Questions de société
Écoutez les sciences sociales, surtout quand elles dérangent.

Écoutez les sciences sociales, surtout quand elles dérangent.

Publié le par Vincent Ferré (Source : Revue EspacesTemps.net)

Écoutez les sciences sociales, surtout quand elles dérangent. La crise de l'Université française vue par la Rédaction d'EspacesTemps.net.

« It's about ensuring that facts and evidence are never twisted or obscured by politics or ideology. It's about listening to what our scientists have to say, even when it's inconvenient — especially when it's inconvenient. »
Barak Obama, Science Team Rollout Radio Address, Friday, December 17, 2008. 

Que révèlent les évènements universitaires récents ? 

Des sciences sociales même concernées, tentent de se distancier du mouvement des enseignants-chercheurs et en proposer leur propre analyse.


Parmi les éléments d'analyses ces auteurs avancent l'idée d'une "nouvelle question sociale". Pour Marc Dumont : 
" Premier constat, donc, de cette échappée — provisoire ou définitive, il est beaucoup trop tôt pour le dire — du seul régime partisan auquel la contestation des réformes d'État s'est trouvée longtemps associée. « Je n'ai pas manifesté depuis... depuis l'école libre ! » déclare ainsi ce collègue : si, de droite comme de gauche, une frontière est tombée, une autre bien plus considérable s'est affermie. Est-ce la préfiguration de ce nouveau régime compétitif et de rapport interindividuel en milieu professionnel ouvert par la réforme ? Nouvelle frontière que celle-ci, qui viendrait s'établir à l'intérieur même du champ enseignant, le divisant de l'intérieur, faisant voler en éclat les congruences partisanes pour leur voir s'y substituer des « systèmes de proximité », de « rapprochements », d'affinité ou de « contiguïté » d'intérêt avec les instances désormais responsables d'université rendues autonomes. 

(...)

L'horizon universitaire est trouble, certes. Mais il n'est peut-être, au fond, qu'un symptôme anticipatoire d'une métamorphose sociétale dont il est ni le point de départ, ni le terme, mais un élément parmi d'autres, de son accélération : d'une société de défiance, d'une insécurité sociale (Robert Castel) en voie de se conforter. Ce ne sont probablement ni les émeutes en Grèce, ni les manifestions en Écosse, ni celles qui ne sauront tarder probablement dans l'État dont Arnold Schwarzenegger est le gouverneur, qui ne le contrediraient."

Pour Hervé Regnauld c'est la conception du savoir qui est en jeu, de son utilité :
"Les enseignants-chercheurs ont alors une responsabilité : il leur faut, à partir des questionnements estudiantins, repenser leur façon de produire des savoirs, c'est-à-dire de « chercher ». D'une manière ou d'une autre, les étudiants sont solidaires des enseignants mais demandent aux enseignants de produire des résultats socialement bien définis, c'est-à-dire des savoirs socialement utiles. Le critère de l'utilité est double : est utile ce qui procure une compétence sur le marché du travail et est utile ce qui procure une distance à l'égard des valeurs du marché du travail. Les étudiants sont en train d'inventer de nouveaux critères d'évaluation de notre recherche."

Pour Igor Moulié, c'est la raison même de la recherche qui doit être examinée : qu'est-ce que chercher veut dire ?

"Les nouvelles procédures introduisent des logiques d'évaluation de type hiérarchique et bureaucratique. Les instances concernées (agences, présidence d'université) n'ont ni le temps ni les moyens de se lancer dans une évaluation qualitative et reposent sur des facteurs quantitatifs : nombre d'articles publiés, facteur d'impact, participation à des projets internationaux. Elles incitent le chercheur à produire des signes d'activités, une illusion de recherche, plutôt qu'un contenu réellement innovant."

L'ensemble du texte est disponible à cette adresse :
http://www.espacestemps.net/document7676.html