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Appels à contributions
Art et littérature de l'infamie (Université du Québec, Montréal)

Art et littérature de l'infamie (Université du Québec, Montréal)

Publié le par Laure Depretto (Source : Ania Wroblewski)

Deuxième appel à contribution

 

Art et littérature de l'infamie

 

CHANGEMENT DE DATE :            

23 et 24 mai 2017

Université du Québec à Montréal

 

Date limite : 1 décembre 2016

 

Organisateurs : Ania Wroblewski (UQAM) et Vincent Lavoie (UQAM)

 

Avec la participation d’Elisabeth Ladenson, professeure de littérature française et comparée (Columbia University), auteure de Dirt for Art’s Sake : Books on Trial from Madame Bovary to Lolita (2007) et d’Agnès Tricoire, avocate à la cour de Paris, spécialiste en propriété intellectuelle, auteure du Petit traité de la liberté de création (2011).

 

Depuis l’année 2000, on constate la judiciarisation grandissante de l’art et de la littérature : les auteurs des œuvres et des ouvrages controversés sont assignés de plus en plus souvent en diffamation ou en atteinte à la vie privée. Or, dans le cas de la création d’ouvrages issus de l’imagination, l’idée même de la présentation d’un fait, c’est-à-dire d’un événement ou d’un phénomène qui fait partie du domaine du réel, est sujette à débat. Emprunté au latin diffamatio ­– qui signifie « divulguer, répandre » – et dans la famille du verbe transitif diffamer – qui vient du latin diffamare, de fama « renommée » –, le nom féminin diffamation présente d’emblée comme coupable l’auteur d’une œuvre dite diffamatoire, d’une œuvre que l’on croit produite en toute mauvaise foi. Être accusé de diffamation, c’est avoir transgressé la frontière entre la vérité et la fiction en produisant un ouvrage qui touche de trop près à la réalité ou qui reflète avec trop de clarté ou de façon erronée les lieux et les événements de la vie des autres. En art visuels, la question se complique davantage : peut-on porter atteinte à l’honneur ou à l’intimité d’une personne au moyen d’une peinture, d’une photographie, d’une performance ?

 

Personnelles, intimes, compliquées et souvent hautement médiatisées, les œuvres dites de l’infamie n’entrent pas facilement dans le cadre des analyses sociohistoriques de l’art et de la littérature. En portant à la connaissance du lectorat des idées contestées, elles relèvent de l’intrigue, font agir de façon spectaculaire des jeux de pouvoir et nourrissent le désir universel de voir et de savoir ce qui aurait peut-être dû être passé sous silence. Ce faisant, elles semblent appartenir au domaine du divertissement plutôt qu’à celui des idées. D’ailleurs, comme l’a écrit Martial Raysse dans l’article « Secret de Polichinelle » (2003) condamnant Sophie Calle pour avoir élaboré une œuvre inspirée de leur rupture amoureuse, la diffamation peut même présenter un danger redoutable pour le futur de l’art contemporain : « La liberté en soi de l’artiste s’arrête quand commence celle de l’autre. Une chose est de créer, une autre de s’autoriser à diffamer sous le couvert de la création. Quel que soit le niveau des circonstances, et sous quelque prétexte qui soit, il ne faut pas laisser s’installer de telles pratiques. »

 

Tout de même, c’est précisément à cause du fait qu’elles mettent à l’épreuve les hiérarchies de valeurs des institutions culturelles que ces œuvres nous défient de les étudier sérieusement. Elles soulèvent aussi la question de l’éthique de la création artistique, font naître des discours sur la liberté d’expression, cernent les limites de la liberté de création au regard de la loi et témoignent de la véritable force de l’art et de la littérature dans le réel. Dans certains cas, leur valeur historique est incontestable. Comment se situer en tant que chercheurs, critiques et commentateurs face à des œuvres artistiques ou littéraires qui ont valu à leurs auteurs la condamnation juridique ? dont la qualité artistique ou littéraire est souvent éclipsée par la vérité qu’elles proclament, les secrets qu’elles révèlent et les médisances qu’elles débitent ? Méritent-elles l’inclusion dans les canons artistiques et littéraires ? Si non, pourquoi pas ? Que nous révèle leur statut d’objet d’étude contesté sur les lettres et l’histoire de l’art ? Le fait d’avoir vécu une chose, donne-t-il « le droit imprescriptible de l’écrire » comme le soutient Annie Ernaux dans L’événement (2000) ?

 

Nous invitons des propositions de contribution qui réfléchissent aux enjeux actuels de la judiciarisation de l’art aussi bien que celles qui abordent la thématique dans une perspective historique. Autres axes de réflexions possibles :

  • l’autofiction et la vie des autres 
  • les polémiques suscitées par les accusations de diffamation et d’atteinte à la vie privée
  • la question du genre et les rapports de pouvoir (autant juridique qu’artistique)
  • l’art, l’infamie et la célébrité
  • les leçons à tirer des polémiques récentes (Iacub-DSK, Jauffret, Angot, Louis, etc.)
  • le rôle des médias et de la critique dans l’amplification des affaires portées en justice
  • l’autonomie de l’art face à la loi
  • les enjeux éthiques et juridiques de l’exposition et de l’édition
  • les stratégies élaborées par les artistes, les écrivains, les commissaires d’exposition, les maisons d’éditions, etc., pour ne pas être accusés

 

Les propositions de communication (300-500 mots), accompagnées d’un bref C.V. précisant l’affiliation institutionnelle du chercheur, devront être adressées aux organisateurs avant le 1 décembre 2016 aux coordonnées suivantes : diffamation.artlit@gmail.com Les communications en anglais sont acceptées. 

 

Comité scientifique

Ania Wroblewski, Département d’histoire de l’art, UQAM

Vincent Lavoie, Département d’histoire de l’art, UQAM

Mathilde Barraband, Département de lettres et communication sociale, UQTR

Samuel Archibald, Département d'études littéraires, UQAM

Alain Farah, Département de langue et de littérature française, Université McGill

 

Colloque international placé sous l’égide du programme de recherche interdisciplinaire RADICAL (Repères pour une articulation des dimensions culturelles, artistiques et littéraires de l'imaginaire contemporain), rattaché à Figura, centre de recherche sur le texte et l’imaginaire. www.figura.uqam.ca