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D. Turgeon, Le Marsupilami ne faisait que passer

D. Turgeon, Le Marsupilami ne faisait que passer

Publié le par Nicolas Geneix

David Turgeon, Le Marsupilami ne faisait que passer

Article paru sur le site du9.org, août 2019.

"C’est trop facile : à peine ont-ils établi leur campement au milieu de la jungle de Palombie que Spirou et Fantasio tombent nez à nez avec la mystérieuse créature qu’ils étaient venus chercher. Le Marsupilami, pourtant, leur avait-on dit, est rigoureusement introuvable, n’existe probablement pas, en tout cas presque personne ne l’a jamais vu, c’est folie de partir à sa recherche, sans parler des indigènes qui gardent farouchement ce territoire inconnu de l’Homme Belge, vous feriez mieux de rester chez vous. Évidemment les héros n’en ont cure, on attend d’eux qu’ils aillent au-devant du danger sans trop réfléchir, c’est leur rôle et puis après tout c’est comme ça, pas besoin de discuter, puisqu’on sait que ça se termine toujours bien, allons-y franco, sans peur et sans reproche, par ici l’aventure, hardi compagnons, enfin vous connaissez la chanson. Mais cette fois, la ficelle est quand même un peu grosse, surtout après avoir tant insisté sur les insurmontables difficultés de l’entreprise. Les héros, arrivés sans grande péripétie au bout d’un voyage somme toute pas trop contraignant, n’ont pour ainsi dire qu’à se pencher : le Marsupilami est là, prêt à être cueilli.

Lire Spirou et les héritiers aujourd’hui, à moins de tout ignorer des tomes subséquents de la série, provoque un sentiment plutôt singulier : d’une part Franquin y élabore certains des pans les plus tenaces d’un mythe jusqu’alors à peine ébauché ; d’autre part, tout se passe comme si l’auteur souhaitait accommoder d’hypothétiques lecteurs futurs pour qui la découverte du Marsupilami n’est censée provoquer aucune surprise particulière, son existence étant déjà acquise dans l’esprit de tous. Pour nous qui connaissons trop bien notre Spirou, la rencontre inaugurale des héros et du Marsupilami tient de la formalité, or c’est précisément comme une formalité qu’elle est traitée dans le récit, alors que les deux autres épisodes majeurs des Héritiers (le concours d’inventions et la course automobile) ont droit à une élaboration beaucoup plus conséquente. Comme si au sujet du Marsupilami il n’y avait pas matière à insister ; comme si, pour Franquin, l’affaire était conclue d’avance. (...)"

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