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Autour d’une édition : les Cahiers d’Henri de Régnier (Paris)

Autour d’une édition : les Cahiers d’Henri de Régnier (Paris)

Publié le par Université de Lausanne (Source : Bernard Roukhomovsky)

Autour d’une édition : les Cahiers d’Henri de Régnier

Institut de France – salle Hugot – 19-21 novembre 2020

Colloque organisé dans le cadre du programme ENCHRE

Édition numérique des Cahiers d’Henri de Régnier

par l’UMR 5316 LITT&ARTS (Université Grenoble Alpes)

en partenariat avec l’ITEM (Équipe Valéry), l’Institut de France

et la Société des Lecteurs d’Henri de Régnier

à l’occasion de l’inauguration du site de l’édition numérique

sous le haut patronage de Monsieur Xavier Darcos, Chancelier de l’Institut

 

Figure de proue du Symbolisme, tout à la fois poète, romancier, essayiste, critique, mais aussi diariste, Henri de Régnier (1864-1936), écrivain à l’œuvre considérable et célèbre en son temps, fut bientôt presque oublié après sa mort, en partie pour avoir été une des figures officielles de la IIIRépublique – il fut notamment académicien. Un temps relégué au rang d’écrivain aimable, mais daté et pour tout dire mineur, Régnier jouit pourtant d’un renouveau des études critiques favorisé par plusieurs publications et manifestations, dont le colloque qui lui a été consacré en 2013 (Henri de Régnier tel qu’en lui-même enfin ?, Grenoble). Désormais, on s’attache donc à lire pour lui-même cet écrivain beaucoup plus divers, riche et profond qu’on a pu le croire, et méritant mieux, en particulier, que le statut d’un devancier qui serait devenu, au prix de quelques plagiats par anticipation, un simple épigone de Marcel Proust.

À cet égard, les milliers de notes rédigées au fil des jours par Henri de Régnier, un demi-siècle durant (1887-1936), dans ses Cahiers, forment une œuvre à part entière et d’une richesse exceptionnelle. En les mettant au jour, l’édition procurée par François Broche et David J. Niederauer (Pygmalion, 2002) a contribué au regain d’intérêt dont bénéficie l’écrivain depuis quelques années. Dans le même temps, elle a fourni un gisement précieux d’indications sur la vie littéraire et mondaine de l’époque (abondamment mis à contribution, par exemple, par Hélène Martin-Fugier dans son enquête sur Les salons de la iiie République ou par Gordon Millan dans sa reconstitution des « Mardis » de Stéphane Mallarmé).

Cependant, ce continent longtemps enseveli demeure encore très largement inexploré. De là le projet d’une édition numérique des Cahiers d’Henri de Régnier (auxquels on a pris le parti d’ajouter ses carnets de voyage et calepins divers). Développé au sein de l’axe 1 (Nouvelles philologies et Humanités numériques) de l’UMR LITT&ARTS (Université Grenoble Alpes) et du consortium CAHIER (https://cahier.hypotheses.org/enchre), en partenariat avec la Société des Lecteurs d’Henri de Régnier et l’Institut de France, ce projet vise à mettre à la disposition du public (notamment des chercheurs) une transcription entièrement révisée et complétée (consultable au choix dans une version diplomatique et/ou dans une version linéarisée et corrigée), assortie d’un paratexte critique et d’outils de recherche élaborés en fonction des multiples aspects (biographique, historique, littéraire…) qui font l’intérêt cette écriture de soi à soi, et comme telle non destinée à la publication.

Tout comme les deux journées d’étude auxquelles il fait suite (Grenoble, 28-29 novembre 2018), le colloque Autour d’une édition : les Cahiers d’Henri de Régnier, qui donnera lieu à l’inauguration du site de l’édition numérique, répond à la volonté d’adosser ce projet (dans sa double dimension philologique et technologique) à un programme de recherches susceptibles d’en établir la pertinence scientifique, d’en orienter la conception et d’en accompagner la mise en œuvre, mais aussi – par un effet de mutuelle interaction – de s’en nourrir en retour. Seront privilégiés, dans cette optique, les axes d’étude que les journées grenobloises, au point de contact entre l’approche éditoriale et l’analyse critique, ont permis d’esquisser.

L’histoire des Cahiers. Nous connaissons les Cahiers non comme une œuvre en devenir, mais figés sous la forme de 11 volumes reliés, répartis entre les collections de la BnF et celles de la Bibliothèque de l’Institut. La description matérielle de ces manuscrits – y compris celle des lacérations qui, ajoutées à la perte des trois premiers cahiers, en affectent l’intégrité –, fournit des jalons pour tenter d’en retracer l’histoire : histoire qui n’est pas seulement celle de leur écriture, mais celle aussi des relectures et reclassements a posteriori, des interventions rétrospectives, voire posthumes, dont ils ont fait l’objet. Elle est celle également de la relation complexe que Régnier, au fil des ans, entretient avec ses Cahiers et des usages successifs qu’il leur assigne : aussi s’en explique-t-il en de nombreux endroits – affleurements remarquables d’un métadiscours qui mérite examen.

Le genre des Cahiers. Rien de plus incertain que le statut de cet objet singulier que la critique, à l’instar de l’auteur, désigne indifféremment  sous les noms de « Cahiers » et de « Journal », qui semble tenir alternativement – voire simultanément – du journal intime, du zibaldone ou du cahier d’esquisses, du recueil d’anecdotes et de bons mots dans la tradition des anas, ou encore du livre de pensées détachées à la manière des moralistes, et demeure pourtant foncièrement irréductible à telle ou telle de ces catégories. De fait, si les Cahiers ressortissent au régime de l’écriture diaristique, ils ne répondent pas en tout point à la norme du journal intime, dès lors que, comme le résume Bertrand Vibert, « Régnier n’y raconte pas sa vie » (au moins sur un mode factuel, et si l’on met à part « le compte de [s]es dîners en ville »). Cette impureté générique fournit-elle la clé d’une poétique des Cahiers – voire du genre des Cahiers ?

La matrice d’une œuvre. Si les Cahiers sont assurément bien davantage qu’un avant-texte – et tout autre chose au fond –, ils n’en constituent pas moins, à plus d’un titre, une manière de laboratoire. Des enquêtes, même partielles, mais précieuses pour une étude génétique des œuvres publiées du vivant de l’auteur, permettront de mettre en évidence ce qu’elles empruntent à cette matière première : du réemploi le mieux établi à l’écho le plus atténué, une typologie fine distinguera notamment entre les réutilisations programmées (immédiates ou différées, à l’identique ou non) et les recyclages tardifs. Et ceci vaut également pour ce qui concerne l’abondante œuvre critique de Régnier, que l’on gagnera à rapprocher de ces pages nombreuses, dans les Cahiers, où s’élabore, par fragments, ce qu’il faut bien nommer une esthétique – littéraire, picturale, musicale.

Ces perspectives – qui se recoupent en plus d’un point – ne sont nullement exclusives d’autres approches possibles, lesquelles pourront s’inscrire ou non dans le champ des études sur Régnier. Les interventions portant sur des corpus comparables seront en effet susceptibles de donner lieu à des confrontations très éclairantes, en particulier lorsque ceux-ci font l’objet (à l’instar des Cahiers de Valéry par exemple) d’un projet d’édition numérique.

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Bibliographie

– Henri de Régnier, Les Cahiers inédits, édition de David J. Niederauer et François Broche, Paris, Pygmalion/Gérard Watelet, 2002.

– Bertrand Vibert, « Les Cahiers d’Henri de Régnier ou le laboratoire du songe », dans Les Journaux d’écrivains : enjeux génériques et éditoriaux, sous la direction de Cécile Meynard, Bern, Peter Lang, 2012, p. 163-177.

– Henri de Régnier, tel qu’en lui-même enfin ? sous la direction de Bertrand Vibert, Paris, Classiques Garnier, coll. « Rencontres », 2014.

– Une sélection des communications prononcées lors des journées d’étude de Grenoble (28-29/11/2018) est publiée dans le n° 5 de la revue Tel qu’en songe (Cahiers de la SLHDR), 2019, à paraître.

– Sur les Cahiers, voir également Henri de Régnier, Choses et autres. Par-ci, par-là… suivi de Donc… et de Demi-Vérités, édition critique par Bernard Roukhomovsky, Classiques Garnier, coll. « Bibliothèque du xixe siècle », 2018, p. 397-308.

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Les propositions de communication – titre, présentation (2.000 signes maximum) – accompagnées d’une brève bio-bibliographie (statut/fonction, établissement de rattachement, publications principales) doivent être adressées par courriel, avant le 15 mars 2020, à :

bernard.roukhomovsky@univ-grenoble-alpes.fr

elodiedufour@gmail.com

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Comité scientifique

Sophie Basch, Sorbonne Université

Françoise Bérard, directeur de la Bibliothèque de l’Institut

André Guyaux, Sorbonne Université

Claire Lesage, conservateur à la Bibliothèque de l’Arsenal (BnF)

Bertrand Marchal, Sorbonne Université

Bertrand Vibert, Université Grenoble Alpes

Michel Viegnes, Université de Fribourg (Suisse)

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Comité d’organisation

Jessica Desclaux, Université catholique de Louvain

Élodie Dufour, UMR Litt&Arts (Université Grenoble Alpes/CNRS)

Franz Johansson, Sorbonne Université/ITEM

Bernard Roukhomovsky, UMR Litt&Arts (Université Grenoble Alpes/CNRS)