Olivier ORAIN, "Espace, géographie, écriture"
Séminaire Les écritures du géographique
La réflexion ici proposée par du constat d’une identification relative entre un champ disciplinaire (la géographie) et un terme abstrait (espace) qui depuis les années 1960 fait figure — avec des succès divers — d’objet générique que cette discipline se donnerait. Il en découle un usage assez généralisé de ce terme pour désigner le genre d’objet que ses praticiens travaillent, avec le pari qu’il y aurait quelque chose comme une unité ontologique (ou au minimum épistémologique) derrière ce recours, qui par ailleurs déborderait largement le cadre disciplinaire pour ouvrir sur la « spatialité » comme dimension de l’expérience humaine. À rebours de ce pari, cette présentation se veut une critique sceptique et une désarticulation de ces équivalences en indiquant que le « géographique » (entendu comme régime disciplinaire au long cours historique) ne saurait se rabattre sur un seul concept (auquel tous les autres grands marqueurs disciplinaires, « milieu », « région », « paysage », « lieu », « territoire », etc., seraient réductibles). Réciproquement, il s’agirait de plaider pour un effort d’élaboration d’une sémantique d’ « espace » moins flottante qui pourrait s’appuyer sur les tentatives qui ont essayé sérieusement de penser un plan de contenu pour ce terme. Dans cette perspective, les efforts de théoriciens comme H. Reymond, R. Brunet, P. Pinchemel et quelques autres pourraient être un point de départ, au moins pour la tradition française, à condition d’en ouvrir la portée à des usages au figuré (celui que l’on trouve par exemple chez un P. Bourdieu parlant d’ « espace des positions sociales ») : pour qu’il y ait « espace », la condition nécessaire est sans doute une prise en compte des différences entre des unités syntagmatiques saisies dans un système d’écart(s), le plus souvent de distance.
Sur cette base programmatique, il s’agirait alors de se poser la question des conditions de possibilité et de l’hétéronomie d’une écriture de l’espace ou des spatialités considérée comme une version parmi d’autres des possibles scripturaires de la géographie, en la distinguant de ce qui relève du « mésologique », du « local », etc. (dimensions qui ne sont pas nécessairement spatiales). La réflexion, sociolinguistique et sémantique à l’origine, voudrait ce faisant participer à la redéfinition, dans un sens plus restrictif, de ce que pourrait être une poétique de l’espace.
Toutes les personnes intéressées sont cordialement invitées.
Le lieu : Laboratoire Géographie-cités, équipe EHGO, 13 rue du Four, 75 006 Paris (3ème étage, bibliothèque)
Le moment : Jeudi 9 mars de 13h à 16h