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Episcopatus : politique, rhétorique et théologie d’une fonction ecclésiastique (XVIe-XVIIe s.)

Episcopatus : politique, rhétorique et théologie d’une fonction ecclésiastique (XVIe-XVIIe s.)

Publié le par Marielle Macé (Source : Frédéric Gabriel)

Episcopatus : politique, rhétorique et théologie d’une fonction ecclésiastique (XVIe-XVIIe s.)

 

 

 

Conférences à l’Ecole pratique des hautes études, Sciences religieuses, année 2007-2008

par Frédéric Gabriel

Conférences à l’EPHE (en Sorbonne) : lundi 17 décembre (9-11h, salle Puech), mardi 18 décembre (16-19h, salle Vignaux), mercredi 19 décembre (9-11h, salle Puech), jeudi 20 décembre (11-12h, salle Puech), vendredi 21 décembre (9-10, salle Dumézil).

 

 

 

En 1894, Jean Réville publiait dans la « Bibliothèque de l’Ecole des Hautes Etudes » (vol. V) Les origines de l’épiscopat, une étude qui portait sur « la formation du gouvernement ecclésiastique au sein de l’Eglise chrétienne dans l’Empire romain ». Dans son introduction, il évoquait sans s’y arrêter l’importance du XVIIe siècle pour les études sur l’épiscopat[1]. En effet, lorsque se développent les enquêtes critiques sur les origines chrétiennes et la légitimité de telle ou telle filiation, l’évêque est au centre des controverses et des travaux d’érudition, deux plans souvent étroitement liés. Que ces textes abordent la tradition, le pouvoir, ou la pastorale de la parole évangélique, l’institution épiscopale est une référence.

Si notre étude se limite à l’époque moderne, elle n’en sera pas moins attachée à la profondeur historique de ce modèle, en étudiant par exemple la réception des textes d’Ignace d’Antioche, d’Isidore de Péluse, et de Cyprien notamment. Ils sont importants non seulement en tant que témoins textuels, mais également comme sources normatives. Les modèles de l’Afrique chrétienne (avec par exemple la notion de ‘primauté’ appliquée à l’évêque) et de l’Asie mineure (l’episkopos est le représentant de l’unité ecclésiastique locale) sont essentiels dans la formation de la pensée européenne de l’épiscopat. Dans le traité qu’il consacre à l’Episcopus, publié à Milan en 1575, Agostino Valier (1531-1606), évêque de Vérone, édite une lettre d’Isidore de Péluse, avant même que l’œuvre de ce dernier soit publiée par Jacques de Billy (1535-1581). Dans un autre contexte, pour défendre l’évêque de Rouen, Michael Roguerius fait directement référence à Léonce de Byzance et à la secte des Acéphales[2], alors que son volume s’ouvrait sur cette citation en pleine page : « Qui cum Episcopo non est, in Ecclesia non est. D. Cyprian. in Ep. ad Florentium Puppianum. »

L’institution divine de l’épiscopat étant un dogme fort ancien, quoique tardivement défini par le concile de Trente (15 juillet 1563, sess. XXIII, can. 6)[3], nous nous interrogerons sur l’essence de cette fonction ecclésiastique, sur les diverses sources qui la définissent (bibliques, pastorales, ascétiques, administratives), ainsi que sur la manière dont les auteurs font l’histoire de la hiérarchie et l’instrumentalisent. L’épiscopat permet également d’aborder les questions liées au pouvoir de juridiction et à ses procédures, au régime synodal, à la notion d’Eglise locale, et à la géographie ecclésiastique. Sans négliger les études prosopographiques, nous centrerons notre exposé sur l’histoire des textes, et plus précisément des traités (théologiques, liturgiques, rhétoriques) sur l’épiscopat[4]. Notre perspective sera européenne. L’Italie est centrale non seulement à cause de l’importance de l’évêque de Rome, mais tout autant pour le modèle borroméen qui s’est largement diffusé, notamment en France.  De plus, les ecclésiologues italiens de l’époque moderne sont très féconds en traités sur la hiérarchie ecclésiastique – nous retiendrons notamment Tommaso Zerola (1548-1603), Giuseppe Maria Maraviglia (1617-1684), Lelio Zecchi (1532-1610), Gabriele Paleotti (1522-1597), Bartolomeo Ugolini. Concernant le Portugal, nous continuerons l’étude de Bartolomeu dos Martires (1514-1690), amorcée par Hubert Jedin. La High Church et plus largement les œuvres d’Andrew Willet (1562-1621) et de Henry Dodwell (1641-1711) fournissent un contrepoint bienvenu au romanisme, de même que l’opuscule de Samuel Bochart (1599-1667) adressé à Morley, chapelain anglais. Du côté français, outre les œuvres d’érudition de Denys Petau (1583-1652), Jean Morin (1591-1659), Claude Saumaise (1588-1653), David Blondel (1590-1645), André du Saussay, nous retiendrons des controverses plus locales, comme celle réunissant, dans les années 1650, Jean Bagot (1591-1664) et Guy Drappier. Parallèlement, nous préparerons l’édition d’un ouvrage rarissime du franciscain Jean Le Febvre (XVIIe s.) – retrouvé par nos soins – qui témoigne de manière originale de l’influence du corpus dionysien sur la conception de l’épiscopat.


[1] Jean Réville, Les origines de l’épiscopat …, Paris, Ernest Leroux, 1894, p. 8 n. 1.

[2] Defensio sacrae episcoporum authoritatis contra Acephalos, & libellum ementito Capituli Rothomagensis Ecclesiae nomine nuper editum, Authore Michaele Roguerio Sacrae Theologiae studioso, s. l., 1610, f° 9-10.

[3] Tractatus de statu et munere episcopali, Laelii Zecchi canonici et poenitentiarii Brixien, Theologi, & Iur. Utr. Doct. In quo, de episcopalis dignitatis praestantia, de potestate, & Officio Episcopi, De Residentia, De Visitatione, et de ratione se habendi in cura Animarum, & Administratione Episcopali, peragitur, Brixiae, Apud Vincentium Sabbium, 1592, p. 2.

[4] Dans son grand livre sur The Making of the French Episcopate, 1589-1661 (New Haven-London, Yale University Press, 1996), Joseph Bergin ne s’est pas penché sur ces corpus.