Essai
Nouvelle parution
D. Collin, Le Cauchemar de Marx. Le capitalisme est-il une histoire sans fin ?

D. Collin, Le Cauchemar de Marx. Le capitalisme est-il une histoire sans fin ?

Publié le par Florian Pennanech (Source : Sophie Vouteau)

Denis Collin, Le Cauchemar de Marx. Le capitalisme est-il une histoire sans fin ?, Paris, Max Milo, coll. "L'inconnu", 2009, 320 p.

  • EAN 13 : 9782352410552

  • Prix : 24,90 €

En 1992, Fukuyama  annonçait victorieux « la fin de l'histoire1 ». Le monde n'aurait pas de meilleur système économique (le marché) ni de meilleur système politique (la démocratie). Les systèmes dominants actuels constitueraient un horizon indépassable. Marx, un siècle et demi plus tôt, avait prédit « la fin de la pré-histoire » que laissait augurer selon lui « la décadence capitaliste » et sa pensée fut marquée par la volonté de montrer que le capitalisme portait en lui le germe de sa propre destruction. Il s'avère que les grands développements de l'histoire du capitalisme sont conformes aux analyses marxiennes. Qu'il s'agisse des structures socio-économiques fondamentales (concentration, centralisation du capital, libéralisation des échanges, division mondiale du travail, globalisation etc.), du développement de la spéculation sur les attentes de profits à venir, des fonds d'investissement, des SA, toutes les tentatives par lesquelles le capital cherche à dépasser les barrières propres au rapport capitaliste, étaient exposées dans l'oeuvre majeure de l'auteur2. Mais la société socialiste que Marx voyait se profiler - celle dans laquelle la production serait gérée démocratiquement pour pourvoir aux besoins de l'humanité entière - n'a jamais vu le jour. Là où l'optimisme philosophique voyait la réalisation de toutes les potentialités de l'humanité, c'est l'aliénation la plus totale de l'essence humaine qui s'est accomplie. Ainsi selon Denis Collin, ce n'est pas le vieux rêve marxien qui s'est réalisé mais incontestablement son cauchemar. Idéologie d'une certaine étape historique, le marxisme en tant que mouvement réel, s'est heurté aux limites du matérialisme historique . Le facteur décisif de sa théorie (cette classe révolutionnaire apte à conduire le processus historique est en délitement) fait défaut. Dans un texte clair, argumenté, précis et excellemment référencé, Denis Collin affirme la puissance prophétique de l'auteur du Capital : « le mode de production capitaliste ne s'est développé qu'en développant en même temps sa propre négation mais selon des modes et à travers une histoire qui ont transformé le rêve en cauchemar ». Mais, en opposition avec credo thatcherien libéral « there is no alternative » la pensée marxiste incarne toujours la possibilité d'une altérité radicale, l'élan vital "jamesonien"3 . Il reste alors à élaborer une théorie nouvelle de l'émancipation humaine afin de ressusciter le vieux rêve marxien, philosophie d'une véritable métaphysique de la liberté : replacer l'homme au coeur de la liberté. C'est in fine, l'invite de ce texte.  

 1-  Fukuyama Francis, La fin de l'histoire et le dernier homme, Paris, Flammarion, 1992, pp. 81-170.
 2- Le Capital, Livre III, Karl Marx, 1867
 3- Fredric Jameson, Archéologies du Futur - Le désir nommé utopie, 2007, Max Milo