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Essais et Création: Haïti 2004, une célébration douce-amère

Essais et Création: Haïti 2004, une célébration douce-amère

Publié le par Stéphane Martelly (Source : Francomonde)

Essais et Création: Haïti 2004, une célébration douce-amère

 


Je vous donne de mes nouvelles par les malheurs et les douleurs de mon Ile empêtrée dans les lises de la violence et du désespoir. Bonjour et au plaisir de vous lire.

 


Chères amies,chers amis,
Concernés, peu concernés pas concernés du tout au devenir du monde, qu'importe !  Je vous convie à un jeu sans aucun engagement de votre part.


Chacun est libre de jouer, d'inciter d'autres camarades à y prendre part  ou même de s'abstenir.  Il n'y a rien à gagner sinon l'amitié, la considération des uns et une manière intelligente de détourner l'angoisse; rien à perdre non plus ; sinon s'attirer la rancune et la colère des autres; Que restera-il? Tout au plus, l'autosatisfaction d'avoir saisi l'opportunité de réfléchir sur un sujet intéressant et passionnant. En définitive, on aura joué pour l'honneur. De quoi s'agit-il? A quoi donc nous invite-t-on de jouer, vont se questionner à bon escient, les sceptiques?


Haïti, connaissez-vous? Est-ce que cette étrangeté vous dit quelque chose?


Le point.  A la veille de  2004, bicentenaire de l'indépendance d'Haïti, il n'y a pas lieu de pavoiser.  Une grande majorité de mes concitoyens et d'étrangers sont profondément déçus, perplexes, désemparés et au bord
du désespoir face à la situation chaotique, catastrophique devant la mauvaise gouvernance de cette République: violence d'Etat, pauvreté, corruption, anarchie, division, gabegie, gâchis absence de projets à long terme et absence de volonté politique pour planifier l'avenir.


Il n'y a donc pas lieu de célébrer les deux cents ans de l'indépendance d'Haïti; la situation ne s'y prête pas. Très peu d'entre nous ont le coeur à la fête; d'ailleurs, quelle fête? Les conditions de souligner honorablement un tel événement font dramatiquement défaut. C'est une commémoration qui nous tombe dessus comme une fatalité; en ce sens, pavoiser ne saurait être de mise. Alors que faire? Il nous faut nous exprimer, parler entre nous, discourir, écrire, initier un débat, une discussion non sur la manière de fêter mais alimenter une réflexion de circonstance sur ce qu'on peut tirer de positif en terme de pensées vives, d'un événement passé en l'occurrence 1804 sous forme de résolutions, de propositions, de programmes, d'engagement et de choix de vie collectif pour l'avenir. Il nous faut en urgence réfléchir sur la situation actuelle, questionner le passé, porter un diagnostique sur les causes profondes des malheurs de ce peuple courageux et déboucher sur des pistes d'éclaircies de sortie de crise.
Comme annoncé d'entrée, voilà le jeu que je vous propose un jeu gratuit, innocent et sans visée utilitaire ou platement instrumentale. Il s'agit tout simplement d'un exercice de réflexion ; le mot est peut-être pompeux, peut-être trop fort; parlons de préférence de l'émission d'un simple point de vue, d'une brève opinion, d'une intervention lapidaire au gré de l'humeur. Le propos peut-être cérébral, imagé, fouillé, sérieux, indigné ou encore  humoristique, cinglant, lyrique, léger, allusif, dérisoire ; exprimé sur le mode du divertissement, il peut prendre des allures pointillistes ou impressionnistes selon le souffle de chacun, son tempérament, sa compétence son talent de jongleur, son degré d'engagement et sa disponibilité.


Le jeu est ouvert à toutes et à tous sans discrimination d'âge, ni de nationalité, ni de classe, ni de profession, ni de rang ou d'idéologie. Il n'y qu'une condition et elle dépend de votre bon vouloir votre participation.

Ceux qui ne désirent pas écrire peuvent utiliser d'autres moyens : cassettes, compact disk dessins ou autres. Ce que vous aurez écrit ou pensé, demeure votre propriété; personne n'est obligé de nous communiquer directement son produit, même s'il est disponible sur internet ; et si quelqu'un souhaite nous le communiquer, nous le confier, en tant qu' auteur, il en est toujours le propriétaire exclusif. Vous êtes libres de choisir un pseudonyme pour  rendre public votre création; enfin vous pouvez garder vos réflexions dans vos tiroirs ou les diriger vers une revue de votre choix.
Quant à nous, nous sommes en pourparlers avec quelques maisons d'édition d'Haïti et de l'étranger en vue d'une publication éventuelle avant  le mois de mars 2004 de la somme de ces réflexions, si le volume reçu et la
qualité de l'ensemble en valent la peine.

 


Argumentaire.-

En 1492, Christophe Colomb avec son équipage trié sur le volet, pressé par la faim, partent d'Europe (Espagne) à la recherche de nouvelles terres pour de nouveaux débouchés au niveau du marché. Ils
font main basse sur l'Amérique, Haïti servant de tête de pont. En moins de 15 ans, on a assisté à l'extermination des autochtones de cette Ile, Tainos et Caraïbes dénommés abusivement Indiens.
A partir de 1503, les Européens autoproclamés conquistadores, ont introduit des Nègres d'Afrique sur le continent et ceux-ci affermissant la résistance molle des Aborigènes, donnant à celle-ci une nouvelle vigueur, ils ont vite fait de reprendre le flambeau en menant une lutte plusieurs fois séculaire jusqu'à la victoire finale de 1804, moins de quinze ans après la révolution française de 1789.


En effet, cinq siècles plus tard, dans la tourmente d'une guerre exterminatrice où règne de façon systématique, la politique de la terre brûlée, à la faveur d'une ultime bataille, l'armée indigène culbute et anéantit définitivement, le 18 novembre 1803, les forces expéditionnaires françaises sous le commandement effectif et scélérat d'un général, tristement célèbre, Donatien Rochambeau.


Le premier janvier 1804, aux Gonaïves, quatrième ville en importance de la République d'Haiti en présence des généraux de l'armée triomphante, le général en chef, Jean-Jacques Dessalines, véritable Père de la Patrie
haïtienne, investi de la parole lyrique d'un  poète de son cabinet privé, l'infortuné Boisrond Tonnerre ; au nom de tout un peuple, Dessalines a, envers et contre tous, rejeté définitivement à la face du monde, le système esclavagiste, la domination de la France impériale et a imposé au monde étonné et inquiet, un Etat indépendant. Premier Etat de Nègres libres et indépendants du monde. C'est une révolution.


Cette révolution, à n'en pas douter, dévoile, dans les langes, sa portée universelle.  Tous les peuples du tiers-monde ont bien saisi d'ailleurs l'enseignement, la portée de cet acte hautement souverain et les grandes puissances, elles-mêmes le pouvoir d'entraînement de ce haut fait.


Dessalines, devenu quelques mois plus tard empereur d'Haïti, est assassiné après seulement deux ans de règne par ses compagnons de lutte, le 17 0ctobre 1806 dans l'indifférence populaire..


Et, tout le 19ième siècle a été un spectacle navrant de soulèvements des laissés pour compte insatisfaits de leur sort et victimes des guerres intestines entre oligarques à qui ils servent souvent de chair à canon. 
C'est ainsi que le pays a entamé sa descente aux enfers et a commencé à glisser et de fait, glisse inexorablement vers la déchéance et le naufrage.


En 1904, sous la présidence de Nord Alexis, Haïti a bouclé tant bien que mal les premiers cent ans de son indépendance; certains intellectuels et hommes politiques de l'époque ont dénoncé le caractère autant fastidieux
que fastueux que le président Nord Alexis personnellement avait voulu accorder à cette célébration.  C'est ainsi que Rosalvo Bobo, à la veille de 1904, pris de dégoût et de désespoir, avait convié la nation, dans
une lettre célèbre, à un rendez-vous pour 2004, en vue de célébrer fraternellement et grandiosement, ce qu'il était malséant de faire en 1904. Hélas!  Nous voilà en 2004 et Rosalvo Bobo qui croyait nous servir une boutade serait bien surpris aujourd'hui de constater devant l'aggravation de la situation générale du pays que 2004 est tout compte fait, un rendez-vous manqué, une impasse. On a failli à la tâche comme Haïtien, comme citoyen, comme gouvernant, comme humaniste. De surcroît, on est incapable de relever le défi.


Le 20ème siècle n'a pas tenu ses promesses.  Le présent d'Haïti est déprimant et dresse un tableau sombre pour l'avenir.  Il n'y a pas de quoi pavoiser; après 200 ans, le taux de chômage, de maladie, d'analphabétisme dépasse toute limite permise en cette ère moderne. Notre pays figure à la toute queue des pays moins avancés.  Et, à ce point de vue, c'est un échec, et cet échec doit être reconnu, assumé, dénoncé scruté, analysé.
Au nom de 1789, au nom de 1793, au nom de 1804, au nom même de 1904, le citoyen du monde, libre penseur, écrivain professionnel, clochard ou non est convié à réfléchir soit seul, soit avec d'autres ; dans quel esprit?  Celui de laver les linges sales, comme on ne le dit pas, en public.  Pour chercher remèdes au mal haïtien, s'il n'est pas trop tard.


En effet, il faut que le monde sache: en plein 21ème siècle, un peuple, s'arrachant à l'esclavage par son propre génie, empêché par ses propres élites avec la complicité des grandes puissances, d'évoluer, ne réussit pas aujourd'hui à décoller. Il est urgent de remédier à ce travers. Ce pays doit décoller ou périr en attendant mesdames, messieurs à vos marques.


Jouez avec nous et en même temps, pensez l'Haïti du 21ème siècle, bien différente et meilleure de celle des deux siècles précédentes.
A vos plumes; un mot suffira. Une phrase, un vers, un texte, un calligramme, un dessin même.  Nous nous contenterons même de votre silence, s'il n'est pas dédaigneux.
D'ici là, je nous dédie un merde sonore à la Ubu.           
Merdre!!!!!!!!!!!!!


 

Claude C. Pierre

Klodp@hotmail.com ou pleineplage@yahoo.fr

 

 

(Le 16 novembre 2003 serait la date de tombée pour une publication possible en mars 2004)