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Des "sociétés de sécurité" au (néo-)libéralisme. Foucault, l'International moderne et la politique mondiale

Publié le par Matthieu Vernet (Source : Philippe Bonditti)

Des « sociétés de sécurité » au (néo-)libéralisme

Foucault, l'international moderne et la politique mondiale

 

Ecole doctorale Michel Foucault

15-16 janvier 2014

IMEC, France

 

L'Association pour le Centre Michel Foucault propose, cette année encore, avec l'aide de la Fondation de France une école doctorale visant à réunir les doctorants travaillant sur, avec et autour de la pensée de Michel Foucault.

Comme les années précédentes, l'objectif est de mettre en relation, le plus agréablement possible et de manière assez informelle, les jeunes chercheurs afin de constituer un réseau de travail international.

Cette année, l'Ecole doctorale portera sur le thème : Des « sociétés de sécurité » au (néo)libéralisme. Foucault, l'international moderne et la politique mondiale. Elle s'inscrira à la suite d'une précédente rencontre doctorale sur le même thème co-organisée avec l'Instituto de Relações Internacionais de l'Université PUC-Rio (IRI/ PUC-Rio) du 25 au 27 septembre 2013 à Rio de Janeiro.

Problématique

Le rapport de Foucault au domaine de savoir associé à ladite discipline des « relations internationales » (RI) est pour le moins étrange. Entre la fin des années 1970 et le milieu des années 1990, les travaux de Michel Foucault ont en effet largement nourri une critique radicale des présupposés onto-épistémologiques des principales théories des RI. Ce n'est pourtant pas dans les travaux de Foucault qui s'approchent le plus de ce « domaine de savoir » (nous pensons notamment aux derniers cours de la série Sécurité, Territoire, Population) que la critique est allée puiser, mais dans le Foucault des « early years » comme aime à le catégoriser une certaine tradition anglo-saxonne.

Cette critique – aujourd'hui plus particulièrement associée aux noms de RBJ Walker, Michael Shapiro, Rick Ashley, William Connolly, Nicholas Onuf, Michael Dillon, David Campbell ou James Der Derian s'inspire de Foucault pour, notamment, faire surgir l'étude des pratiques discursives dans celle des « relations internationales ». Les options théoriques développées par ces auteurs fonctionnaient alors à l'intérieur d'une ontologie pluraliste insistant sur la multiplicité plutôt que sur l'unité, la différence plutôt que l'identité, l'hétérogénéité plutôt que l'homogénéité.

D'un point de vue épistémologique, l'humeur archéo-généalogique qui se déploie progressivement dans ladite discipline des RI a permis de contester les présomptions universalistes du réalisme épistémique qui dominait alors les théories des RI (Shapiro & Der Derian, 1989, Ashley/Walker, 1990, Der Derian, 1995). Elle a ainsi permis de porter l'attention sur les pratiques historiques ayant contribué à la construction de ce que nous en sommes venus a appeler l'Etat, la souveraineté, l'international (Bartelson, 1995), mais aussi la diplomatie (Der Derian, 1987, Constantinou, 1996), la politique étrangère (Campbell, 1998) ou la sécurité (Der Derian, 1993, Dillon, 1996). Des pratiques historiques invisibilisées par un usage non-problématique de ces notions qui, dans la « discipline des RI », en étaient venues à fonctionner comme des impensés.

Cette littérature « critique » a notamment impliqué une généalogie, au moins partielle, de la discipline elle-même (Ashley, 1987, Walker, 1993) qui n'a pas seulement permis de poser la question de savoir comment l'étude des « relations internationales » s'était historiquement constituée en domaine particulier de savoir, mais aussi de mettre en évidence la manière dont les théories des relations internationales étaient bien davantage les expressions d'un imaginaire spatial et politique particulier et historiquement situé que les explications de la politique mondiale qu'elles prétendaient être. Ainsi le « tournant critique » a-t-il contribué à poser le caractère historiquement contingent de la discipline elle-même.

Cette tâche, Michel Foucault ne l'avait pas lui-même initiée dans les cours des 22 et 29 mars 1978 de la série Sécurité, Territoire, Population, lorsque, discutant l'idée d'Europe telle qu'elle surgit au tournant du XVIIIe siècle, il évoque le passage d'un « droit des souverains » à une « physique des Etats » ? Ce faisant, n'a-t-il pas posé les bases d'une véritable archéo-généalogie des RI à l'intérieur desquelles la notion d'« équilibre des puissances » (Balance of power) a joué un rôle si central ? Mais alors, pourquoi Foucault ne fait-il dès lors aucune référence à la théorie des RI ? La question se pose tant il est difficile de concevoir qu'il n'ait pas eu connaissance de cette région de savoir qui, si elle s'est principalement imposée hors de France, n'en comptait pas moins parmi ses représentants des intellectuels aussi éminents que Raymond Aron et Pierre Hassner, déjà reconnus comme les deux principales figures françaises de l'étude des « relations internationales ».

Cette série d'interrogations se retourne immédiatement vers ceux qui, aujourd'hui, dans la discipline des relations internationales, usent abondamment des notions de gouvernementalité et de biopolitique sans jamais (à notre connaissance) évoquer ces deux cours. A l'époque du « tournant critique », la série Sécurité, Territoire, Population n'est pas encore disponible, ni en Français, ni en anglais. Seuls circulent quelques enregistrements des cours de Foucault. Et l'on ne s'étonnera donc guère que personne ne se soit interrogé sur cet étrange silence de Michel Foucault à propos des « théories des relations internationales ». Mais ce n'est plus le cas aujourd'hui. Sécurité, Territoire, Population est disponible en français depuis presque dix ans, et en anglais depuis bientôt sept ans.

Partant de ce constat, les participants à ce séminaire doctoral se proposent tout à la fois : (1) d'interroger ce rapport d'ignorance réciproque ; (2) de travailler à une généalogie de la discipline des « relations internationales » ; (3) d'explorer la manière dont les travaux de Michel Foucault sur la sécurité, le libéralisme et, plus largement, sur l'art de gouverner peuvent aujourd'hui aider à penser de manière autre ce que les théories des relations internationales se sont progressivement données comme leur principale objet d'étude: la « politique internationale » et, en son sein, le rôle de l'Etat.

Modalités de participation

La rencontre doctorale aura lieu les 15 et 16 janvier 2014 à l'IMEC, dans l'abbaye d'Ardenne à Caen (lien) avec un départ de Paris prévu le 15 tôt le matin et un retour sur Paris le 16 en début de soirée. Les langues de travail seront le Français et l'Anglais.

Les frais de séjour sur place et les billets Paris-Caen-Paris sont pris en charge par l'Association pour le Centre Michel Foucault.

Pour que les échanges soient le plus féconds possibles – et compte tenu des capacités d'accueil de l'abbaye – le nombre de participants est limité à 10, ce qui impliquera nécessairement un choix de notre part.

Les doctorants ayant participé aux journées les années passées pourront bien entendu décider de soumettre une proposition pour ces nouvelles rencontres doctorales. Priorité sera toutefois donnée aux nouveaux intervenants et à ceux dont les propositions n'avaient pu être retenues les années précédentes.

Les propositions d'intervention (une page maximum), portant soit sur une question particulière de votre travail de thèse, soit sur un problème méthodologique précis, devront nous être envoyées, en français ou en anglais, avant le 15 décembre 2013. Une réponse sera donnée au plus tard le 22 décembre et un programme préliminaire sera mis en circulation au plus tard le 30 décembre.

 

N'hésitez pas à nous contacter pour toutes demandes d'informations complémentaires :

Philippe Bonditti : philippe.bonditti@gmail.com;

Luca Paltrinieri : l.paltrinieri@gmail.com

 

Très cordialement,

L'Association pour le Centre Michel Foucault