Questions de société
Communiqué des enseignants parisiens sanctionnés pour

Communiqué des enseignants parisiens sanctionnés pour "abus de liberté pédagogique" (SLU-15/09/09) + "E. Redon déplacé d'office" (Comité de soutien à E.R. 18/09/09)

Publié le par Bérenger Boulay

Communiqué des enseignants parisiens sanctionnés pour « abus de liberté pédagogique » (15 septembre 2009)

http://www.sauvonsluniversite.com/spip.php?article2938

Pour les 13 enseignants ayant refusé publiquement de mettre en placel'arnaque de la pseudo « aide personnalisée », le rectorat de paris aprocédé à de nouveaux retraits de salaire jusqu'à juin, malgré toutes lesirrégularités de la procédure reconnue désormais par les tribunauxadministratifs.

A Montpellier comme à Marseille, le juge a ordonné la suspension desretraits de salaire décidés par les IA, retenant comme motif «  lorsquel'agent, bien qu'effectuant ses heures de service,n'exécute pas tout ou partie des obligations de service qui s'attachent à safonction tellesqu'elles sont définies dans leur nature et leurs modalités par l'autoritécompétente dans lecadre des lois et règlements ; qu'en l'état de l'instruction, le moyen tiréde ce que lesmodalités des obligations de service ... n'ont pas été précisées est denature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décisionattaquée ».

C'est aussi tout un ensemble d'abus illégaux, illégitimes que noussouhaitons soulever par le recours que nous avons déposé au TribunalAdministratif de Paris, et, sur le fond, d'atteintes à la liberté d'opinioninadmissibles, puisque nous l'avons constaté à plusieurs reprises, c'est laliberté de critique de la politique gouvernementale qui devient toutsimplement intolérable pour le pouvoir.

Nous ne manquerons pas d'attaquer la confusion entre « service non-fait » et« désobéissance hiérarchique » qui permet à l'IA de sanctionnerfinancièrement le fait d'organiser autrement les 60 heures.

Ainsi que l'a déjà jugé le Conseil Constitutionnel, une sanctiondisciplinaire ne saurait être assimilée à une sanction financière.

Mais pour engager une procédure disciplinaire il faut un constat. Et unconstat qui atteste d'un manquement par rapport à la définition de l'aidepersonnalisée, et de la non exécution d'un service défini. Or le problèmec'est que justement l'aide personnalisée n'a pas de définition précise etque son cadre est l'objet de caractérisations les plus floues etcontradictoires ! C'est d'un côté du « temps d'enseignement » et d'un autrecôté ça n'est pas compris dans les 24 heures « d'enseignement » !

C'est du « temps scolaire » et à la fois « périscolaire » ! Est-ce du « soutien », de l'aide, de l'aide « spécialisée », du renforcement, del'étayage…Et de quelle « difficulté » parle t-on ? Puisque c'est bien là lecoeur de l'amalgame et de la confusion qui vise à réduire la complexité d'unproblème qui dépasse l'école à la « solution » simpliste énoncée par Darcos : « …nous voulons que les professeurs consacrent deux heures aux élèves engrande difficulté, repérés grâce aux évaluations. Ces enfants …..on va lesaider à faire leurs exercices. Pour ceux-là, le fait de réussir lesexercices mécaniques est beaucoup plus rassurant que toute autre méthode."(débat avec J.Lang)

D'où découle ce qu'annonçait Luc Ferry : "Les deux heures pour les élèves endifficulté… les deux heures de soutien cela permet de supprimer ce que l'onappelle les RASED, c'est-à-dire les réseaux d'aide, de soutien dans lesdépartements et cela fait économiser 8 000 postes."

Quand on parle de "difficulté", on renvoie à l'élève ce qui relève d'uneinadéquation ,on attribue à l'élève ce qui tient à la nature de la relation !mais désormais, la difficulté relève d'un traitement unique.La question de la recherche de la modalité de l'aide disparaît pour celle desimple reprise de ce qui est déjà fait. Bien plus, elle signifie directementaux enseignants qu'ils seront de désormais seuls face aux difficultés, là oùjustement ils réclament de l'aide et du soutien pour des actions deprévention, médiation. Ne reste plus que la perspective du "renforcement"pour ceux qui n'obtiennent pas "les bons résultats", c'est-à-dire au fond enexerçant une violence inutile, on produit très exactement l'inverse durésultat escompté.

On voit très clairement que ce dispositif est le pendant de la refonte d'unprogramme scolaire redéfini par l'extension hégémonique et contraignante del'évaluation.

Ce choix des deux heures de soutien est aussi la conséquence logique de lamise en place des "nouveaux programmes" et la façon dont ils définissent demanière caricaturale la transmission et les contenus, le modèle mythique dumaître qui dispense un savoir et de l'élève qui reçoit, déjà dénoncé en sontemps par Montaigne dans ces mêmes termes.

Les "nouveaux programmes"imposés par le ministre sont fondés sur un retour àce schéma simple (excluant la réalité de l'apprentissage comme expérienceexistentielle, activité de construction, d'élaboration, de mise en relation,de confrontation, de changement de soi, de transformation globale de celuiqui le mène) qui pour être vérifié doit opérer un ensemble de restrictions,de simplifications, des contenus et des méthodes. L'essentiel se résumeraità : la norme, la règle déterminent et permettent l'usage et il suffit decommencer par les plus simples pour aller ensuite au complexe !

D'où la confusion entre enseigner et apprendre, qui va permettre à la foisde sélectionner ceux qui sont en adéquation et les inadaptés, et induit unrapport de pouvoir où se transmettent des contenus fragmentés dont il suffitde contrôler la bonne acquisition, de mesurer le résultat, pour juger de laréussite ou de l'échec.

Le slogan "retour aux fondamentaux" opère une confusion entre ce qui estfondamental dans un apprentissage et cette vieille croyance qu'il y auraitdes composants élémentaires de la connaissance, qui de plus constitueraientdes préalables à maitriser, à connaitre, avant de savoir !

Et c'est bien sûr tout autre chose que cette mécanique simpliste qui vise àréduire les dimensions relationnelles constituantes du sujet enapprentissage, à isoler ce qui constituerait un processus endogèned'acquisition, de ses conditions, contraintes, de ses liaisons,contextualisations sociales, subjectives que nous tentons de mettre en oeuvredans nos pratiques.

Cela étant dit, le caractère politique de la répression des « désobéisseurs » n'aura échappé à personne.Au moment même où les opposants aux contre-réformes sont sanctionnés,d'autres sinistres réactionnaires attachés aux méthodes archaïquessimplistes et indigentes, des adeptes de cette "pédagogie del'abrutissement" dont nous parle J.Rancière dans son ouvrage sur Jacotot, lemaître émancipateur, sont récompensés de la Légion d'honneur !Alors que eux sont des « désobéisseurs » notoires qui se sont vantés de nepas appliquer les programmes officiels sans jamais être inquiétés !

Notre opposition aux contre-réformes Darcos sur la question des programmes,des évaluations, de base-élève, des EPEP doit emprunter de nouveaux cheminscollectifs qui puissent rassembler tous les collègues qui se sont retrouvéssur la plate forme de l'AG nationale.

Nous appelons nos collègues à se retrouver en AG locales pour repenser lesmodalités de la lutte.

Premier rendez-vous, le 17 septembre en soutien à Erwan Redon !

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Erwan Redon déplacé d'office à l'issue d'« un simili-procès kafkaïen »

[source: Poolp]

Lu sur le blog du Comité de soutien à Erwan Redon :
«  Et qui pardonne au crime en devient complice.  »   (Voltaire, écrivain français, 1694-1778)

ERWAN REDON déplacé d'office !
La sanction est tombée à 4h du matin, après 13h de commission, sanctionvotée (à bulletin secret) sur proposition de l'IA, alors qu'Erwan etses défenseurs étaient sortis pour dénoncer les conditions kafkaïennesde ce « procès » : une partie de l'assistance dormait , la défense n'apu faire son plaidoyer.
10 pour, 8 contre, 2 abstentions : ERWAN est déplacé d'office !
Resteà l'Inspecteur d'Académie à annoncer sa décision finale, puisque lacommission n'est que consultative. Erwan pourra donc se retrouver mutén'importe où dans le département.
Le comité de soutien dénonceles conditions dans lesquelles s'est tenue la commission disciplinaire,convoquée à 15h alors qu'on n'ignorait pas que le dossier nécessiteraitune dizaine d'heures pour être traité sérieusement. Il déplore le peu derespect qui a été montré envers les témoins, les défenseurs etl'accusé. Il regrette particulièrement que dans une commission oùsiègent 10 délégués du personnel élus, seulement 8 voix se soient élevéescontre la sanction proposée par l'Inspection d'Académie.
Lecomité remercie les défenseurs, qui se sont battus avec une ténacité etune énergie formidables, les témoins, tout aussi engagés malgré lapression d'une commission marathon. Le travail, la tension, le tempsconsacré ont été énormes.
Le comité se retrouve plus que jamaisaux côtés d'Erwan qui subira seul, in fine, ou plutôt avec sa familleentière, ce jugement.

Voir aussi le Collectif national de résistance à Base élèves.