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Approche matérialiste des œuvres au programme de l'agrégation de lettres (ENS Paris)

Approche matérialiste des œuvres au programme de l'agrégation de lettres (ENS Paris)

Publié le par Université de Lausanne (Source : Laélia Véron)

Le séminaire SLAC (Séminaire de Lettres des Armes de la Critique) propose une approche matérialiste pluridisciplinaire de la littérature.

Ses séances (mensuelles) sont ouvertes à toutes et à tous. 

 

Valeurs et temporalités de l'échange dans Le Cousin Pons de Balzac :

collections, transactions, accumulations (Laélia Véron, Université d'Orléans)

Cette intervention étudiera, dans une option sociocritique, les temporalités des systèmes d'échange et des valeurs dépeints dans Le Cousin Pons de Balzac, leur imbrication mais aussi leur opposition. Nous nous concentrerons sur la figure du collectionneur, incarnée par Pons, et de la collection, comme figures à la croisée de plusieurs systèmes dans la société bourgeoise de la fin des années 1840. En effet, si la logique du collectionneur et du spéculateur peuvent a priori paraître apparentées (il s'agit d'acheter et de vendre au bon moment), ils s'incarnent cependant dans deux temporalités différentes : alors que le financier établit sa fortune sur la circulation (l'échange de biens et d'argent), le collectionneur au contraire mise sur l'accumulation. Mais cette tendance à l'accumulation peut prendre différentes valeurs : sentimentale, esthétique, ou monétaire (c'est le temps qui donne de la valeur monétaire à la collection). L'ambiguïté de la valeur de la collection est donc à la source de plusieurs paradoxes qu'il s'agira d'interroger : la collection fait-elle du collectionneur un original (dans un monde dominé par les échanges) ou au contraire lui donne-t-elle une existence sociale (si elle a une valeur monétaire) ? Participe-t-elle à un système durable de dons et de contre-dons (qui s'établirait sur des valeurs sentimentales, par exemple familiales) ou peut-elle s'inscrire dans la logique des transactions ponctuelles ? La collection, l'« héroïne de cette histoire » nous dit Balzac, peut être ainsi comprise comme le noyau d'un « sociogramme » (pour reprendre le terme de Cl. Duchet) autour duquel gravitent et s'entrecoisent divers systèmes de valeurs.

 

"Vous m'avez tout rendu", histoire/étude de la réception manquée des Mémoires d'une jeune fille rangée.

(Esther Demoulin, Sorbonne Université)

« Querencia imaginaire » (Danièle Sallenave, 2008), « défense contre la dureté des temps » (Éliane Lecarme-Tabone, 2018), les Mémoires d’une jeune fille rangée auraient, selon la critique beauvoirienne, permis à Beauvoir d’échapper au contexte politique de la fin des années 1950 pour produire une littérature strictement littéraire et centrée sur le moi. C’est effectivement de manière apolitique que le lectorat de l’époque a lu le premier tome des Mémoires de Simone de Beauvoir : les lettres envoyées par les lecteurs et lectrices en 1958 et 1959, consultables à la Bibliothèque nationale de France, confirment en effet le verdict beauvoirien selon lequel « [l]es femmes bourgeoises étaient enchantées d’y reconnaître leur jeunesse » (Entretien avec Madeleine Gobeil, 1965). Après avoir détaillé le contenu de ces lettres, nous tenterons de prouver que cette lecture s’avère partielle et partiale ; ce sera alors l’occasion de montrer pourquoi les Mémoires d’une jeune fille rangée peuvent être considérés, à l’instar des Mots de Sartre, comme une autobiographie politique.

ENS, 45 rue d'Ulm, Pavillon Pasteur.