Actualité
Appels à contributions
Écritures de la promenade, de 1750 à 1860 (Strasbourg)

Écritures de la promenade, de 1750 à 1860 (Strasbourg)

Publié le par Philippe Robichaud (Source : Juliette Fabre)

Écritures de la promenade, de 1750 à 1860

Journée d’étude (Université de Strasbourg)

5 novembre 2020

Organisation : Édouard Bourdelle (Université de Strasbourg), Juliette Fabre (Université d’Artois)

Pourquoi sortir, marcher en plein air, si c’est pour rentrer en soi-même ? Que peut apporter la promenade, qu’elle soit solitaire ou sociale, pour l’écriture et la pensée des écrivains entre le XVIIIe siècle et le XIXe siècle ? Au début du XVIIIe siècle, la promenade, lieu aménagé pour la déambulation et le loisir lettré ou mondain, s’articule fortement à la forme du dialogue et de la conversation. Plus qu’un décor ou un thème, elle a pu prendre la dimension d’une forme littéraire au XVIIIe siècle, certes mineure, à la poétique paradoxale, rejetant l’ordre du traité et affichant comme principe la négligence du divertissement et une certaine forme d’oralité. Pourtant, en parallèle avec l’évolution historique et sociologique des lieux de promenades et des façons de se promener au XVIIIe puis au XIXe siècle, passant de lieux agencés pour « voir et être vu » à une déambulation plus ouverte, au hasard des rues, sur les boulevards, dans la campagne, parfois de façon solitaire, l’écriture de la promenade a pu se modifier, se diversifier, en mettant en avant la subjectivité du scripteur, abandonnant (peut-être de façon définitive ?) la forme du dialogue. De la mode de se promener dans l’espace mixte, populaire, chamarré, des boulevards aux alentours de 1750, jusqu’aux grands travaux d’Haussmann, modifiant la forme et l’apparence de la ville de Paris dans les années 1860, comment la promenade, la marche dans la ville a-t-elle pu inspirer les écrivains et les poètes ? Et dans quelle mesure la sortie de la ville, la déambulation dans un environnement naturel ou rural a-t-elle alimenté l’écriture et la rêverie ? La promenade est-elle un motif, un thème permettant de repenser les rapports de l’individu à la société, au paysage ? Peut-elle devenir une forme, symbolisant la recherche et les errances d’une posture littéraire ? Quelles en sont les diverses apparitions dans la littérature de cette période ?

Selon ces perspectives, il s’agit aussi de s’interroger sur la fortune et l’héritage de la figure du promeneur solitaire, apparaissant au XVIIIe siècle, popularisée par Rousseau, et se développant tout au long du XIXe siècle. Comme décor et nouvel espace d’expression, la  « promenade solitaire » inaugure une tradition nouvelle d’écriture, empruntant la voie de l’essai : à l’exploration de l’espace correspondra une exploration des méandres de la pensée de l’auteur, que le lecteur pourra reproduire, en suivant les détours d’un discours dont la rhétorique est éclatée.

Nous nous proposons d’étudier les implications de la promenade, que ce soit sous les espèces de la marche, de la flânerie, voire du voyage de loisir, en ville ou à la campagne, entre le milieu du XVIIIe et le milieu du XIXe dans l’écriture de textes fictionnels, autobiographiques, ou poétiques. Comment concilier les tensions entre promenade comme élaboration d’une conscience de soi, peut-être errante, oscillant entre remémoration et projection, et le rapport au monde du promeneur, que ce soit comme observateur amusé ou spectateur critique ? Entre promenade sociale et promenade solitaire, rapport au moi et aux autres, la promenade induit-elle une poétique singulière ?

Les communications pourront porter sur des auteurs particuliers ou envisager les enjeux de la promenade pour l’histoire des idées et des formes littéraires, l’histoire des représentations sociales ou bien encore prolonger la réflexion vers l’histoire de l’art.

Il est prévu 20 minutes de communication par participant, suivies de 10 minutes de discussion. Les propositions d’intervention, dans un format de 10 lignes maximum, seront à envoyer par courriel aux adresses suivantes : fabrejuliette@hotmail.fr,  e.bourdelle@protonmail.com avant le 15 septembre 2020.

Bibliographie :

ANTOINE Philippe, « Une rhétorique de la spontanéité : le cas de la Promenade », in Alain Guyot et Chantal Massol (dir.), Voyager en France au temps du romantisme, Grenoble, Editions littéraires et linguistiques de l'Université de Grenoble, 2003, p. 131-146

BECK Robert, « La promenade urbaine au XIXe siècle », Annales de Bretagne et des pays de l’Ouest, vol. 116-2, no. 2, 2009, pp. 165-190.

BELLEGUIC Thierry et TURCOT Laurent (dir.), Les Histoires de Paris (XVIe- XVIIIe siècle), Paris, Hermann, 2012.

CORBIN Alain, L'Avènement des loisirs 1850-1960, Paris, Aubier, 1995.


DAGOGNET François (édité par), Mort du paysage ? Philosophie et esthétique du paysage, Paris, Champ Vallon, 1982.

FARRUGIA Guilhem, LOUBIER Pierre, PARMENTIER Marie, (dir.), Promenade et flânerie : vers une poétique de l’essai entre les XVIIIe et XIXe siècles, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, « La Licorne », 2017.

FARGE Arlette, Paris au siècle des Lumières, Paris, éd. Le Robert, 2017

GROS, Frédéric, Marcher, une philosophie, Paris, Carnets Nord, 2009.

HUE Jean-Louis, L’Apprentissage de la marche, Paris, Grasset, 2010.

LEFAY Sophie, L’Invention du Jardin Romantique en France 1761-1808, Neuilly- sur-Seine/Paris, Editions Spiralinthe, 2001

LEFAY Sophie (dir.), Se promener au XVIIIe siècle, Rituels et sociabilités, Paris, Classiques Garnier, 2019.

LOIR Christophe et TURCOT Laurent (éd. par), La Promenade au tournant des XVIIIe et XIXe siècles (Belgique-France-Angleterre), Bruxelles, Editions de l’université de Bruxelles, 2011

MONTANDON Alain (dir.), Sociopoétique de la promenade, Clermond-Ferrand, Presses Universitaires Blaise Pascal, 2000

MONTANDON, Alain (dir.), Promenades et écriture, Clermont-Ferrand, CRLMC, Université Blaise Pascal, 1996.

PARKHURST FERGUSON, Priscilla, « The Flâneur: urbanization and its discontents» in NASH Suzanne (dir.), From Exile to Vagrancy: Home and its Dislocations in 19th century France, Albany, State University of New York, 1993, p. 60.

ROGER Alain, Court Traité du paysage, Paris, Gallimard, 1997

TURCOT Laurent, Le Promeneur à Paris au XVIIIe siècle, Paris, Gallimard, coll. Le promeneur, 2007.

 

Illustration: Jean-Jacques Rousseau herborisant à Ermenonville, 1778, d'après Georg Friedrich Meyer (1735-1779), Paris, Musée Carnavalet