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Campistron et consorts : tragédie et opéra

Campistron et consorts : tragédie et opéra

Publié le par Aude Arcelin

Le Centre de Recherche "Idées, thèmes et formes (XVIe-XVIIe siècles)" a le plaisir de vous annoncer pour début décembre 2002 la tenue du colloque Campistron et consorts : tragédie et opéra en France de 1683 à 1733. Les chercheurs dont les travaux rencontrent les interrogations proposées sont invités à envoyer dès que possible un projet de communication accompagné d'un résumé et d'une courte bio-bibliographie à Jean-Philippe Grosperrin.

En raison de diverses contraintes, financières notamment, nous vous prions d'envoyer votre projet, le cas échéant, avant le 15 mai prochain. Le comité de préparation examinera les propositions et, si nécessaire, pourra suggérer des modifications en vue de la cohérence du colloque. Réponse sera donnée aux intéressés en septembre 2001. Une seconde circulaire, précisant le programme et le détail de l'organisation matérielle, vous sera adressée ultérieurement.

Nous vous remercions de l'attention que vous voudrez bien prêter à notre projet et nous espérons avoir l'honneur et le plaisir de vous accueillir dans quelques mois à Toulouse.

« Sur le Racine mort le Campistron pullule » : Victor Hugo s'est évertué à faire de Campistron (1656-1723) le type même de l'épigone imitateur par qui la tragédie classique aurait perdu ses «plumes d'aigle». Méritait-il cette indignité ? Dramaturge aux succès indéniables, ce Toulousain au service des Vendôme, académicien français et mainteneur aux Jeux floraux, est l'auteur de tragédies où l'héritage des grands classiques est infléchi par des préoccupations psychologiques, morales et politiques originales. Bien plus, non content d'être le dramaturge français le plus considérable des années qui suivirent la retraite de Racine, il fut aussi le collaborateur de Lully, de Colasse ou de Marais à l'opéra. C'est dire que l'uvre de Campistron fournit un point d'observation privilégié de l'évolution de la scène tragique, laquelle touche aussi bien à la tragédie déclamée qu'à la tragédie lyrique, voire à la pastorale héroïque. Il n'est cependant pas le seul : avec Fontenelle, Houda de La Motte, Longepierre, Duché ou encore Lagrange-Chancel, Danchet et l'abbé Pellegrin, nous tenons des dramaturges du plus grand intérêt, qui, sans dédaigner parfois la théorie, s'illustrèrent à la fois au théâtre et à l'opéra, dans des décennies où l'opéra certes triomphe mais où la tragédie est très loin d'être moribonde.

Nous proposons ainsi d'explorer ce massif encore trop peu arpenté, entre les premiers succès de Campistron et la création d'Hippolyte et Aricie (ultime livret de Pellegrin pour le premier chef-d'uvre de Rameau). Il s'agit non seulement de redécouvrir ou de réévaluer l'uvre de dramaturges éminents, mais plus profondément de s'interroger à la fois sur le devenir de la tragédie classique après Racine, sur les voies originales ouvertes par l'opéra, et sur l'unité du genre tragique sous l'Ancien Régime, de la fin du règne de Louis XIV jusqu'au début du règne de Louis XV.

Un tel champ d'études appelle des approches croisées, sollicitant évidemment l'histoire des formes esthétiques (littéraires, musicales, plastiques) mais tout autant une appréhension des valeurs morales, politiques ou religieuses sous-jacentes à ce théâtre. Les questions politiques traversent la tragédie mais aussi l'opéra, et les deux spectacles sont alors le lieu par excellence où fleurissent transgressions morales et apologie du couple matrimonial, et où les querelles religieuses du temps se monnayent en figurations mythologiques ou en profils psychologiques. Plus généralement encore, tragédie et opéra se trouvent embarqués dans les débats consécutifs à la Querelle des Anciens et des Modernes, et d'autant plus qu'ils apparaissent alors comme des creusets où viennent se fondre, dans un mélange souvent instable, archaïsmes et modernités.

Avec Campistron et consorts, c'est ainsi l'ensemble de la production tragique qui attend d'être examiné sur de nouveaux frais. On s'attachera plus exactement à envisager les directions suivantes :

1) RAPPORTS ENTRE POETIQUE DE LA TRAGEDIE ET POETIQUE DE L'OPÉRA
a) Des émotions tragiques.
Les modes du pathétique et de la catharsis. Préséance de la terreur ou préséance de la pitié ? Tensions entre tendresses galantes et horreur sénéquisante.

b) De la représentation. Comment représenter le "merveilleux", le sublime, le silence ? Convient-il de dire ou de montrer ? Peut-on dégager et définir une esthétique du "tableau" ?

c) Du style tragique. Ecriture et modèles (Corneille, Racine, Quinault). Vers une nouvelle rhétorique du pathos ? À quelles conditions parler d'une "tragédie néo-classique" ?

d) Des frontières entre les genres. Les rapports entre tragédie et pastorale héroïque. Circulations d'un même sujet de la tragédie à l'opéra, et inversement. Poétiques de l'évocation et de l'invocation. L'opéra est-il reçu comme parodie de la tragédie ? La tragédie a-t-elle dégénéré en (mélo)drame ?

2) LES ENJEUX MORAUX : D'UN SIÈCLE À L'AUTRE
a) Les égarements du cur et de l'esprit.
Vers une psychologie des égarements et des agressions. Le goût de l'inceste, du parricide, de l'infanticide. Effets moraux de l'horreur et de la pitié.

b) Les figures de la loi et du pouvoir. Le roi, le père, le prêtre et leurs combinaisons. Politiques de la tragédie et de l'opéra.

c) L'héroïsme en question. Pour une redéfinition de la vertu héroïque ? Vertus publiques et vertus privées. Le recyclage de la matière épique (antique ou moderne). Peut-on parler d'un embourgeoisement de la tragédie ?

d) À qui la faute (tragique) ? Les rapports de la fatalité et de la responsabilité. Les modes de l'action divine. Le statut tragique des passions représentées.

3) LE STATUT DU MYTHIQUE ET DU RELIGIEUX
a) Mythe et histoire.
Choix et valeurs des mythes. Une émergence de mythologies nouvelles ? Jouer l'Histoire contre la Fable ? La rémanence de la lecture allégorique.

b) La religion sur la scène. La Bible au théâtre et à l'opéra. Enchantements et esthétisation du sacré ; rites et cérémonies, oracles et prophéties. Le sublime du terrible et son expression. Enjeux suites, jansénistes, quiétistes de la dramaturgie.

c) Une évacuation du métaphysique au profit du psychologique et du plastique ?

Adresse postale :
Université de Toulouse-Le Mirail
UFR de Lettres, Philosophie, musique
5, allée Antonio Machado
F-31058 TOULOUSE Cedex 1