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Camus et les lettres algériennes

Camus et les lettres algériennes

Publié le par Camille Esmein (Source : amina bekkat)

Université d'Alger- Université Paul Valéry Montpellier III
Faculté des Lettres et des Langues
Département de Français
Courriel : departfr@hotmail.com
afifabererhi@yahoo.com


Symposium international
24-28 Avril 2006
Alger- Tipasa

Camus et les Lettres algériennes : l'espace de l'inter discours


Prix Nobel de littérature, Albert Camus est avant tout resté dans l'imaginaire collectif l'auteur de L'Etranger. Mais, au-delà de cette référence emblématique, son oeuvre abondante et diverse, ses activités multiples, ses prises de position remarquables, sa controverse très médiatisée avec Jean-Paul Sartre, sa conscience citoyenne notoire, ont fait de lui un acteur de tout premier plan dans le paysage intellectuel français de la riche décennie 1950 avant de lui conférer une dimension mythique après sa mort absurde.
Eminemment universelles, la pensée et l'écriture de Camus sont en même temps passionnellement arrimées à la terre d'Algérie. Pourtant l'intelligentsia algérienne parmi laquelle il comptait bien des amis et de nombreux admirateurs l'a boudé au lendemain de l'accession de l'Algérie à l'indépendance. Indexé sur le noeud gordien de la question nationale à un moment où celle-ci se négociait par les armes, le différent, sans avoir été réellement apuré à ce jour, a cependant enregistré, au cours de ces dernières années, un recul de la polémique, révélateur d'un apaisement des passions. En même temps, on a vu revenir en force le nom de Camus sur les scènes culturelles de France et d'Algérie. Et ce, à la faveur d'une part de l'édition posthume du roman Le premier homme ; d'autre part, du retour de la violence armée sur la terre algérienne pour une autre redéfinition identitaire. Pure coïncidence ou conjonction de lignes de force souterraines émanant de préoccupations nouvelles, mobilisées par de nouveaux enjeux ?
Quoi qu'il en soit, l'oeuvre de Camus suscite un renouveau d'intérêt tant en France qu'en Algérie, donnant lieu à des discours critiques plus diversifiés et signe des temps plus nuancés que par le passé, moins inféodés aux « certitudes » idéologiques.
A l'heure où du côté algérien, il est devenu urgent de restaurer une mémoire perlée de trous afin de mieux assumer le passé dans sa complexe diversité, avec ses conflits et ses contradictions, il nous a semblé intéressant de revisiter l'oeuvre de Camus. Il n'est nullement question d'engager une quelconque campagne de « réhabilitation » dont, au demeurant, l'image de Camus n'a aucun besoin, mais plutôt de sortir le débat de l'impasse idéologico-politique où il s'était enlisé et qui est devenue aujourd'hui anachronique. Il s'agit, pour nous, de considérer l'oeuvre camusienne sous l'angle de sa postériorité dans la création littéraire algérienne. En effet, celle-ci (qu'elle soit de langue française ou de langue arabe) porte la trace plus ou moins diffuse, plus ou moins manifeste, d'un dialogisme mettant en oeuvre, outre des éléments polémiques d'interpellation du chantre de Tipasa, des échos de cette pensée de midi dont l'auteur de Noces s'était fait le hérault. Il semble judicieux, pour repérer et apprécier ces traces, de revenir aux oeuvres « algériennes » de Camus, celles où le pays habite massivement le texte ou hante ses lisières.
Mettre sous les feux de la rampe ce palimpseste pour tâcher d'en décrypter des fragments, nous semble une bonne entrée en matière pour initier un travail de repérage et d'archivage de ces signes partagés qui relient les littératures aux littératures et rapprochent les hommes des hommes, quelles que soient, par ailleurs, leurs divergences de vues.
Il s'agira de revisiter quelques textes camusiens et de détecter, dans des textes d'écrivains algériens, l'ombre portée de la pensée, des thèmes, du discours camusiens et d'analyser le travail littéraire auquel il donne lieu. Ce faisant, nous espérons montrer comment les textes font leur miel d'autres textes, comment ils résonnent de voix diverses et conflictuelles, comment ils charrient des pans plus ou moins oubliés de notre histoire, comment ils participent à (re)donner couleur et saveur à cette histoire. Dés lors, nous espérons faire à l'héritage camusien que celui-ci soit affiché ou estompé, qu'il soit inscrit dans les textes de façon polémique, parodique ou révérencieuse un sort digne de cette grande voix de notre passé récent. Car audible ou inaudible, le retentissement de cette voix résonne toujours dans le champ culturel algérien.
Si avec ce colloque nous parvenons à faire avancer, un tant soit peu, l'idée de la primauté de l'analyse et du débat d'idées sur l'anathème, si nous réussissons à faire apparaître l'inanité des certitudes figées et la vertu du doute dans la quête du sens des choses et la compréhension de la marche du monde, nous aurons contribué si peu soit-il à sortir la critique des ornières du « déjà pensé » pour laisser l'opinion de chacun se forger librement. L'ambition qui nous anime est d'apporter notre pierre et à la restauration de vestiges de notre patrimoine et à la construction, nécessairement laborieuse, de notre richesse culturelle future.


Date limite de réception des titres et résumés de communication : 30 Septembre 2005