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De la valeur littéraire de l'instance préfacielle dans les littératures française et d'expression française

De la valeur littéraire de l'instance préfacielle dans les littératures française et d'expression française

Publié le par Laure Depretto (Source : Emna Beltaïef)

Université de Tunis

Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis

Département de Français

 

Argument du colloque

 

De la valeur littéraire de l’instance préfacielle dans les littératures française et d’expression française

« Un vrai livre se passe de présentation », Mallarmé.

Tunis, 16-17 octobre 2014

                                                                                          

Le texte de présentation écrit par un auteur célèbre ou du moins reconnu, et ce afin de valoriser, d’autres diront « légitimer » l’œuvre à lire, la préface, constitue l’une des singularités du paratexte. En effet, elle semble l’une des composantes du livre. Mais alors que dans les siècles précédents, le lecteur avait droit essentiellement à des préfaces auctoriales, abondent actuellement les préfaces allographes, ce qui conduit à y voir des manifestations de la métatextualité telle que définie par Gérard Genette.

Les raisons justifiant l’écriture des préfaces auctoriales sont claires : présenter l’œuvre, prévenir les objections des critiques, communiquer ses idées au lecteur. Le théâtre classique donne incontestablement ses lettres de noblesse au genre préfaciel.  L’on pense à la préface du Tartuffe, à celle de Phèdre, ou encore à celle du Mariage de Figaro. De la même façon, les romans du XIXe siècle sont préfacés par leurs auteurs, dans le but de donner cette fois une légitimité à ce genre informe qu’est le genre romanesque. Les préfaces auctoriales se font pour la plupart « préfaces-manifestes », et l’on peut citer l’Avant-propos de La Comédie Humaine ou la Préface de Pierre et Jean, sous-titrée « Étude sur le roman ». De fait, ces préfaces auctoriales à des œuvres théâtrales ou romanesques sont devenues une référence pour comprendre l’histoire d’un genre. Mais au-delà de la valeur historique des préfaces auctoriales, se profilait  la question de la valeur esthétique de cet « avant-dire », pour reprendre l’expression de Derrida. Ainsi, commentant l’œuvre de Michelet, le narrateur proustien dit : « Les plus grandes beautés de Michelet, il ne faut pas tant les chercher dans son œuvre même que dans les attitudes qu’il prend en face de son œuvre, non pas dans son Histoire de France ou dans son Histoire de la Révolution, mais dans ses préfaces à ces deux livres. » (Proust, Marcel, La Prisonnière, Pléiade, Tome III, p.666). Ce commentaire ouvrait la voie à une étude formelle des préfaces auctoriales, véritables exercices de style.

Mais qu’en est-il des préfaces allographes ? L’une des caractéristiques des préfaces contemporaines est qu’elles sont  confiées à un autre auteur, écrivain notoire ou universitaire. Leur vocation première est de valoriser le texte, de montrer son originalité, de faire découvrir l’écrivain. C’est ce que fait Baudelaire en préfaçant Poe, Anatole France en introduisant Proust.

L’autre fonction, commune aux préfaces auctoriales et allographes, semble théorique puisque tout comme la préface de Gautier à Mademoiselle de Maupin se lit comme un manifeste de l’« Art pour l’Art », celle de Sartre au Portrait d’un inconnu de Nathalie Sarraute, permet au philosophe d’exprimer sa vision de l’homme et de la littérature. Néanmoins, les préfaces allographes semblent se substituer, aux XXe et XXIe siècles,  aux préfaces auctoriales. Mais malgré certaines fonctions communes, peut-on dire que l’enjeu des instances préfacielles soit identique ? Des écrivains comme Malraux ou Sartre ont acquis la renommée de « maîtres préfaciers ». Le contenu théorique  de leurs préfaces est ce qui capte l’attention du lecteur. D’autres comme Gracq ou Modiano, ne donnent que peu d’informations sur l’œuvre ou l’auteur préfacé. De fait, leurs commentaires reflètent une dimension poétique qui va dans le sens du plaisir esthétique que peut procurer une préface.  Mais dans les deux cas, le « hors-texte » détourne la parole du « texte » en quelque sorte puisque le discours idéologique ou poétique se superpose au texte, l’occultant parfois, l’interprétant d’autres fois, le trahissant indubitablement. De même, dans les deux cas, les préfaciers allographes contemporains sont souvent à l’origine de la publication des œuvres préfacées, lesquelles connaissent parfois le succès. En outre, dans les deux cas, l’on confie souvent aux préfaciers allographes contemporains la réédition d’œuvres célèbres, ou encore des collectifs rédigés en leur honneur.

En outre,  que le préfacier adopte une posture idéologique ou une posture poétique, il y a une stratégie publicitaire de la préface allographe, caractéristique nouvelle qui la différencie de la préface auctoriale. Ce qui fait dire à Geneviève Idt que la préface allographe est « un discours sur le discours à vendre » (Littérature, n°27, pp. 65-74). Est-ce là la limite de la valeur littéraire de la préface allographe contemporaine ?

Enfin, sur le plan formel, le texte en prose qu’est la préface semble se métamorphoser pour donner lieu à des écritures nouvelles, comme des lettres ou des entretiens. Ou, détail en apparence insignifiant, se faire de plus en plus courte…

Cette réflexion théorique sur le fonctionnement et la fonction des préfaces dans les littératures française et d’expression française, est à l’origine du projet du colloque international que le Département de Français de la Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis se propose d’organiser en octobre 2014. Ce colloque donnera lieu à une publication assurée par Les Publications de la Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis.

 

 

 

Les axes du colloque porteront sur :

- L’histoire littéraire des préfaces.

- Les fonctions des préfaces auctoriales et allographes.

- La valeur littéraire des préfaces.

- Les modalités de la préface.

 

Le comité d’organisation : Mme Emna Beltaïef, Mme Senda Jlidi, Mme Olfa Abrougui, Mme Rania Samet.

Le comité scientifique : Mr Jacques François, Mr Jean-Louis Jeannelle, Mr Ahmed Mahfoudh, Mme Senda Jlidi, Mme Emna Beltaïef.

Les propositions de communications (un résumé et un cv sont demandés) sont à envoyer avant le 28 février 2013 aux adresses suivantes : emnabeltaief@hotmail.fr, sendajlidi@yahoo.fr, abrolfa@yahoo.fr, ou ranya_samete@yahoo.fr.