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Artistes et philosophes sur les routes : la circulation des professionnels de la culture et du savoir dans le monde grec antique

Artistes et philosophes sur les routes : la circulation des professionnels de la culture et du savoir dans le monde grec antique

Publié le par Matthieu Vernet (Source : Laboratoire Junior CiTrA)

Séminaire du laboratoire junior CiTrA : « Artistes et philosophes sur les routes : la circulationdes professionnels de la culture et du savoir dans le monde grec antique »

Mercredi 6 avril 2011, 14h-17h

ENSde Lyon, site Descartes, salle F 120

15Parvis René Descartes, Lyon 7eme

Métroligne B, station Debourg

Renseignements :http://citra.ens-lyon.fr

Contacts : clement.sarrazanas@ens-lyon.fr; eiposenna@wanadoo.fr

La circulation des bienscomme des personnes dans le monde méditerranéen a été très tôt facilitée parl'aménagement de voies terrestres, et, surtout, par l'essor du transportmaritime dans l'ensemble du « monde grec », depuis le domaine égéenjusqu'aux côtes égyptiennes ou gauloises. Ces bonnes conditions de circulationont rapidement permis, en dépit du morcèlement de la Grèce en centaines decités, l'apparition de véritables professionnels itinérants, qui parcouraientpériodiquement le monde méditerranéen pour y proposer leurs services. Le phénomèneconcerne toute une série de métiers variés, allant bien sûr des marchands detoute sorte, aux artisans (sculpteurs, architectes, peintres) ou aux ouvriers« spécialisés ».
Sans prétendre épuiser le sujet, nous avons choisi de nous intéresser ici auxdéplacements des professionnels de la culture et du savoir : nous étudierons lecas des poètes, des comédiens professionnels et des philosophes/sophistesitinérants dans le monde grec. Nous qui connaissons presque exclusivement lalittérature et la culture grecque à travers les livres, nous avons parfoistendance à oublier que la transmission et la diffusion des oeuvres littérairesou philosophiques se faisait principalement oralement, physiquement, de labouche à l'oreille, qu'il s'agisse de lectures publiques, de représentationsscéniques, ou de conférences payantes. De ce point de vue, les déplacements,les circuits que pouvaient suivre les principaux acteurs de cette vieculturelle et intellectuelle fournissent un sujet d'étude essentiel pour comprendrecomment cette « culture grecque », qui fit dès l'Antiquitél'admiration des Romains, a pu ainsi essaimer et dépasser largement le cadrelimité de la cité.  
Nous tâcherons également de déterminer les motifs qui pouvaient pousser cesindividus et ces troupes, à se lancer sur les routes : recherche de gloire oude fortune, contrainte liée à la nature même de leur activité, etc. Noustenterons enfin d'examiner le regard que portaient leurs contemporains sur cespersonnages itinérants, à la réputation parfois scandaleuse, à une époque où lacité était souvent le centre et le cadre presque exclusif de la vie d'unindividu.

Avec les interventions de :

· Flore Kimmel (ENS deLyon) « Les voyages des poètes : étude du motif du voyage dans lesbiographies anciennes des poètes grecs des époques archaïque etclassique »

Les biographies antiquessont construites autour d'un certain nombre de motifs qui constituent despassages obligés de toute Vie. Pour les poètes des époques archaïque etclassique, l'un de ces motifs est le voyage du poète. En effet, la question desvoyages se pose systématiquement dans les Vies, qui relatent toujours lesvoyages des poètes, en en donnant parfois des explications. Elles attribuentl'absence de voyage à un refus de voyager, par patriotisme ou refus de secompromettre avec des tyrans : il semble nécessaire de justifier l'absencede récit de voyage dans une biographie de poète.
Le motif du voyage - qu'il s'agisse d'une véritable itinérance, comme pourHomère, ou d'un séjour à la cour d'un tyran, comme pour Euripide ou Eschyle -effectué ou non, semble donc contenir des éléments constitutifs de la figure dupoète. L'étude de ce motif montre que le voyage, loin d'être un élément dedivertissement, qui viserait, par exemple, à apporter de l'exotisme à la vie dupoète, est avant tout d'ordre idéologique. Il permet bien souvent de poser laquestion des rapports du poète à sa cité d'origine. Il est aussi l'un descritères qui permettent d'évaluer les succès du poète hors de sa citéd'origine, et d'asseoir ainsi sa gloire.

· Brigitte Le Guen(Université Paris 8 Vincennes - Saint-Denis) : « Les baladins dumonde méditerranéen, de l'époque hellénistique aux débuts de l'Empireromain »

Tout au long de la périodehellénistique (mais le phénomène perdure sous l'Empire), les artistes de scène,rassemblés pour certains d'entre eux en associations de professionnels, ontparcouru le monde méditerranéen. Les sources épigraphiques - que complètent, lecas échéant, les textes littéraires - en attestent à la foisclairement et abondamment.
La présente communication aura pour premier objectif de s'interroger sur lesconditions matérielles de leurs divers périples et sur la possibilité que nousavons de les cartographier. Nous nous intéresserons ensuite au rôle de cesartistes dans la transmission du patrimoine culturel dont nous sommes en partieles héritiers. Enfin, nous examinerons la manière dont ces perpétuels voyageursfurent perçus par leurs contemporains.

· Michel Narcy (CNRS,Villejuif) : « Sophistes itinérants, philosophessédentaires ? »

Les sophistes - ceux del'« ancienne sophistique » - sont habituellement définis commedes professeurs itinérants, comme si l'exercice de leur profession ne pouvaits'accommoder d'une résidence fixe. À l'opposé, la figure de Socrate ne quittantAthènes que pour remplir ses obligations militaires symbolise l'enracinement duphilosophe.
Je montrerai comment, aux yeux de Platon lui-même, l'itinérance n'est nullementintrinsèque à la qualité de sophiste ; comment, d'autre part, diverstémoignages attestent que ceux qui, par opposition aux sophistes, se sont donnéle nom de philosophes sont loin d'avoir tous échappé à la nécessité de voyager- à commencer par Platon et Aristote.