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Colloque :

Colloque : "Littérature, médias et génocide au Rwanda"

Publié le par Vincent Ferré (Source : Pierre Halen)

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                          LITTERATURe, médias ET GENOCIDE AU RWANDA

 

Université de Metz

Centre Michel Baude - Littérature et spiritualité

& Centre de recherche sur les médias (CREM)

 

Comité scientifique :

Pierre Halen, Danièle Henky, Jean-Paul Kwisera, Jacques Walter (Université de Metz)

Daniel Delas, Romuald Fonkoua (Université de Cergy-Pontoise)

                       Jean Foucault (Institut Perrault, Paris XIII)

 

Les massacres génocidaires qui se sont déroulés au Rwanda en 1994 ont produit un choc profond dans le monde ; ils ont ébranlé lAfrique et la vision quon avait de ce continent. Une masse très importante de documents et de témoignages ont commencé dêtre publiés par écrit et continuent de lêtre ; ils s'ajoutent aux nombreuses productions sous forme de films, de photographies, de monuments, de commémorations, de bandes dessinées, etc. En outre, des textes littéraires ont été composés et publiés : fictions, poèmes, dramaturgies, fables, récits divers (de voyage, de vie, pour la jeunesse), montages de témoignages plus ou moins  littérarisés , etc. Certains sont le fruit de lopération Écrire par devoir de mémoire (initiée par léquipe de FestAfrica), qui a impliqué divers écrivains africains (dont des Rwandais) ; d'autres sont le résultat d'initiatives individuelles, en Afrique et ailleurs. Tous ces documents contribuent à leur manière à façonner une mémoire du génocide. Le présent colloque se propose den analyser les composantes et de montrer le cheminement qui fait passer de la mémoire individuelle, du témoignage singulier, à une mémoire collective que la littérature et les médias, avec leurs esthétiques et leurs contraintes propres, configurent en même temps qu'elles en sont lexpression.

Ces langages, qui ont aussi joué un rôle dans la préparation directe et indirecte des massacres, ont en effet une mission spécifique à assumer pour prendre le relais du journalisme d'information et de témoignage. Mais la tâche est immense et complexe : il est sans doute aussi difficile décrire après Murambi quaprès Auschwitz, en Afrique en particulier.

 

Six axes ont paru pouvoir structurer la réflexion :

                        1/ Langages de l'altérification, langages de la peur, langages de la haine

Comment les représentations de lautre et en particulier celles du Hutu par le Tutsi et celles du Tutsi par le Hutu se sont-elles formées et ont joué un rôle essentiel dans le déclenchement et le déroulement du processus génocidaire ? Comment ont-elles évolué historiquement ? Quel rapport entretiennent-elles avec les formes (génériques, institutionnelles) et les supports de communication qui les ont véhiculées ?
Comment penser les formes de contre-représentations qu'on leur a opposées, par exemple le Lost paradise qu'aurait constitué le Rwanda précolonial ? ces formes sont-elles, indépendamment des contenus, d'une autre nature ?
En somme, quel fut, quel est le rôle de lidéologie dans la constitution des imaginaires mais aussi dans le fonctionnement des écritures ou dans linvention des genres où les inscrire ? Quel rapport, de ce point de vue, entre médias écrits et oraux, verbaux et plastiques ?

Comment expliquer que tant de discours de haine continuent de circuler (sur le web en particulier) sinon par la rémanence dune pression idéologique forte, historiquement descriptible ? Ou est-ce une contrainte communicationnelle, liée au support ? La haine est-elle une nécessité, ou seulement une tentation narrative dans le processus de deuil ?

 

2/ Écritures du génocide, écritures coloniales et post-coloniales

Les écritures qui ont eu pour objet le Rwanda et le Burundi à l'époque coloniale, outre le rôle qu'elles ont joué dans la constitution des identités de la Région des Grands Lacs, procédaient en même temps de modèles narratifs (le légendaire pré-moderne, le roman moderne de maitrise conquérante, le récit de voyage européen) qui ont été mis à mal dès la fin de la période du mandat avec les premières violences politiques. La crise sociale fut aussi crise de lécriture. (On suggère ici notamment de s'intéresser, par exemple, aux uvres d'Antoine Ruti, d'Ivan Reisdorff, d'Anna Geramys).

Est-ce que la crise majeure que fut le génocide débouche aujourdhui sur une écriture de la crise ou une écriture en crise ? Comment lappréhender ? Quels liens pourraient être établis avec les descripteurs employés par ailleurs : "post-national", "post-moderne", "post-colonial", "nouvelles écritures africaines" ?

 

3/ De la responsabilité de lécrivain, de l'intellectuel, du témoin

Si lécrivain ou lintellectuel ont une responsabilité et/ou une utilité, le journaliste est aussi, et de plus en plus peut-être, artisan créateur, voire artiste écrivant ; de même, du photographe, qui médiatise comme lui des valeurs. Ceci vaut également pour les témoins eux-mêmes, rescapés des massacres et invités à occuper des positions d'auteurs ou d'acteurs des processus mémoriels. On voudrait interroger à la fois cette répartition formelle des rôles et leurs interférences mutuelles : c'est là une question vive de poétique, entre témoignage et fiction, "donné" et "construit".

 

4/ Écritures du génocide et problématique(s) des champs littéraires

Lopération Écrire par devoir de mémoire a abouti à la publication de plus de dix livres, donné une large audience à ces textes et responsabilisé lAfrique littéraire. Quel champ souvre ainsi, quelles sont ses lignes de force, quelle évolution peut-on déjà déceler ?

D'autres aspects institutionnels peuvent être évoqués : quel rôle ont joué les États nationaux, les O.N.G., les Églises, les associations diverses, dans la production mémorielle ? On n'exclura pas a priori les considérations visant le capital symbolique des producteurs de mémoires, institutions ou individus créateurs.

 

5/ Psychanalyse et narration

 Devoir de mémoire  ou plutôt  Travail de mémoire , comme on dit : travail du deuil. Comment oublier ? Faut-il oublier ? Enterrer les morts ? Effacer les charniers ? Comment penser le mémoriel indépendamment du politique ? De l'esthétique ? Ces questions ouvrent autant de débats sur ce terrain.

 

                        6/ Intertextualités

L'expérience du génocide est, on le sait, à la fois unique et a priori indicible. Néanmoins, elle est dite, et forcément recourt-elle alors à des langages déjà chargés d'histoire. Quels rôles poétiques, rhétoriques, institutionnels, assurent ici l'allusion, la connotation, la référence au "discours antérieur", notamment les renvois à la Bible et aux récits de la Shoah ?

 

Ce Colloque, qui fera une grande place à la littérature, est ouvert à toutes les disciplines (psychanalyse, sociologie, histoire, philosophie, etc.). La participation active des spécialistes des Sciences de la Communication est d'autant plus souhaitée que les divers objets étudiés (écrits, écriture sur le web, paralittérature, cinéma, audio-visuel, photographie) les concernent au premier chef.
Des formes diversifiées d'intervention et de débat (conférences lourdes, tables rondes, postaires, ateliers, etc.) peuvent être proposées.
Sans exclusion pour des formes créatives de participation : expositions, représentations, spectacles, vidéos, textes

Calendrier :
les propositions de communications, d'ateliers, de tables rondes, etc., sont à envoyer dès que possible et avant le 15 octobre 2002. Elles feront alors l'objet d'un premier examen, au terme duquel le programme trouvera sa configuration d'ensemble.
Les dernières propositions et précisions devront être apportées avant le 31 janvier 2003. 

  • Responsable :
    Pierre Halen, Danièle Henky, Jean-Paul Kwisera, Jacques Walter (Université de Metz)