Questions de société

"Etudiants chinois à Toulon : l'inspection met en cause la présidence de l'université" (Le Monde 30/07/09)

Publié le par Bérenger Boulay

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Etudiants chinois à Toulon : l'inspection met en cause la présidence de l'université

LE MONDE | 29.07.09. Article paru dans l'édition du 30.07.09.

http://www.lemonde.fr/societe/article/2009/07/29/etudiants-chinois-a-toulon-l-inspection-met-en-cause-la-presidence-de-l-universite_1223777_3224.html#xtor=AL-32280184

Ce rapport, que Le Monde a pu consulter, écarte laresponsabilité de l'Institut d'administration des entreprises (IAE) quiavait été d'abord mis en cause. Les inspecteurs généraux Béatrice Gille, Jacques Haudebourg et Monique Ronzeau constatent de graves "dysfonctionnements" au sommet de l'université varoise, notamment dans les procédures d'admission des étudiants étrangers. Le ministère dit "attendre le retour du rapport après la phase contradictoire pour s'exprimer" et promet "toutes les mesures nécessaires".


L'université de Toulon "entretient un rapport ambigu à la loi".Et sa présidence est fortement soupçonnée d'avoir mis en place lesconditions favorisant des recrutements douteux d'étudiants étrangers.Telles sont les conclusions de l'inspection générale del'administration de l'éducation nationale et de la recherche (IGAENR),dépêchée en avril par le ministère de l'enseignement supérieur, aprèsla révélation d'un trafic de diplômes auprès d'étudiants chinois (Le Monde du 16 avril). Une instruction judiciaire pour corruption a été ouverte par le parquet de Marseille, le 26 mars.

En 2007, quand il est élu à la présidence de l'université, Laroussi Oueslati,conseiller régional (Parti radical de gauche), veut augmenter le nombred'étudiants étrangers pour compenser la baisse des effectifs nationaux.Dans ce but, il installe une commission centralisée de sélection desétrangers.

Problème : elle double les commissions pédagogiques de chaquefaculté de l'université, habituellement compétentes. De plus, lenouveau président n'a pas défini les critères selon lesquels lesdossiers relèvent des commissions des facultés ou de la procédurecentralisée. Selon les inspecteurs généraux, les candidats nebénéficient plus de l'égalité de traitement de leur dossier.

DOSSIERS LACUNAIRES

A cette irrégularité s'en ajoutent d'autres. Au mépris des règlesétablies, M. Oueslati a pris la tête de la commission centralisée,alors qu'il ne dispose pas du statut de professeur des universités. Iln'a pas non plus soumis, comme la loi l'y oblige, la composition de lacommission aux conseils d'administration (CA) et des études et de lavie universitaire (CEVU) de l'université. Enfin, même si cette nouvellestructure "n'a jamais été réunie", 395 étudiants (sur 438 candidats) sont admis pour 2008-2009.

Pis, souligne le rapport, le président a contourné sa proprecommission pour transférer les dossiers d'environ 140 étudiants chinoisdirectement à l'agent chargé des inscriptions administratives. Leursdossiers d'inscription étaient non seulement lacunaires, mais beaucoupde ces étudiants avaient déjà étudié en France, sans grand succès. Lerapport cite le cas d'une douzaine d'étudiants au parcours difficile :l'un a été admis en master 2 (M2), après avoir échoué en première annéede licence à l'université de Perpignan. Un autre a été admis en M2après un double échec en licence 1 à Metz... Arrivés plus tardivementen cours et ne parlant pas ou peu le français, ces étudiants ontd'ailleurs vite été appelés "les étudiants-président", selon une enseignante citée par le rapport.

"Ces irrégularités, au moment où elles se produisaient, ont été signalées au président et à son équipe par l'administration de l'université. Le président et son équipe n'ont pas souhaité en tenir compte", constate l'inspection.

A Toulon, continue le rapport, "l'absence de rigueur dansl'application des lois et règlements prend un relief particulier carelle s'inscrit dans un contexte de très grande personnalisation dupouvoir". Le document dépeint un climat de travail très lourd. Le comportement de M. Oueslati est critiqué : "Le président adopte des attitudes de proximité ou de connivence (...) et passe aisément des promesses aux menaces."

Cependant, les inspecteurs généraux ne vont pas jusqu'à évoquerl'existence d'un trafic institutionnalisé à but lucratif de places oude diplômes. A l'IAE, "la mission n'a pas établi de façon formelle l'existence d'irrégularités notoires des conditions de délivrance des diplômes (...), même si le fonctionnement de l'IAE dénote de grandes carences, notamment managériales". "En tout état de cause, concluent les inspecteurs, ils sont surtout sans rapport avec l'affirmation selon laquelle des centaines de diplômes, voire plus, auraient été achetés." En trois ans, l'IAE n'a délivré que 138 diplômes à des étudiants chinois.

Philippe Jacqué Article paru dans l'édition du 30.07.09.