Essai
Nouvelle parution
A. Jouanna, Le pouvoir absolu. Naissance de l'imaginaire politique de la royauté

A. Jouanna, Le pouvoir absolu. Naissance de l'imaginaire politique de la royauté

Publié le par Marc Escola

Le pouvoir absolu - Naissance de l'imaginaire politique de la royauté
Arlette Jouanna

DATE DE PARUTION : 21/03/13 EDITEUR : Gallimard (Editions) COLLECTION : L'esprit de la cité ISBN : 978-2-07-012047-5 EAN : 9782070120475 PRÉSENTATION : Broché NB. DE PAGES : 436 p.

Le pouvoir absolu épouse la longue histoire de la monarchie. On l'imagine souvent inscrit dans une logique immuable, jusqu'au procès d'indignité que vont lui intenter les Lumières. C'est cette double image de la continuité du système absolu et de son caractère fatalement subversif de toute justice que cet ouvrage met à mal. Absolu, écrit Arlette Jouanna, signifie la possibilité légale de transgresser les lois au nom d'une légitimité supérieure ; et cette idée du pouvoir, loin d'être immuable, n'a cessé de s'infléchir à l'épreuve des bouleversements qui agitent l'histoire politique de la royauté.

Avant les guerres de Religion, on l'ignore trop, le monarque ne pouvait déroger aux lois qu'au titre de l'exception et de l'urgence. Et, même délié des lois, il restait lié par la Raison, cet ordre juste que Dieu faisait régner dans le monde. Mais la déchirure religieuse, en désagrégeant la cohésion sacrale du corps politique, a fait perdre le sens de la correspondance - jusque-là si évidente - entre la cité céleste et la cité terrestre : seul le roi en personne pouvait désormais incarner l'unité des communautés désunies.

L'originalité radicale de la voie française aura été cette construction, à la fois intellectuelle et institutionnelle, d'un espace politique extérieur et supérieur aux passions humaines. Telle est la nouvelle figure du prince absolu, projeté loin au-dessus des sujets dans une proximité mystérieuse et solitaire avec Dieu. C'est cette transcendance qui confère à sa volonté une autorité sans précédent, quasi sacrée, seule capable de tenir ensemble le royaume.

Arlette Jouanna est notamment l'auteur du Devoir de révolte (1989), d'Histoire et dictionnaire des guerres de Religion (1998) et de La Saint-Barthélemy (2007).

 

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On peut lire sur le site laviedesidees.fr un article sur cet ouvrage:

"Les absolus du pouvoir

par Laurie Catteeuw , le 11 juillet 2013

Les guerres qui ont opposé catholiques et protestants ont constitué une inflexion décisive dans l’histoire de la monarchie française. Ce sont elles, montre A. Jouanna, qui ont poussé le pouvoir royal à devenir absolu – faisant du droit d’exception un régime ordinaire.

 

À quoi ressemblait la monarchie de la Renaissance, celle du tout début du XVIe siècle ? Pour Arlette Jouanna, elle ne peut être dite absolue  : « si le roi est délié des lois, il n’en est pas moins lié par la raison » (p. 13). Cet équilibre entre les raisons juridique et gouvernementale apparaît comme un héritage du Moyen Âge, conservé jusqu’au seuil des guerres de Religion. Ces conflits, en effet, portent avec eux une véritable transformation des relations entre la loi divine et l’ordre de la cité terrestre. C’est le temps de la raison devenue partisane, le temps où cette figure rassurante ne saurait encore servir de « guide fiable » au gouvernement des hommes par eux-mêmes.

La thèse défendue est la suivante : le pouvoir absolu ne saurait se confondre, sur la longue durée, avec l’histoire de la monarchie. Contre cette prétendue continuité, l’ouvrage met en scène la rupture radicale, située au moment des guerres de Religion, qui sépare monarchie de la Renaissance et absolutisme. La première fait usage d’un pouvoir certes absolu, mais exceptionnel, de manière à répondre aux situations d’urgence qui s’imposent aux princes : c’est un pouvoir extraordinaire. Avec la seconde, c’est le sens de l’absolu qui se transforme pour adopter un régime d’exercice ordinaire, faisant plier la justice à ses propres nécessités.

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