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Un Dictionnaire ivoirien

Un Dictionnaire ivoirien

Publié le par Université de Lausanne (Source : Langui Konan Roger)

Un Dictionnaire ivoirien

Ce projet de « dictionnaire ivoirien » situe la question de langue dans une approche pragmatique de la langue ‘’française’’ parlée et lu en Côte d’Ivoire depuis plus d’un demi-siècle ; c’est-à-dire des premiers explorateurs à nos jours. C’est aussi la langue des écoles et universités, de la médecine, de la recherche scientifique, des arts et de la mode entre autres. Il en découle que c’est même elle qui présente et parle au nom des cultures et langues locales.

Elle a été admise comme « langue officielle » dès l’accession du pays à l’indépendance politique ; précisément le 07 août 1960 comme dans presque tous les Etats négro-africains. Adou Diouf, alors premier responsable de la « francophonie », présentant cette langue, la désignait bonnement comme une sorte de « butin de guerre » pour les Négro-africains ; elle serait donc devenue pour bien des raisons, un patrimoine africain et donc, tout aussi ivoirien en Côte d’Ivoire que malien au Mali ou togolais au Togo pour nous limiter à ces exemples. Ce qui n’est pas faux en soi d’autant plus que la langue est aussi vivante qu’un corps social ; c’est-à-dire qu’elle peut guérir de ses blessures, s’adapter à toute forme de pression et d’oppression ou changer de reflet selon l’environnement voire porter merveilleusement la psychologie du peuple qui l’invente et la porte.

C’est justement ce facteur qui inquiète et interpelle au plan dialectique. D’autre part, qu’est-ce qu’un « butin » sinon un ensemble de prises faites chez un tiers militairement défait ! Or, nos ancêtres n’ont pas gagné la guerre contre la colonisation autant que la langue française n’est pas notre patrimoine. Pour que cela fût possible en théorie, il eût fallu que nous fussions capables de participer à la destinée des mots en usage, à l’adoption des règles de grammaire et d’orthographe ou même à la fixation de la phonétique. Adopter donc une posture hardie pour quelques raisons que ce soit, c’est en partie faire preuve d’imposture.

Mais là où Diouf à raison et avant lui, Senghor lui-même, c’est dans l’évidence de la réinvention quotidienne de cette langue aussi bien dans les imaginaires locaux que dans l’histoire de nos pays. Ce même phénomène a cours entre les langues locales parfois. C’est pourquoi, ce à quoi invite ce projet, c’est de faire ce que firent les français eux-mêmes autour du XVIème à un moment où leurs langues locales comme le Picard, le Lorraine, la langue d’oïl, la langue d’oc entre autres, étaient subverties par le latin et le grec.

Sous l’impulsion d’écrivains dont Clément Marrot et plus tard Ronsard, il s’est agi de « piller l’Italie » de sa langue, de sa culture, de ses bonnes mœurs, de son imaginaire poétique. C’est pourquoi, en lieu et place d’un « butin » ou d’un quelconque « pillage », ce projet invite à considérer la langue française comme un bien modeste « héritage » dont nous n’aurions pas été capables de nous défaire aussi promptement de toute façon. Ce faisant, il convient de nous repositionner dans et à travers elle, en gardant à l’esprit les fondements de l’indépendantiste littéraire en tant que courant littéraire et idéologique post-négritudien.

Dans la réalité des faits, et dans la pratique des usages, cette langue coexiste avec nos langues et notre imaginaire depuis leur rencontre historique. Mais cela donne naissance à « un parler si spécifique » aujourd’hui qu’il ne peut ni être le « français des français » ni celui d’aucun autre territoire ou peuple. De fait, peu importe notre familiarité à cette langue aujourd’hui, peu importent les copulations éventuelles avec nos langues et au-delà, notre imaginaire, il faut pouvoir la revendiquer et l’assumer. De toute évidence nous avons au plan phénoménologique, une langue qui possède comme toute langue, des codes propres, tirés de notre lecture de l’histoire et de nos aventures heureuses ou malheureuses sur l’échelle de l’histoire.

Pour cela, le Centre de Poétique et d’Etude en Concepts Langages (CPECL) appelle à une contribution de chercheurs, d’hommes de Lettres et de culture de Côte d’Ivoire, d’Afrique de l’Ouest et au-delà, de toute l’Afrique francophone et de la diaspora pour la constitution d’un « dictionnaire ivoirien » autour des auteurs ci-après : LANGUI Konan Roger (Écrivain, Enseignant Chercheur, Directeur du CPECL), TOH Bi Emmanuel (Écrivain, Enseignant Chercheur), Etty Macaire (Président de l’Association des Écrivains de Côte d’Ivoire), Josué Guébo (Écrivain, ancien Président de l’Association des Écrivain de Côte d’Ivoire).

Toute manifestation d’intérêt doit nous parvenir au mail suivant klangui@yahoo.com du 1er mars au le 08 mai 2020 plus tard.