel ? Quelle est sa tradition philosophique et artistique, son usage, son évolution ? Le faux est-il une notion absolue ou un concept discutable ?

-       Le faux comme mimesis. Comment définir la mimesis et la fiction par rapport à cette question du réel ? Quand Balzac, dans Le Père Goriot, déclare que « All is true », c’est pourtant l’inverse qu’il faut entendre : all is false, tout n’est que fiction, une ruse se faisant passer pour la réalité.

-       Le faux et sa réception. La question de la paternité d’une œuvre artistique fait souvent débat, et ce depuis Homère. Les fausses attributions (avérées ou présumées) ne sont pas sans conséquences : dans quelle mesure la remise en question d’une paternité auparavant jugée authentique modifie-t-elle le regard critique porté sur une œuvre ?

-       Le faux comme création. Quelle est la finalité des copies, des œuvres fausses ? La copie d’une œuvre d’art peut être faite dans une logique d’instruction (un élève reproduit un tableau de maitre pour apprendre) ou dans une optique de conservation (certaines œuvres ne sont connues que par leurs copies parce que l’original est détruit, volé ou perdu). Une œuvre authentique peut être altérée et porter en soi de faux traits. La création du faux peut requérir un véritable art de la contrefaçon (Van Meegeren et ses faux Vermeer vendus des millions de dollars, Cesare Tubino et sa fausse Vierge aux chats qui figura longtemps dans le catalogue des œuvres de Léonard de Vinci) ou mener à des reculs importants de l’histoire de l’art (fausses peintures rupestres). Comment feindre le ton d’un artiste, son style, sa touche personnelle ? Sur quelles caractéristiques les faussaires s’appuient-ils pour construire le faux ? Quelles histoires nous racontent les œuvres fausses, altérées, copiées, et quels sont leurs enjeux ?

-       Le faux peut être ainsi un motif ou un thème représenté au sein d’une œuvre. Des livres comme Les faux monnayeurs de Gide, Un Cabinet d’amateur de Perec, des films comme F for fake de Welles, Les Faussaires de Ruzowitzky et The Best Offer de Tornatore posent le faux et la falsification au cœur du récit. Comment les faux et les faussaires sont-ils représentés dans les arts ? Quelles significations symboliques ou allégoriques entraînent ces représentations ? N’y aurait-il qu’une mise en abyme du faux ?

La revue Les chantiers de la création étant une revue de jeunes chercheurs, cet appel s’adresse exclusivement aux doctorant.e.s et jeunes docteur.e.s (dont la thèse a été soutenue dans les deux dernières années).

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Les propositions d’intervention devront être envoyées à l’adresse suivante : revue.lcc@gmail.com avant le 18 janvier 2021.

Celles-ci comprendront 300 mots (+ ou – 10%), hors notes de bas de page, et seront accompagnées d’une courte notice biobibliographique de l’auteur.e de la proposition.

Les propositions d’installation plastique sont aussi les bienvenues.

Merci de nommer vos fichiers comme suit : NOM _FAUXETFAUSSAIRES2021

La journée d'étude se tiendra le 6 avril 2021 à l’Université d’Aix-Marseille (site Schuman à Aix-en-Provence) et sera suivie de la publication des actes dans le prochain numéro des Chantiers de la Création au printemps 2022.

Les communicants devront ensuite soumettre leur article à paraître à une date qui leur sera communiquée ultérieurement (entre 20 000 et 30 000 caractères espaces compris au format Word et répondant à la feuille de style de la revue, consultable à l’adresse suivante : http://lcc.revues.org/786). Il sera ensuite évalué par le comité de lecture.

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Bibliographie indicative

Amandry, Michel, Atour du faux, Revue de la Bibliothèque nationale de France, n°13, juillet 2003.

Baudrillard, Jean, Simulacres et simulation, Galilée, 1985.

Beltracchi, Wolfgang, Helène Beltracchi, Faussaires de génie, Paris, Arche éditeur, 2015.

Bessy, Christian et Francis Chateauraynaud, Experts et faussaires. Pour une sociologie de la perception, Paris, Pétra, 2014.

Bouloumié, Arlette (dir.), L’imposture dans la littérature, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2011.

Breton, Jean-Jacques, Le faux dans l’Art, Hugo Image, 2014.

Decout, Maxime, Pouvoirs de l’imposture, Paris, Les Éditions de Minuit, 2018.

Deleuze, Gilles, « Puissances du faux » in L’image-temps, Paris, Les Éditions de Minuit, 1985.

Di Folco, Philippe, Petit traité de l'imposture, Paris, Larousse, 2011.

Eco, Umberto, La Guerre du faux, Paris, Grasset, 1985.

Gaillemain, Jean-Louis, Trop beau pour être vrai. Le faux dans l’art, de la tiare du Louvre aux chaises de Versailles, Paris, Le passage, 2019.

Gauthier, Léa, Muriel Ryngaert, Fran Lamy (dir.), Posture(s), imposture(s), Vitry-sur-Seine, MAC/VAL, 2008.

Grafton, Anthony, Faussaires et critiques. Créativité et duplicité chez les érudits occidentaux, trad. fr. Marie-Gabrielle Carlier, Paris, Les Belles Lettres, 2009.

Guichard, Charlotte (dir.), De l’authenticité. Une histoire des valeurs de l’art (XVIe-XXe siècles), Paris, Presses de la Sorbonne, 2014.

Hamon, Philippe, Puisque Réalisme il y a, Genève, La Baconnière, 2015.

Jeandillou, Jean-François, Supercheries littéraires [1989], Genève, Droz, 2001.

Jones, Mark, Craddock, Paul, et Barker, Nicolas (éd.), Fake? The art of deception [exhibition, London, 1990], London, British Museum Publications, 1990.

Kremer Nathalie, Sermain Jean-Paul, Yen-Mai Tran-Gervat, dir., Imposture et fiction dans les récits d’Ancien Régime, Hermann, collection « La République des Lettres », 2016.

Kurtz, Otto, Faux et Faussaires, Paris, Flammarion, 1983 [1948].

Mangeon, Anthony, Crimes d’auteur : de l’influence, du plagiat et de l’assassinat en littérature. Paris, Hermann, 2016.

Maurel-Hindart, Hélène, Du Plagiat, Paris, Gallimard, Folio Essais, 2011.

« Le Faux dans l’Art », Dossier de l’Art, n°245 (déc. 2016).

 

Directrice de la publication :

Sophie Vallas, Aix-Marseille Université  

 

Rédactrices en chef :

Johanna Carvajal Gonzalez, Aix-Marseille Université

Mathilde Mougin, Aix-Marseille Université

 

Comité de rédaction :

Yasmina Benari, Aix-Marseille Université

Andrea Bongiorno, Aix-Marseille Université

Marianne De Cambiaire, Aix-Marseille Université

Yann Etienne, Aix-Marseille Université

Julien Guazzini, Aix-Marseille Université

Mélisande Labrande, Aix-Marseille Université

Gianluca Leoncini, Aix-Marseille Université

Maria Luisa Mura, Aix-Marseille Université.